C'est une avancée signée par l'UC Santa Barbara et publiée dans la prestigieuse revue Science Robotics. Une équipe de chercheurs, menée par le professeur Yon Visell et le doctorant Max Linnander, a mis au point une surface d'affichage capable de créer des graphiques dynamiques que l'on peut à la fois voir et toucher. Le concept est simple en apparence, mais sa réalisation est une véritable prouesse : transformer la lumière projetée en une sensation physique, un relief tangible sous les doigts.
Comment ça marche exactement ?
Le secret réside dans des pixels dits optotactiles, mesurant à peine quelques millimètres. Chaque pixel contient une minuscule cavité remplie d'air et une fine pellicule de graphite. Lorsqu'un bref rayon de lumière laser frappe cette pellicule, elle absorbe l'énergie et chauffe quasi instantanément.
Cette chaleur fait se dilater l'air emprisonné, ce qui pousse la surface supérieure du pixel vers l'extérieur jusqu'à un millimètre. Le résultat ? Une bosse perceptible au toucher. En balayant la surface à très haute vitesse avec le laser, le système peut activer des milliers de pixels en succession rapide, créant ainsi des formes, des contours et des animations qui semblent continues, aussi bien pour l'œil que pour la main. Le moment du déclic, fin 2022, fut la validation que l'idée pouvait fonctionner.
Qu'est-ce qui rend cette technologie si différente ?
L'ingéniosité de cette approche est sa simplicité radicale. Contrairement aux écrans tactiles classiques, cette technologie ne nécessite aucun câblage interne, aucun circuit électronique intégré à la surface d'affichage. Le laser fournit à la fois l'énergie pour la déformation physique et l'adressage pour savoir quel pixel activer. C'est ce qui la rend si facilement évolutive.
L'équipe a déjà fabriqué des prototypes comptant plus de 1500 pixels adressables indépendamment, un chiffre bien supérieur à celui des autres écrans haptiques expérimentaux. Les tests utilisateurs ont confirmé que les participants pouvaient localiser les pixels avec une précision millimétrique, suivre des objets en mouvement et différencier des motifs complexes uniquement par le toucher.
Une idée si neuve que ça ?
Si la technologie est de pointe, les principes physiques qui la sous-tendent ne sont pas nouveaux. Le professeur Visell établit lui-même un parallèle avec les travaux d'un certain Alexander Graham Bell au 19ème siècle. À l'époque, l'inventeur utilisait la lumière du soleil, modulée par des pales en rotation, pour exciter des ondes sonores dans des tubes à essai remplis d'air. Le principe était le même : convertir de la lumière en action mécanique via la dilatation thermique.
Cette interaction entre l'énergie lumineuse et un matériau absorbant comme le graphite ou le graphène est donc une redécouverte appliquée au monde numérique. Ce qui servait à créer du son hier permet aujourd'hui de créer du relief. Les applications potentielles sont immenses, des écrans de voiture imitant des boutons physiques aux surfaces architecturales interactives.
Foire Aux Questions (FAQ)
Quelles sont les applications concrètes envisagées ?
Les chercheurs évoquent principalement trois domaines : les écrans automobiles de nouvelle génération qui pourraient simuler des boutons physiques pour réduire la distraction au volant, les livres électroniques avec des illustrations tangibles qui prennent vie sous les doigts, et enfin les surfaces architecturales intelligentes pour la réalité mixte.
La sensation au toucher est-elle vraiment précise ?
Oui. Les études menées par l'équipe de l'UC Santa Barbara ont montré que les utilisateurs pouvaient localiser un pixel activé avec une précision de l'ordre du millimètre. Ils étaient également capables de suivre des formes en mouvement et de discriminer des motifs spatiaux et temporels complexes par le seul sens du toucher.
Cette technologie nécessite-t-elle beaucoup d'énergie ?
Non, le système est conçu pour fonctionner avec un laser à faible puissance. Puisque le laser est la seule source d'énergie et qu'il n'y a pas d'électronique embarquée dans la surface de l'écran, le dispositif est potentiellement très économe en énergie, surtout à grande échelle en utilisant des projecteurs laser modernes.