Les ondes électromagnétiques

La multiplication des réseaux sans fil et l'essor de la téléphonie mobile ont plongé notre quotidien dans un flux de rayonnements électromagnétiques continu. Non pas que ce soit une nouveauté, puisqu'il existe depuis la nuit des temps des sources de rayonnement naturelles, mais leur profusion et la puissance de leur émission soulèvent certaines questions de santé publique.

Les téléphones portables sont particulièrement visés du fait de leur mode d'utilisation. La nécessité de plaquer la source d'émission ( le mobile ) contre le crâne ou à proximité d'organes sensibles ( coeur, organes génitaux ) peut légitiment amener à s'interroger sur leur nocivité et sur l'existence de sujets à risque.


Des rayonnements non ionisants
Le mode de communication des téléphones portables repose sur l'échange d'ondes électromagnétiques entre une station de base et un terminal mobile au moyen d'antennes. Ces ondes radio se propagent à la vitesse de la lumière et se caractérisent ( entre autres ) par leur fréquence, mesurée en Hertz.

Plus cette fréquence est élevée et plus les ondes sont énergétiques, jusqu'à devenir ionisantes, c'est à dire transporter suffisamment d'énergie pour casser des atomes, dénaturant les molécules dont ils constituent l'assemblage.

propagation d\'ondes

onde électromagnétique (credit : nantes-wireless.org)

Dans le cadre des télécommunications, ce sont des ondes radioélectriques qui sont utilisées, c'est à dire dont la fréquence est inférieure à 3 GHz ( 3 milliards d'oscillations par seconde ). Dans le cas du téléphone portable en Europe, il s'agit des bandes GSM 900, 1800 et 1900 MHz, ainsi que des bandes 1900 et 2100 MHz pour la 3G. La connectivité WiFi opère quant à elle dans la bande 2400 MHz. Les ondes radioélectriques sont non ionisantes et n'ont pas en théorie l'énergie suffisante pour arracher des électrons aux atomes.


Un effet avéré : l'effet thermique
avion téléphone Cependant, d'autres effets peuvent être observés, selon différents facteurs, comme la durée de l'exposition, la distance de la source, les indices de pénétration dans divers milieux, etc. L'effet généralement constaté sur les organismes biologiques lors d'une exposition prolongée aux rayonnements radioélectrique consiste en l'échauffement des tissus, se concrétisant par l'augmentation de la température corporelle.

Cet effet intervient de façon négligeable dans la sensation de chaleur ressentie au niveau de l'oreille au bout d'une dizaine de minutes de communication. Dans ce cas, les causes sont à relier à l'échauffement de la batterie du mobile et l'effet de faible circulation de l'air dans l'espace confiné formé entre l'oreille et la main tenant le combiné.

L'effet thermique des rayonnements électromagnétiques peut toutefois se révéler dangereux s'il est associé à d'autres sources de chaleur de sorte que le système de régulation du corps humain ne puisse plus assurer sa fonction. Certaines études évoquent l'existence possible d'autres effets biologiques ( affaiblissement du système immunitaire et des barrières naturelles de l'organisme ) mais ces effets non-thermiques ne sont pas retenus dans les consensus.

DAS et téléphones portables

Les téléphones portables, du fait de leur mode de communication avec les stations de base des réseaux cellulaires, sont des sources d'émissions d'ondes électromagnétiques. Leur puissance d'émission est caractérisée par une mesure, le DAS ( Débit d'Absorption Spécifique ou SAR en anglais ) dont la mention doit figurer obligatoirement dans la notice du fabricant.

CENELEC logo Exprimé en Watt / Kg, elle représente la puissance absorbée par Kilogramme de tissus et représente généralement une DAS locale correspondant à l'absorption d'énergie au niveau de la tête. Elle est mesurée par rapport à un " fantôme ", qui consiste en une tête moulée en résine et contenant un liquide aux propriétés d'absorption proches de celle d'une tête humaine. Une sonde plongée dans ce liquide permet de recueillir des mesures sur le mobile testé à émission maximale et dans diverses positions, selon un protocole validé par le CENELEC ( Comité Européen de la Normalisation Electrotechnique ).


