Le 12 septembre prochain, Steve Jobs, PDG d'Apple Computer, nous gratifiera de l'une de ces interventions dont il a le secret, et devrait annoncer la naissance d'un service de téléchargement de films associé à la plate-forme iTunes existante.


Pas une mince affaire
Comme le soulignent avec leur finesse habituelle nos confrères américains de PC World, Apple se heurte à un triple défi en proposant des vidéos de longue durée au téléchargement sur iTunes : il faut offrir un prix attractif, un contenu digne d'intérêt, et un mode d'acheminement adapté. Otez l'un de ces ingrédients, et la mayonnaise risque de ne pas prendre. A Cupertino, on le sait bien, aussi le lancement d'un éventuel service "iFilms" (une pure invention de votre serviteur, qui ne réclamera aucun droit d'auteur pour ce trait de génie...) ne se fera certainement pas dans l'improvisation.

D'aucuns affirment déjà que chaque téléchargement de film coûtera 15 dollars US, un compte rond s'il en est, mais pas forcément le mieux placé pour séduire : d'après une étude menée outre-Atlantique par l'institut Greeson, seuls 14% des ménages disposant d'une connexion ADSL ou équivalente trouveraient ce prix correct, alors qu'ils sont 23% à préférer un tarif inférieur ou égal à 10 dollars US par film. Dix dollars, c'est précisément la somme avancée par Steve Jobs lorsqu'il a commencé à faire allusion au téléchargement de vidéos de longue durée sur iTunes, mais il est à peu près acquis qu'Apple "touchera" ces films aux alentours de 14 dollars US auprès des distributeurs ; à 10 dollars US pour le client, Apple perdrait de l'argent, ce qui n'a rien d'engageant, du moins pour les actionnaires. A quinze dollars US, chaque film rapporterait à la firme de Cupertino seulement un petit dollar brut, une broutille. Cependant, selon Greeson, Apple resterait fidèle à sa ligne de conduite, qui est de proposer des contenus logiciels à des prix relativement contenus, afin de maximiser les ventes de matériels portant sa griffe, un secteur dans lequel les marges sont autrement plus conséquentes...

Pas seul au monde
Où l'on reparle d'un iPod Video. Un vrai. Car il est certain que l'idée trotte toujours dans la tête des géniteurs des précédentes générations de baladeurs multimédia, chez Apple. Mais il est des priorités plus urgentes, comme le fait de mieux cerner où se situe la concurrence, et comment la dompter. Les services de téléchargement de vidéo personnalisables sont en train d'émerger petit à petit. Aux Etats-Unis,  on pense par exemple à Starz Entertainment Vongo, dont le principe de fonctionnement est simple, et plutôt séduisant : pour une somme mensuelle forfaitaire, chaque souscripteur peut recevoir un nombre déterminé de film, sur trois récepteurs de son choix. Parfait pour les films d'animation dans la chambre des enfants en bas âge, ceux d'action dans l'antre des adolescents de la maison, et le reste chez les parents...

Vongo, comme son grand concurrent, Netflix, envisage de passer du "tout souscription" à une offre à la demande. Netflix dit d'ailleurs avoir investi plusieurs millions de dollars US dans la conception d'un programme de téléchargement adapté à une telle pratique commerciale. Les accords passés entre les firmes spécialisées dans le téléchargement de vidéo et les studios de cinéma sont complexes, et mettent parfois plusieurs mois avant d'être finalisés. Annoncer le 12 septembre le lancement prochain d'une plate-forme permettant la mise à disposition de films aux habitués d'iTunes suppose, soit que des tractations en cours sont sur le point d'aboutir, soit que ce service ne verra réellement le jour que dans plusieurs mois. On sait par exemple que Starz Entertainment, pour son service Vongo, a longtemps parlementé avec Disney, Sony, Universal et NewLine avant d'obtenir le droit de proposer à ses clients 40% des catalogues respectifs de ces éditeurs, le tout en respectant des délais incompressibles entre date de sortie à l'écran et proposition de téléchargement. Apple sera confronté aux mêmes règles de fonctionnement.


A prendre ou à garder '
Reste enfin à trouver le vecteur le mieux adapté pour acheminer les vidéos vers les ordinateurs des clients. Vongo et Netflix permettent de VISIONNER des films, pas de les enregistrer ; qui plus est, en souscrivant à ces services, on se condamne à regarder les films en question sur le petit écran d'un PC le plus souvent, à moins de disposer d'une sortie S-Video (et encore...) et/ou d'un moniteur très haut de gamme. Or, les clients tiennent de plus en plus à leur confort, et préfèreraient être capables de regarder les vidéos téléchargées sur un écran de télévision, le tout sans trop de manipulations.

On le voit, les obstacles, techniques comme commerciaux, ne manquent pas, mais les spécialistes estiment que l'arrivée d'Apple sur ce marché apporterait à ce dernier (le marché, pas Apple...) une crédibilité après laquelle il court encore. Lorque deux organismes tirent un égal bénéfice d'une collaboration, on parle de symbiose.

Voilà un joli nom pour un nouveau produit Apple...