Les procès entre internautes et grandes compagnies du multimédia se multiplient aux Etats-Unis, mais comme le disait souvent Winston Churchill, "en amour comme à la guerre, tout est permis"...

Après avoir joyeusement cafouillé lors d'une procédure à l'encontre d'une jeune mère et de sa fille de treize ans, la RIAA (Recording Industry Association of America)  se prend à nouveau les pieds dans le tapis. Ou plus exactement, elle se fait prendre la main dans le pot de confiture.

En effet, une jeune femme de la région de Seattle, handicapée et mère d'une petite fille de huit ans, s'est vue récemment poursuivie par l'association des "majors" de la musique et du film outre-Atlantique, au motif qu'elle aurait téléchargé et diffusé illégalement des contenus musicaux via un réseau d'échange de fichiers de type "peer-to-peer" (P2P). Or, Mme Andersen --c'est le nom de notre passionaria-- est sûre de son fait: premièrement, elle ne s'est jamais livrée au moindre acte illégal avec son ordinateur, et deuxièmement, elle ne voit pas comment de toute façon la RIAA pourrait en apporter la preuve.

En fait, l'affaire remonte au début de l'été 2004, quand la RIAA, profitant d'une particularité du droit américain, avait intenté une action en justice contre "toute personne se livrant au partage de fichiers musicaux ou vidéo protégés". Cette action, dite "anonyme", est plus ou moins comparable à notre "plainte contre X", si ce n'est que dans le droit français, ladite plainte doit d'abord être instruite, et un ou des coupables présumé(s) identifié(s) avant que l'affaire ne finisse devant un tribunal.

Aux Etats-Unis, la RIAA s'est attachée la collaboration de plusieurs entreprises dans le but de parvenir à ses fins, et de récolter des compensations financières pour le préjudice subi.

Ainsi, l'association américaine a-t-elle donné mandat à la firme MediaSentry de "sonder" les réseaux de P2P, et d'identifier les adresses IP des internautes qui s'y connectent; dans le même temps, MediaSentry s'est permis de s'introduire dans les ordinateurs des personnes ainsi identifiées, afin d'y recueillir des données concernant la nature des fichiers téléchargés, s'autorisant même dans certains cas à les rendre illisibles.

Une autre société mandatée par la RIAA, Settlement Support Center, a été quant à elle chargée de faire pression sur les internautes en question, les enjoignant à verser de fortes sommes d'argent en échange de l'abandon des poursuites judiciaires à leur encontre. Nombre d'internautes, effrayés par la perspective de procès ruineux contre des adversaires aussi déterminés et puissants, ont obtempéré sans opposer de résistance.

Tanya Andersen, 42 ans, n'est pas de ceux-là. De plus, et contrairement à celles et ceux qui, se sachant ou se croyant coupables d'actes délictueux, avaientt préféré transiger, Mme Andersen sait qu'elle n'a rien fait de mal.

Aussi, lorsqu'elle s'est vue signifier par Settlement Support Center qu'un arragement "amiable" était "fortement conseillé", a-t-elle décidé de porter l'affaire devant les tribunaux à son tour. Pas pour se défendre.

Pour attaquer.

Mme Andersen estime en effet que ce sont les sociétés mandataires de la RIAA qui se sont livrées à des actes défendus. Et elle entend le leur faire payer. Elle a donc porté plainte pour des motifs aussi graves que "violation des lois dites RICO (Racketeer Influenced and Corrupt Organization) de lutte contre le racket et la corruption, violation de la vie privée, extorsion, abus de confiance, abus de pouvoir, intrusion par des voies électroniques, violation de la loi contre le piratage informatique, procédure abusive, et pratiques commerciales doûteuses"!

Tanya Andersen s'appuie sur le fait que, si le procès auquel elle est mélée (à tort, selon elle) a été intenté à la mi-2004, elle n'en a été notifiée que le 2 février 2005, l'empêchant de se défendre efficacement tant la procédure était avancée au moment de la notification. Qui plus est, elle a appris les agissements de la société MediaSentry, qui s'était visiblement introduite sur son PC sans son accord, et y avait recueilli des informations personnelles à son insu.

Mme Andersen et ses avocats assimilent les actes de la RIAA et de ses "partenaires" à du racket et de l'extorsion, et veulent faire valoir leurs droits en réclamant la tenue d'un procès public, devant un jury, ce qui est possible aux Etats-Unis pour les affaires civiles, même si certains chefs d'inculpation mentionnés plus haut sont du ressort d'un tribunal correctionnel.

Le plus grave dans cette affaire, c'est finalement que les mandataires de la RIAA se sont semble-t-il livrés à de nombreuses opérations de "faux et usage de faux", allant jusqu'à falsifier des données informatiques pour faire accuser Mme Andersen.

Et combien d'autres avec elle...'


Source : Slashdot