Valeurs limites du DAS
ICNIRP logo Le consensus adopté par l'ICNIRP ( International Commission on Non-Ionizing Radiation Protection )  évalue à 4 Watts / Kg le seuil de puissance à partir duquel des effets nocifs peuvent apparaître. La législation internationale a établi que les téléphones portables doivent impérativement avoir un DAS inférieur à 2 Watts / Kg pour pouvoir être commercialisés.

Dans le cas particulier du WiFi, la puissance d'émission est volontairement bridée à 100 mW pour un usage commercial grand public. Le DAS émis par les appareils WiFi est généralement de l'ordre de 0,2 Watt / Kg. Quant au Bluetooth, avec une puissance d'émission limitée de 1 à 2,5 mW ( Classe 2 ou 3 ), l'intensité de son rayonnement est négligeable par rapport à celui d'un téléphone portable.


Cas des antennes-relais
Bien que les sources d'émission électromagnétiques produisent des effets cumulatifs, les nombreux paramètres en jeu, à commencer par la distance par rapport à la source et les puissances d'émission, dont beaucoup sont adaptatives ( juxtaposition d'états de veille à faible puissance avec des périodes courtes de forte intensité ), rendent peu probables la possibilité d'une accumulation de rayonnements telle qu'elle soit dangereuse pour la santé, dans un cadre quotidien.

ANFR logo Pour ce qui est des antennes-relais, leur puissance d'émission est vérifiée par l' ANFR ( Agence Nationale des Fréquences ) qui réalise 2.000 mesures chaque année et est tenue de de mettre à jour une carte ( Cartoradio ) reportant les stations de base et les mesures effectuées.

Les valeurs généralement constatées sont plusieurs milliers de fois inférieures au maximum autorisé. Comme l'activité radio des stations de base est variable selon la quantité de communications à gérer, les données sont fournies dans les conditions d'émission maximales.

Effets sur la santé

Si les téléphones portables sont des sources d'émission d'ondes électromagnétiques, les puissances sont largement inférieures aux seuils jugés dangereux. Toutefois, leur proximité avec le corps humain au quotidien, et notamment avec la boîte crânienne, amène à s'interroger sur les conséquences éventuelles d'une telle proximité.

On a vu que les ondes électromagnétiques ne génèrent, à priori et en l'état actuel des connaissances, que des effets thermiques sur le corps humain. A court terme, il semble donc qu'aucun effet indésirable ne soit à craindre, hormis peut-être pour les personnes dites " radiosensibles ", qui peuvent présenter des symptômes généraux ( céphalées, état d'énervement ou au contraire d'apathie, maux divers ) même si le lien entre ces troubles et les champs électromagnétiques reste difficile à évaluer et une origine essentiellement psychologique est parfois avancée.


Et les effets à long terme ?
Fant Cependant, une autre question intéresse le monde scientifique depuis plusieurs années : l'effet d'une exposition de faible intensité mais prolongée dans le temps de rayonnements électromagnétiques sur les organismes biologiques. Autrement dit, un rayonnement faible, en dessous du seuil jugé nocif, peut-il quand même engendrer un effet sur l'organisme au bout de plusieurs dizaines d'années et augmenter par exemple le risque de développer une tumeur ?

Sur ces points, plusieurs études ont été menées, et d'autres sont à venir ( l'étude Interphone, notamment, à paraître en 2008 ), mais elles n'ont jusqu'à présent pas permis de trancher de façon significative, d'une part par manque de recul, le téléphone portable n'existant que depuis 20 ans, et d'autre part parce qu'il est très difficile d'isoler une cause spécifique dans un environnement quotidien sur ce type d'effet. Le mode de vie, la pollution et l'environnement sont autant de facteurs entrant en jeu  et se combinant dans la prise en compte du risque.

D'où l'idée de chercher une corrélation entre l'usage du téléphone portable et l'augmentation du risque de développer une tumeur bénigne du nerf auditif, le neurinome de l'acoustique, du côté du crâne le plus exposé, par des études statistiques rétrospectives.


