L'Arcep, autorité indépendante chargée de réguler le secteur télécom en France, reste plus que jamais dans le collimateur d'Arnaud Montebourg, ministre du Redressement productif, qui lui reproche des décisions trop favorables aux consommateurs et l'a réaffirmé lors des voeux de la FFT (Fédération Française des Télécoms) vendredi dernier.

Un rapport remis début 2013 avait déjà plaidé pour une réduction de son pouvoir de décision, notamment dans le processus des enchères pour les précieuses fréquences mobiles, afin que l'Etat puisse avoir son mot à dire et faire intégrer certains critères (sur l'emploi et l'investissement, notamment).

A plusieurs reprises, Jean-Ludovic Silicani, président de l'Arcep, a réfuté les accusations selon lesquelles les décisions de l'Autorité sont trop en faveur des consommateurs et indiquait n'avoir "aucun remords" d'avoir favorisé la baisse des prix dans le secteur.

Cela n'empêche pas qu'Arnaud Montebourg reste bien décidé à faire réviser le fonctionnement de l'Arcep :"par excès d'amour du consommateur, on risque de détruire tout simplement les producteurs. Il faut justement pouvoir réconcilier les intérêts de court terme des consommateurs avec ceux de plus long terme des producteurs. A terme, il s'agit bien de renforcer la solidité du secteur."

Et pour y parvenir, l'Etat doit avoir son mot à dire, plaide le ministre, ce qui signifie réduire le pouvoir de décision de l'Arcep, tout en lui en rendant en compensation un pouvoir de sanction vis à vis des opérateurs mobiles, notamment sur leur stratégie d'investissement.

Arnaud Montebourg défend cet interventionnisme par la légitimité démocratique de l'Etat qui aurait donc plus de poids que l'indépendance des autorités.

Le ministre considère toujours que l'Arcep a trop favorisé l'arrivée de Free Mobile, lui permettant de s'imposer immédiatement sur le marché au lieu d'une arrivée progressive plus en phase avec son obligation de bâtir son propre réseau mobile sur plusieurs années. Mais le ministre s'en est également pris à l'Autorité de la Concurrence qui serait un peu trop rigide face aux tentatives d'alliance des industriels.

L'accord d'itinérance signé avec Orange est d'ailleurs également dans le viseur et le calendrier de son extinction sera suivi de près. Par ailleurs, Arnaud Montebourg a salué le passage de quatre à trois opérateurs en Allemagne, premier indice d'un changement d'état d'esprit qui pourrait ne plus voir le marché à quatre opérateurs comme une équation à maintenir à tout prix.

L'accord de mutualisation signé entre SFR et Bouygues Telecom au même moment participe de ce rapprochement prudent entre acteurs télécom mais la fusion proprement dite entre deux opérateurs reste encore tabou, surtout dans le contexte économique actuel.

Pour autant, Arnaud Montebourg a bien conscience qu'il y a trop d'opérateurs mobiles en Europe et que cette densité pourrait servir les intérêts d'acteurs extra-européens, trop heureux de ce nombre qui divise pour mener des acquisitions.

Source : Les Echos