L'association des éditeurs musicaux des Etats-Unis ne parvient pas toujours à régler à l'amiable les différends qui l'opposent aux internautes. Cette fois, par exemple, elle va devoir plaider.

Retenez ce chiffre, qui donne un peu le vertige, tout de même: 14.800. C'est le nombre de plaintes déposées par la RIAA (Recording Industry Association of America) au cours des deux dernières années devant la justice des Etats-Unis à l'encontre d'internautes qui avaient eu l'audace et l'impudence de télécharger des fichiers musicaux par l'intermédiaire de réseaux de type P2P (Peer-to-peer).

Dans la plupart des cas, et grâce au recours à des méthodes à peine avouables, la RIAA et son pendant pour le cinéma, la MPAA, obtenait un règlement "amiable" du différend, le plus souvent en empochant de substantiels dédommagements. Cette fois, il pourrait en aller autrement, car une mère de cinq enfants de l'état de New-York, Patricia Santangelo, a refusé de plier devant les intimidations répétées de la RIAA, et a choisi d'aller au procès. Mme Santangelo maintient qu'elle ne pratique pas le téléchargement pirate, dont elle ignore même, dit-elle, le fonctionnement. La RIAA, convaincue du contraire, explique longuement, dans ce jargon si particulier que les mauvaises langues surnomment outre-Atlantique le "Legalese", que la mère de famille a par le passé utilisé à plusieurs reprises des logiciels de partage de fichiers, et qu'elle continue de le faire.

Le –rapide—inventaire à la Prévert des téléchargements de Mme Santangelo tient en six petites lignes:

"Happy" (Lit)

"Nowhere fast" (Incubus)

"Semi-charmed life" (Third Eye Blind)

"Can't Help Falling In Love" (UB40)

"Whatever" (Godsmack)

"Breakout" (Foo Fighters)

L'accusée et ses avocats ont demandé, sans succès, à ce que la plainte de la RIAA soit rejetée, ce qui signifie qu'une audience préliminaire aura bientôt lieu. La RIAA a auparavant, comme à son habitude, généreusement offert à Mme Santangelo d'oublier sa plainte en échange de la modique somme de 3.000 à 4.000 dollars. Il paraîtrait qu'à ce jour, quelque 3.000 internautes auraient préféré transiger plutôt que d'aller au procès. Pas cette fois…

Mme Santangelo argue de son côté que c'est un ami d'un de ses enfants qui aurait téléchargé les chansons sus-mentionnées depuis son ordinateur, et à son insu. Elle ne s'estime dès lors pas responsable de ce qui s'est passé, et conteste la manière dont la RIAA est parvenue à remonter jusqu'à elle, ce à quoi l'association à but très lucratif de l'industrie du disque outre-Atlantique répond en assurant que ses méthodes sont totalement fiables.

Tout le monde a pourtant en mémoire l'affaire opposant cette même RIAA à Sarah Seabury, en 2003, à l'occasion de laquelle on avait découvert qu'une "mamie" de soixante ans pouvait aussi être une fan de Gangsta Rap… Au bout du compte, et même si le ridicule ne tue plus, la RIAA avait fini par retirer sa plainte, mais malgré une—longue, cette fois—liste d'affaires du même tonneau (l'une d'elle impliquait même une personne décédée au moment des faits…), elle emploie toujours des méthodes identiques.

Les deux parties attendent, cela va de soi, le verdict du juge en charge de l'affaire avec impatience, car quelle que soit la décision du magistrat, elle aura au moins l'avantage de clarifier une situation pour le moins confuse, et dont nos dirigeants hexagonaux semblent vouloir s'inspirer…



Source : Slashdot