Une attitude de neutralité vigilante
OMS logo Le consensus, en l'état actuel des connaissances, et malgré les critiques et contre-études demandant sa révision, veut que les téléphones portables ne soient pas considérés comme nocifs à court ou long terme, ce qui n'empêche pas la vigilance. Une attitude de neutralité est préconisée par l' OMS ( Organisation Mondiale de la Santé ) et prônée par le Ministère français de la Santé.

Les autorités ne prennent donc pas position sur la question des émissions électromagnétiques des téléphones portables et du WiFi ( selon l'idée que même un rayonnement de très faible intensité pourrait avoir un effet ) sur la santé, au grand dam des associations qui militent pour un encadrement plus étroit au nom du principe de précaution.

On note que ce même principe de précaution a incité des parents d'élèves à demander l'abandon de réseaux WiFi dans certaines écoles, tandis que certaines universités nord-américaines reviennent aux réseaux filaires, se garantissant contre l'éventualité de plaintes collectives si un jour une nocivité était mise en évidence. En France, plusieurs bibliothèques parisiennes ont coupé leur réseau sans fil à la demande de certains employés.

Malgré la neutralité affichée, une attitude de prudence reste recommandée pour les sujets à risque et notamment les enfants, dont le système nerveux en pleine croissance serait plus fragile, les femmes enceintes ( même si l'on manque de données à ce sujet ) et les personnes porteuses de systèmes médicaux implantables.

Des recommandations

Bien que les rayonnements électromagnétiques des téléphones portables ne soient pas considérés comme nocifs ( jusqu'à preuve du contraire ), des recommandations sont émises par les autorités sanitaires en vue de minimiser les durées d'exposition.

Tout d'abord, l'usage d'un kit oreillette filaire ou sans fil permet d'éloigner la boîte crânienne de la source de rayonnement. Bien qu'une oreillette Bluetooth soit elle-même source d'ondes électromagnétiques, sa puissance d'émission est plusieurs centaines de fois plus faible que celle d'un téléphone portable.


Des règles de bon sens
D'autre part, il est recommandé de faire un usage modéré du téléphone portable et de préférer les appels courts. On évitera aussi de passer un appel si la qualité du signal est faible, le téléphone émettant à plus forte puissance pour compenser dans les espaces pouvant faire office de cage de Faraday, conduisant à une réverbération des signaux.

La question de l'usage du mobile chez les enfants reste un sujet très sensible, notamment parce que l'on manque d'informations à ce sujet. Il est habituellement considéré que l'organisme de l'enfant ( et de l'adolescent ), en pleine maturation, est plus sensible aux rayonnements et qu'il convient donc de limiter l'usage du mobile.

La vente de téléphones pour enfants provoque régulièrement la colère des associations et, si la vente n'en est pas interdite en France, leur usage est plutôt déconseillé, à charge pour les parents d'adopter une attitude responsable.


Prudence pour les personnes à risque
De même, les données concernant les femmes enceintes et l'éventualité d'une sensibilité accrue des foetus sont insuffisantes pour établir une position claire. Si l'utilisation du téléphone n'est pas déconseillée dans ces cas, on évitera de porter le téléphone à la ceinture, de même que chez les adolescents, pour limiter l'exposition des organes génitaux.

Les personnes porteuses de stimulateurs cardiaques sont invitées à ne pas manipuler ou porter de téléphone à proximité du dispositif. Les études des effets des mobiles sur les dispositifs médicaux ne révèlent pas spécifiquement d'interférences mais la nature et le rôle de ces appareillages invitent à une prudence particulière.

Enfin, il arrive régulièrement des dispositifs sur le marché annonçant qu'ils sont capables de neutraliser les ondes nocives, souvent sous forme de patch à coller sur le mobile. Leur efficacité est au mieux infondée, au pire génératrice d'un surplus de rayonnements, le téléphone devant émettre à plus forte puissance pour pallier les effets de cet obstacle.