Aol Becky Bilyeu avait déjà organisé une campagne il y a quatre ans pour la sauvegarde des e-mails gratuits. Elle revient aujourd'hui tout comme des milliers de personnes dans ce combat pour assurer la perennité d'un tel service.

Elle a contacté le groupe d'activistes MoveOn.org qui militent pour un Internet démocratique et respectueux de droits fondamentaux. Dès cet automne, lorsqu'elle entendit AOL, premier fournisseur d'accès Internet aux Etats-Unis, laisser présager le retour de l'e-mail payant, elle a tout de suite réagi.


Le principe de l'e-mail payant contre le spam

Le petit pécule prélevé par AOL - mais Yahoo est également intéressé par cette technique - représente moins de 0,01 dollar et a été lancé officiellement il y a deux semaines. AOL, comme pour se justifier auprès des internautes, a justifié cette pratique de l'e-mail payant comme étant synonyme de lutte contre le spam, ces courriers indésirables que nous recevons dans nos boîtes aux lettres.

Mais beaucoup estiment que les e-mails devraient être gratuits, permettant ainsi la continuité de larges communautés sur le web ( mailing-list ou newsletter, par exemple... ). Près de 500 organisations, de l' Electronic Frontier Foundation aux Gun Owners of America, se sont unis pour former une coalition appelée DearAOL.com.

Cette alliance se méfie en effet des fournisseurs d'accès Internet qui pourraient très bien taxer les organisations à but non lucratif ou caritatif comme c'est actuellement le cas pour les entreprises. AOL a bien sûr nié catégoriquement cette éventualité.

" Il n'y aura jamais de telles demandes de la part d' AOL ", a indiqué le porte-parole de la firme, Nicholas Graham.


L'e-mail, un puissant outil

Bilyeu, âgée de 39 ans, estime de son côté que les petites et moyennes entreprises devraient être exemptées d'une telle taxe. En 2002, elle avait annoncé à la cinquantaine de membres de sa newsletter que son café-restaurant, en proie à des problèmes financiers, allait fermer. Elle avait réussi à toucher la petite communauté qui réussit à collecter, en quatre jours, 3.000 dollars et à sauver de justesse sa petite entreprise.

Face à des géants du genre de Starbucks, elle tient toujours son commerce, remerciant en quelque sorte l'email d'avoir existé et n'oublie pas l'occasion de fidéliser ses clients via une newsletter régulière.

" Je ne me fais pas beaucoup d'argent, je ne peux pas me permettre de payer pour envoyer des e-mails. Je ne veux pas non plus avoir à payer pour être sûre que mes clients auront ma petite newsletter tandis que je paie déjà mon abonnement mensuel 15 dollars. " a t-elle expliqué.

Pour les FAI comme AOL, le challenge n'est pas là. Le but officiel est de lutter contre l'e-mail indésirable ou contre les spams assez dangereux pour faire révéler des identifiants ou informations confidentielles. La firme croit que cette certification des e-mails est la vraie réponse face à ce fléau.

Elle travaille en effet avec Goodmail pour offrir des e-mails certifiés incluant la livraison d'images ou d'hyperliens pour de gros volumes d'envois de courriers électroniques. Graham a indiqué que le programme se déroulait plutôt bien jusqu'à présent et que la compagnie espérait séduire toujours plus d'expéditeurs, notamment dans le secteur bancaire. Yahoo ! compte également utiliser les services de cette société pour ce genre de courriels mais a indiqué qu'elle n'avait aucune ambition de faire payer aux abonnés l'envoi ou la réception d'e-mails.

Autres cas de figures, autres problèmes
L' ACOR ( Association of Cancer Online Resources ) envoit à ses patients de par le monde l'équivalent d'1,5 million de courriers électroniques. Son fondateur, Gilles Frydman, a déclaré qu'il était désireux de voir des " normes ouvertes " du Web - l'email par exemple -, comme un moyen d'aider les domaines de la santé et ses chercheurs. Il a ajouté que l'e-mail gratuit était utile dans son association basée sur des donations privées. Il permet en effet de " faire économiser beaucoup avec très peu de moyens ".

L' Electronic Frontier Foundation, un groupuscule assez actif dans la protection des droits numériques des consommateurs, reconnait que résister au spam tout en le laissant gratuit constitue un réel défi. Mais Danny O'Brien, coordinateur du mouvement, ne voit pas ces nouvelles taxes comme une solution.

En fait, il estime que les FAI pourraient tirer partie de ces revenus et penser à en faire une manne financière de plus plutôt qu'à organiser la lutte contre le spam. " Si les gens payaient Goodmail et non les FAI, alors vous auriez cette séparation des puissances, et les FAI inciteraient rencore plus à réduire le nombre de spams que ses abonnés reçoivent. "

Espérons qu'un bon compromis sera trouvé et que cette pratique ne se répande pas comme une traînée de poudre.