Un Fahrenheit bis ?

Le test que vous pourrez lire ci-dessous est basé sur une session de seize heures de jeu, une session qui nous aura permis de découvrir deux fins différentes. Nous n’allons en aucun cas développer la trame scénaristique afin de vous permettre de vous faire un avis purement technique du jeu et vous éviter de gâcher l’effet de surprise.

Heavy Rain a été développé par le studio français Quantic Dream qui évolue dans le milieu des jeux vidéo à un rythme de sénateur. L’entreprise de création parisienne n’est pas vraiment connue pour être prolifique et enchaîner titre sur titre. En l’espace de onze années, elle n’aura donné naissance qu’à trois jeux d’aventure.

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Mais ces trois jeux ont véritablement contribué à l’évolution du genre. Ils ont été notamment récompensés pour leurs capacités à immerger pleinement le joueur et l’impliquer au travers d’un scénario poignant et d’une mise en scène finement menée. Le dernier titre en date, Fahrenheit, aura juste manqué de réalisme et de finition pour obtenir des critiques encore meilleures.

Heavy Rain emprunte beaucoup à son prédécesseur spirituel que ce soit au niveau des mécanismes de jeu ou encore de la mise en scène. Avec l’essor des nouvelles technologies et le recul, les responsables ont voulu faire fondre plus encore la barrière séparant le jeu vidéo et le cinéma. Au final, Heavy Rain n’est rien d’autre qu’un film interactif.

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L’histoire tourne autour du tueur aux origamis, un tueur en série particulièrement vicieux. Il ne s’en prend en effet qu’à des garçons âgés entre huit et dix ans, des enfants qu’il noie dans de l’eau de pluie. Nos quatre héros vont devoir tout faire pour coincer ce célèbre tueur et pouvoir espérer sauver une nouvelle victime d’une noyade certaine, une véritable course contre la montre.

Cette enquête, elle s’effectuera au travers de quatre perspectives, quatre héros tous aussi déterminés les uns que les autres. Il s’agit d’Ethan Mars, architecte et père de l'enfant porté disparu, Madison Paige, une journaliste, Norman Jayden, un profiler du FBI, et pour finir Scott Shelby, un détective privé. C’est malheureusement tout ce que l’on pourra vous dévoiler sur la trame scénaristique d’Heavy Rain.

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Une expérience personelle

Cette dernière est essentielle, elle représente à vrai dire le cœur du jeu et vous la dévoiler mettrait grandement en péril votre expérience de jeu. Il s’agit d’une expérience qu’il faudra indubitablement vivre seul, dans les meilleures conditions possibles. Heavy Rain n’a pour objectif que de nous transmettre une histoire poignante, la présence d’une tierce personne à vos côtés modifierait clairement votre perception du jeu.

A deux, il est certainement plus difficile d’apprécier le titre et surtout de vous approprier le scénario. Effectivement, le jeu n’adopte pas des contrôles de jeu inhérents aux point-and-click ou encore aux classiques jeux d’aventure. Il préfère se reposer sur un ensemble d’actions contextuelles et de QTE sur lesquelles le joueur aura une influence directe.

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Celui-ci  est donc placé dans le rôle d’acteur et non de spectateur. Ces interactions s’effectuent de trois façons possibles, via les sticks analogiques, les boutons de la manette ou encore le Sixaxis. Grâce à ces trois procédés, il est possible d’ouvrir des tiroirs, de diriger des discussions ou encore de plonger sur le côté.

Mais ces interactions impliquent un minimum de mimétisme par rapport aux mouvements de la vraie vie ce qui rend l’aventure plus engageante. Le jeu nous apprend à maitriser les sticks analogiques, à  les voir sous un jour nouveau. On regrettera seulement que l’emploi des boutons de la manette fasse preuve d’une mauvaise lisibilité.

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Il existe quatre façons d’appuyer sur un bouton : l’appui simple, l’appui maintenu, l’appui répété et l’appui progressif. Le jeu possède d’explicites indices nous permettant de faire la différence entre ces appuis. Mais dans le feu de l’action et sous le stress, il n’est pas rare de s’y reprendre plusieurs fois. On aurait aimé avoir des codes couleur ou des indications plus visibles.

Durant les QTE, le facteur temps s’ajoute à ces actions qui doivent alors être réalisées dans un temps imparti. Ce temps varie en fonction de la difficulté choisie, pour notre part nous avons opté pour la difficulté maximale. S’il vous arrive d’échouer à l’une de ces actions, vous ne serez en aucun cas pénalisé, en revanche votre personnage le sera.

