Le choix de recourir à l'emprunt plutôt qu'à ses deniers propres pour assurer le reversement promis à ses actionnaires sans avoir à mobiliser ses ressources à l'étranger en disait déjà long sur les méthodes d'optimisation fiscale d'Apple lui permettant de payer très peu d'impôts au regard de son activité, que ce soit dans les pays où la société est présente ou aux Etats-Unis.

En faisant appel à des filiales étrangères montées dans des pays à la fiscalité avantageuse, le groupe de Cupertino expose très peu de capital taxable aux Etats-Unis. Si les méthodes employées ne sont pas illégales en soi, le fisc américain a tout de même du mal à voir lui passer sous le nez des dizaines de milliards de dollars depuis des années.

logo_pro_apple  Apple n'est pas le seul groupe américain à pratiquer l'optimisation fiscale mais peu de sociétés l'ont mis en place à un tel niveau et avec une telle efficacité. La Fédération Française des Télécoms ( FFT ) a produit récemment une étude sur l'évitement fiscal des grands acteurs OTT (Over the Top) en Europe qui suggère qu'Apple est un maître dans l'art de payer un minimum d'impôt.

Tim Cook, CEO d'Apple, ainsi que le directeur financier d'Apple, vont donc être cuisinés par les membres d'une commission d'enquête du Sénat américain parmi lesquels figurent Carl Levin et John McCain, deux spécialistes de la chasse aux fraudeurs, qui vont demander des explications sur le fonctionnement de la filiale irlandaise d'Apple, Apple Sales International, qui aurait, selon un rapport, géré 74 milliards de dollars de bénéfices avant impôt entre 2009 et 2011 sans que le gouvernement américain ni les Etats fédéraux (californien, notamment) n'en voient la couleur.


De forts taux d'imposition qui incitent aux montages financiers
La commission compte articuler ses attaques entre autres sur le fait que les brevets d'Apple sont enregistrés aux Etats-Unis mais que les royalties et retombées issues de leur exploitation sont mises à l'abri de toute imposition.

Et quand Apple tente de se défendre en affirmant qu'elle est la société américaine versant le plus d'impôt en valeur, soit 6 milliards de dollars, John McCain ne manque pas de répliquer qu" Apple est peut-être l'une des sociétés payant le plus d'impôts mais elle est aussi l'une des plus efficaces pour éviter d'en payer".

Tim Cook a préparé sa défense en suggérant que c'est la législation fiscale américaine trop complexe et contraignante qui pousse à cette optimisation à outrance, avec un taux de taxation des entreprises à 35% qui incite fortement à créer des montages financiers dans des paradis fiscaux, ainsi qu'un arsenal de taxes sur les bénéfices à l'étranger qui décourage leur rapatriement et conduit à créer des filiales à l'étranger. D'où la décision d'emprunter plutôt que de rapatrier les plus de 100 milliards de dollars du trésor d'Apple stockés à l'étranger.

Si le gouvernement américain pense effectivement à quelques assouplissements de son code législatif vis à vis des entreprises, la grande remise à plat n'est cependant pas à l'ordre du jour. Hormis quelques recommandations et ajustements, les grands groupes américains devraient pouvoir continuer leurs montages.

Source : Le Monde