Le décret anti-OPA paru cette semaine au Journal Officiel et qui étend le pouvoir de blocage des rachats de sociétés françaises par des groupes étrangers par le gouvernement à de nouveaux secteurs économiques n'est pas exactement du goût de la Commission européenne.

Celle-ci a mis en garde Paris contre ce qui ressemble plus à un outil protectionniste qu'à la défense légitime des fleurons industriels nationaux. Pour Michel Barnier, commissaire chargé au marché intérieur : "l'objectif de protéger les intérêts essentiels stratégiques dans chaque Etat membre est essentiel dès qu'il s'agit de sécurité ou d'ordre public. C'est clairement prévu dans le traité. Mais nous devons vérifier si  [cet objectif] est appliqué de manière proportionné, sinon cela deviendrait du protectionnisme".

Le "patriotisme économique" revendiqué par le ministre de l'Economie Arnaud Montebourg pour vanter les mérites de ce décret saura-t-il convaincre Bruxelles de sa pertinence ? "Une bonne protection, c'est l'investissement, pas le protectionnisme", rétorque Michel Barnier.

Arnaud Montebourg revendique de son côté la "reconquête de notre puissance" avec un dispositif étendu de protection contre les appétits étrangers dans de nouveaux secteurs comme l'énergie, l'eau, les transports ou les télécommunications, ce qui intervient juste au moment de la négociation tendue autour d'Alstom et de la consolidation du marché télécom qui pourrait attirer des acteurs étrangers.

"Nous pouvons désormais bloquer des cessions, exiger des contreparties. C'est un réarmement fondamental de la puissance publique", indique-t-il dans un entretien au Monde. Toute la subtilité de ce dispositif reposera sur cette notion de réaction proportionnée et les critères justifiant son recours sont bien ce qui inquiète la Commission européenne quand on se veut rassurant du côté du gouvernement : "cela ne veut pas dire qu'il est interdit de s'installer en France", indique-t-on au Ministère de l'Economie.

Source : Le Figaro