Au jeu des déclarations qui piquent, la commissaire européenne Neelie Kroes n'est pas la plus maladroite, d'autant plus qu'en face les opérateurs ne manquent pas non plus de répondant. Avec toujours en tête l'émergence d'un marché télécom unique européen, elle veut faire tomber les barrières du surcoût du roaming et propose un ensemble de mesures moins radicales que ce qui avait été envisagé initialement mais toujours dans l'optique d'aligner les coûts du roaming sur ceux des communications nationales à partir de 2016.

De leur côté, les opérateurs mobiles crient à l'assassinat face à la disparition de cette manne et alors que le secteur télécom européen n'est pas au mieux de sa forme, avec le risque de voir des acteurs étrangers s'inviter et croquer les opérateurs européens les uns après les autres car affaiblis par un excès de régulations.

Neelie Kroes  Mais Neelie Kroes n'en démord pas : le roaming (ou itinérance) "est quelque chose de dépassé" et les opérateurs européens feraient bien de le reconnaître rapidement car ce n'est pas une fatalité pour eux. Dans un entretien au Monde, elle indique que sans efforts de leur part sur le roaming, les consommateurs préfèrent éteindre leur téléphone à l'étranger pour éviter d'alourdir la facture mobile.

Avec des tarifs attractifs sur l'itinérance, les abonnés consomment plus facilement : "les opérateurs scandinaves qui proposent des prix plus attractifs gagnent de l'argent sur le roaming, car leurs abonnés utilisent leur téléphone lors de leurs déplacements en Europe. C'est une situation gagnant-gagnant."

Tout en rejetant les arguments d'une régulation trop en faveur des consommateurs, elle indique aussi que le grand nombre d'opérateurs en Europe n'est pas si grave, au-delà des ajustements nécessaires, et qu'il y a moyen de faire coexister petits et grands acteurs dans un marché unique moins contraint qu'actuellement, sans tomber dans le modèle US et ses trois ou quatre opérateurs se partageant l'immense majorité des abonnés.

Et si "le cas d'Alcatel-Lucent devrait sonner le réveil pour les responsables politiques européens" de la nécessité du marché télécom unique, pas question cependant de faire du protectionnisme à outrance (comme aux Etats-Unis) et de bloquer les équipementiers chinois (tant pis pour Arnaud Montebourg) :"n'oubliez pas que nos acteurs européens obtiennent des contrats en Chine aussi".

Source : Le Monde