Le constructeur aéronautique Boeing a marqué la fin d'une ère en livrant à l'U.S. Air Force son ultime QF-16. Cet avion, surnommé F-16 Zombie, n'est autre qu'un ancien F-16 Fighting Falcon réformé, puis ramené à la vie pour servir de cible aérienne à grande échelle (FSAT).
L'exemplaire final, portant le numéro de série 83-1079, a une histoire riche : il a servi pendant 23 ans au sein du 178e escadron de chasse de la Garde Nationale du Dakota du Nord, les « Happy Hooligans », avant d'être entreposé en 2007.
Cette livraison clôture un programme de production lancé en 2010, mais ouvre le chapitre du soutien logistique pour une flotte qui devrait rester opérationnelle au moins jusqu'en 2035.
Du chasseur au plastron : la genèse du QF-16
L'idée de transformer des chasseurs vieillissants en cibles n'est pas nouvelle. Le programme QF-16 a été conçu au milieu des années 2000 pour prendre la relève des QF-4 Phantom II, qui arrivaient en fin de vie et ont été retirés en 2016.
Il fallait fournir aux pilotes une cible réaliste, capable de reproduire les performances et les manœuvres d'un adversaire moderne, comme des accélérations supersoniques et des virages à 9G, sans risquer la vie d'un pilote.
C'est Boeing qui a remporté le contrat de conversion en 2010, une tâche complexe consistant à prélever des F-16 stockés au « Boneyard » de la base de Davis-Monthan en Arizona.
Ces appareils, après une remise en état de vol, ont subi une métamorphose technologique pour pouvoir être pilotés à distance depuis le sol, tout en conservant la possibilité d'accueillir un pilote pour les vols de convoyage.
Une métamorphose technologique complexe
La conversion d'un F-16 en drone QF-16 est un processus qui dure environ six mois. Les éléments de combat comme le radar et le canon sont retirés. L'espace libéré est utilisé pour ajouter du ballast à l'avant et intégrer un système de fumigènes permettant de mieux visualiser l'appareil à distance ou de simuler sa destruction. Le cœur de la modification réside dans l'installation d'un ordinateur de vol automatique (AFCC) et de tout l'équipement nécessaire au pilotage à distance.
Pour garantir la sécurité, un système de destruction en vol (FTS) est intégré. Il s'agit de charges explosives placées dans le fuselage qui peuvent être activées pour détruire l'avion en cas de perte de contrôle totale, assurant qu'il s'écrase dans un périmètre de sécurité défini.
Enfin, des antennes spécifiques sont ajoutées pour le système de pointage (VSS), qui enregistre la trajectoire des missiles tirés et évalue leur probabilité de succès sans qu'un impact direct soit nécessaire.
Un héritage assuré pour la prochaine décennie ?
Les QF-16 sont opérés par le 82e escadron de cibles aériennes, principalement basé à Tyndall en Floride. Leur rôle est essentiel : ils servent de cibles pour des tirs réels de missiles de pointe, des tests indispensables avant toute production à grande échelle.
Bien que considérés comme « consommables », ces appareils ne sont pas systématiquement détruits et peuvent être réutilisés pour de multiples missions.
Avec la livraison de cet ultime appareil, l'armée américaine dispose d'une flotte robuste pour préparer ses pilotes aux conflits de haute intensité.
La fin de la production soulève cependant une question : quel avenir pour ce type de conversion ? Alors que les drones de combat deviennent toujours plus sophistiqués et autonomes, la nécessité de transformer d'anciens chasseurs pourrait bien s'éroder, laissant place à des plateformes nativement conçues pour ce rôle.