La semaine dernière, lors d'un rassemblement avec les actionnaires du groupe, Martin Bouygues affichait une détermination sans faille, se disant confiant sur l'avenir de Bouygues Télécom et de la capacité du groupe à faire front sur le marché des télécoms, et ce, malgré une position délicate suite à l'échec du rachat de l'opérateur SFR.

martin bouygues  Ce début de semaine, la situation a bien changé, et les syndicats annoncent que Bouygues Télécom préparerait un plan social, une restructuration impliquant le licenciement d'environ 2000 emplois à court terme. En coulisses, la situation se veut plus complexe et calculée qu'il n'y parait.

Pour des proches de l'équipe dirigeante, il y a eu un " après Free ", il y aura également un " après SFR" : " Certains services comme le markéting et l'informatique pourraient perdre la moitié à 70% de leurs collaborateurs. ". Bouygues aurait beaucoup misé sur le rachat de SFR pour absorber le second choc lié à l'arrivée de Free Mobile sur le secteur, sans possibilité de rachat, c'est donc Bouygues Telecom qui fera l'effort et réalisera des économies sous forme de couts salariaux.

Les salariés redoutaient déjà cette hypothèse au moment des négociations engagées entre Bouygues Telecom et Vivendi, croisant alors les doigts pour que SFR ne finisse pas aux mains de Numéricâble. Désormais, la seule solution possible pour Bouygues est de tailler dans les offres commerciales et donc dans les effectifs du markéting tout en allégeant son système informatique.

La Tribune ajoute à cela le spectre du chantage à l'emploi, une technique largement employée dans le secteur. Un analyste évoque ainsi : " Ils font fuiter un gros chiffre de licenciements au début, agitent le chiffon rouge et diminuent ensuite, pour permettre au gouvernement de dire qu'il a fait plier l'industriel. C'est ce qu'a fait Alcatel-Lucent." " En pleine affaire Alstom, cela s'apparente beaucoup à du chantage à l'emploi" indique le gouvernement : " Dès juin 2012, Martin Bouygues avait prévenu Bercy que si l'on ne réglait pas le problème de Free, il y aurait un problème avec Alstom".

Pour Bouygues, le plan ne serait que le prolongement de celui initié en 2012 et qui a permis jusqu'ici de dégager 600 millions d'euros au cumul sur l'activité mobile lors des deux dernières années. À l'époque de l'annonce, Martin Bouygues indiquait alors que les charges de personnel ne représentaient que 12% de la structure de couts." De quoi n'y plus rien comprendre, à moins d'envisager une autre solution comme le suggère Bercy " Il y a d'autres solutions que des licenciements et plein de candidats prêts à racheter Bouygues Telecom".

On pourrait ainsi penser que la manoeuvre vise surtout à préparer le terrain d'une revente. Pour les analystes d'Oddo " Les investisseurs pourraient voir d'un bon oeil la volonté de dégager 120 à 160 millions d'euros d'économies de couts, en partant de l'hypothèse de près de 2000 postes supprimés.". Selon eux, il s'agirait " d'habiller un peu mieux la mariée pour faciliter une cession", avec en tête de liste Free Mobile comme repreneur.

C'est d'ailleurs ce que préconise Arnaud Montebourg qui s'est exprimé en faveur d'un rapprochement entre Bouygues Telecom et un autre opérateur, avec toutefois dans l'objectif un maintien des emplois en place. Sur ce point, Bouygues Télécom pourrait tenter de négocier avec le gouvernement en promettant des garanties sur l'emploi en échange d'un processus de cession facilité vers un opérateur concurrent.

Pour l'instant, sans officialisation du plan de restructuration avancé par les syndicats, il est difficile de démêler les objectifs et le plan d'action de Bouygues Télécom. L'incompréhension est toutefois de mise chez les salariés qui ont beaucoup de mal à envisager un nouveau plan social après la débauche de milliards avancés par la société pour le rachat de SFR ( plus de 15 milliards d'euros avaient alors été proposés en cash à Vivendi lors de la dernière offre).

Source : La Tribune