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Un concept plus ouvert

Le jeu se différencie de Fahrenheit par  son absence totale de « game over ». L’échec à ces QTE est autorisé et mène à des chemins scénaristiques plus ou moins différents. Cela dépend entièrement de vos réflexes et de vos choix. Mais oui, il est tout à fait possible de découvrir des dialogues voire des chapitres supplémentaires.

Pour se mouvoir dans l’espace, seulement deux doigts sont nécessaires.  Le premier est à placer sur la gâchette R2 pour avancer, le second sur le stick analogique gauche pour orienter la direction du héros. Il est donc aisé d’explorer les environnements qui malheureusement n’impliqueront que de la marche à pied. Nos héros ne pourront courir qu’à des moments précis du jeu.

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Les déplacements sont en théorie simples à effectuer. En pratique, l’affaire se corse parfois à cause principalement des changements de caméras. Ces transitions peuvent donner lieu à de véritables aberrations. Fort heureusement, il s’agit d’un jeu au rythme posé qui ne requiert  pas un contrôle maximal sur le héros.

Cette exploration se fera selon des points de vue prédéfinis. Heureusement, chaque lieu bénéficie de deux vues différentes nous permettant avoir une vue d’ensemble et de repérer plus facilement les éléments essentiels à notre enquête. Celle-ci débute réellement après plusieurs heures de jeu, elles poseront en fait les bases du scénario.

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Une fois passé ce délai, le jeu se montre autrement plus addictif. Il devient par conséquent plus facile de rester scotché des heures devant sa console. Car bien que scriptée, l’aventure a le bon goût de s’adapter à nos choix personnels et de présenter très souvent des alternatives.  Elle suit une progression logique mais manque parfois de repères et de fluidité.

Le jeu est une pure merveille au niveau de sa mise en scène quasi-hollywoodienne. Les dialogues plus vrais que natures et les jeux de caméras contribuent grandement à l’immersion du joueur pouvant ressentir la détresse des personnages et l’ambiance oppressante du jeu. Dans l’ensemble, Heavy Rain a hérité d’un casting de qualité.

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Conclusion

Heavy Rain - Jaquette Nos quatre héros sont sympathiques, attachants et possèdent tous des forces et faiblesses. Ce sont des humains comme vous et moi, des personnages sur qui il est facile de s’identifier. Et c’est là la grande force du jeu que de nous proposer des héros de tous les jours. Seuls quelques personnages ont été lourdement caricaturés.

Heavy Rain sait aussi aborder des thèmes contemporains qui pourront interpeller les adultes comme la recomposition familiale, les drames familiaux, la maltraitance, la dépendance et l’abandon des personnes âgées ou encore l’addiction aux produits stupéfiants. Un puissant mélange thématique qui donne matière à réfléchir.

Annoncé comme une tuerie graphique, Heavy Rain a su répondre présent et mettre sur pieds des environnements et effets spéciaux de premier rang, mention spéciale à la pluie. Les artistes sont aussi parvenus à nous dégoter des lieux et des visages véritablement impressionnants pour un jeu next-gen. On notera cependant la présence d’une poignée de textures moyennes à souhait, d’objets parfois bien rigides ou encore de micro saccades.

Au niveau des animations, le jeu n’a pas le naturel d’un Uncharted 2. Mais il possède généralement des animations bien faites. Seul un faible nombre de ces animations sont robotiques, notamment celles qui concernent les personnages non essentiels. La bande originale est proprement composée et parfaitement adaptée au contexte.

En revanche, la bonne vingtaine de thèmes proposée a tendance à être employée à tord et a travers. Une surexploitation qui diminue l’impact de cette bande originale. Les doublages français et les bruitages sont eux de grande qualité et parfaitement employés. Mais ce tableau n’est pas parfait, il est aussi entaché par des problèmes d’IA qui n’hésite littéralement pas à traverser les héros ou encore une synchronisation labiale mal adaptée aux voix françaises.

Sans ses soucis techniques et son scénario parfois haché, Heavy Rain aurait pu être un jeu parfait. Au lieu de cela, il devra se contenter d’être un excellent jeu d’aventure ou plutôt une excellente expérience interactive à ne manquer sous aucun prétexte. Si vous accordez une grande importance à la mise en scène d’un jeu, à son scénario ainsi qu’à son ambiance, sachez qu’Heavy Rain saura pleinement vous combler. En revanche, amateurs d’action passez allégrement votre chemin.

+ Les plus

  • Scénario prenant
  • Personnages attachants
  • Interactions immersives
  • Absence de Game Over
  • Visuellement beau
  • Thématiques matures

- Les moins

  • Contrôles parfois hasardeux
  • Synchronisation labiale mal adaptée
  • Quelques animations robotiques
  • Surexploitation des thèmes sonores
  • Transitions peu fluides