La décision récente du Commonwealth du Massachusetts de faire basculer ses administrations vers les logiciels libres ne fait pas que des heureux à l'autre bout du pays.

Entre Boston, capitale du Massachusetts, et Redmond, Washington, capitale mondiale du logiciel propriétaire, il y a environ 3.500 kilomètres de distance, mais le fossé semble se creuser de jour en jour.

Le petit état de Nouvelle-Angleterre a récemment choisi de rallier le support à l'OpenDocument, et à l'autre bout du pays, au bord de l'Océan Pacifique, la nouvelle a fait grincer quelques dents.

Du coup, un célèbre éditeur de logiciels basé près de Seattle s'est lancé dans une campagne qui s'apparente de près à du dénigrement, allant même jusqu'à s'adjoindre les services d'un journaliste qui, sous couvert d'écrire un article "impartial", s'est livré à un véritable réquisitoire contre les autorités du Massachusetts, les traitant en quelques lignes d'irresponsables.

De la même manière que les échanges entre le Président des Etats-Unis et ses militaires stationnés en Irak sont tout sauf spontanés lorsqu'ils passent à la télévision, l'article de James Prendergast sur FoxNews.com a rapidement mis le feu aux poudres.

Le journaliste y laissait entendre que le passage aux logiciels libres coûterait une fortune aux contribuables de ce petit état, et que le fait de se détourner des entreprises commerciales nuirait à la compétitivité de ces dernières, les conduisant à terme à la faillite.

Prendergast mettait en doute l'interopérabilité de ces logiciels avec ceux, plus répandus, en provenance de ce joli petit port de pêche des environs de Seattle, et citait même des passages d'autres articles qualifiant l'OpenDocument de "standard de deuxième zone", et son essor de "nivellement par le bas", au détriment de "la faculté d'innovation qui caractérise les éditeurs de logiciels propriétaires".

Le "papier" de James Prendergast est sans doute allé un peu trop loin, car FoxNews.com publie aujourd'hui les --nombreuses-- réactions de lecteurs qui, visiblement, ne partagent pas tout à fait les vues du journaliste. A tel point que le site s'est fendu d'un petit mot d'excuse, louant la grande connaissance du sujet dont ont fait preuve certains internautes lorsqu'ils ont donné leur opinion.

Et de mentionner, en passant, que James Prendergast travaille pour une association financée en grande partie par... Microsoft!

Une traduction littérale de la conclusion de ce nouvel article est sans appel:

"L'éditorial signé par James Prendergast et publié par FoxNews.com le 28 septembre dernier faisait bien état du fait que l'auteur siégeait à la tête de l'association Americans for Technology Leadership (ATL), mais omettait d'indiquer que Microsoft était un des membres fondateurs de cette association. ATL est une coalition d'entreprises, de professionnels et autres organisations liés au domaine des technologies, qui milite pour un diminution de l'interventionisme étatique dans ce domaine, et pour une plus grande compétition entre les entreprises. Parmi les membres fondateurs ou siégeant au sein de cette organisation, on trouve, outre Microsoft, Staple Inc, CompUSA, Citizens Against Government Waste, CompTIA, Small Business Survival Committee, Clarity Consulting, Cityscape Filmworks, Association for Competitive Technology, et 60Plus Association. Les liens unissant Mr Prendergast à Microsoft aurait dû être mentionnés plus clairement".

Le temps et la place nous manquent ici pour donner aux réactions des internautes l'écho qu'elles méritent, mais les anglophones parmi vous y trouveront certainement quelques passages savoureux.

Incidemment, FoxNews.com, bien entendu intimement lié à la chaîne de télévision Fox News Network, et plusieurs des entreprises susmentionnées, ont apporté leur soutien à la candidature de George W. Bush lors de sa campagne de réelection, à l'automne 2004.

Et le Massachusetts a en majorité voté Démocrate*. Qui plus est, le petit état, dont John Kerry, candidat malheureux à la Maison Blanche la même année, est Sénateur, était à la pointe de la protestation contre l'intervention militaire en Irak, en 2003. Mais tout ceci n'est certainement qu'une coïncidence...



* Rappelons qu'aux Etats-Unis, le Président n'est pas élu directement par le vote populaire, mais par le biais de grands électeurs, dont le nombre est proportionnel à la population de chaque état (la Californie, état le plus peuplé, compte plus de grands électeurs que le Massachusetts, par exemple); le parti (Républicain ou Démocrate) arrivé en tête dans un état raffle l'ensemble des voix des grands électeurs.


Source : Slashdot