Mozilla Firefox 2.0 a finalement fait son apparition sur nos ordinateurs il y a quelques jours, et il n'a pas fallu longtemps pour que les premiers commentaires apparaissent. Pour certains, le nouveau navigateur Web open-source est la huitième merveille du monde, pour d'autres il est loin d'être aussi mûr que Mozilla le prétend.


Succès non démenti, mais...
A peine une semaine après avoir été officiellement distribué par Mozilla, Firefox 2.0 refait parler de lui, souvent en bien (il bat tous les records de téléchargement), mais pas toujours. Certaines voix commencent à faire remarquer que tout n'est pas pour le mieux dans le meilleur des mondes, et que quelques critiques adressées à ses prédécesseurs n'ont pas été entendues. Revue de détail.

Comme toujours avec un produit de la main de l'homme, il est question de qualités et de défauts. Pour son Firefox 2.0, Mozilla devait, c'était attendu, capitaliser sur les premières, et faire disparaître les seconds. Dans certains cas, c'est bien ce qui s'est produit. Dans d'autres, en revanche, la déception n'est pas loin. Il en va ainsi de la gestion de la mémoire, un souci récurrent depuis les premières versions du navigateur open-source. Firefox a de tous temps rechigné à libérer les plages de mémoire qu'il n'utilisait plus, soit pour son fonctionnement propre, soit pour celui de ses extensions. Cela a vite fini par lui donner une réputation de gloutonnerie, et même si ses concepteurs sont largement parvenus à atténuer ce problème, il a tout de même perduré jusqu'à nos jours. On attendait de Firefox 2.0 qu'il fasse mieux que Firefox 1.5.x sur ce point, et force est de constater que ce n'est pas tout à fait le cas.


A l'usage
Bien sûr, cela dépend de la plate-forme sur laquellle on l'installe (on connaît la manière parfois curieuse dont Windows XP gère les ressources système, par exemple), du nombre d'extensions actives installées, et de l'utilisation qui en est faite : un internaute qui garde en permanence ouvertes une bonne dizaine d'onglets et fait appel à autant d'extensions ne peut s'attendre à ce que son navigateur fasse preuve de frugalité, mais le même internaute, une fois fermés ses onglets, devrait voir la quantité de mémoire adjugée à Firefox décroître. C'est le cas avec Internet Explorer 7 lorsqu'on réduit sa fenêtre dans la Barre de Tâches de Windows : sa consommation en mémoire vive diminue dans de notables proportions. Tentez l'expérience, et vous verrez qu'il n'en va pas de même avec Firefox 2.0. Celles et ceux parmi vous qui possèdent des ordinateurs particulièrement bien pourvus en mémoire vive peuvent trouver cet argument trivial, mais nombreux sont ceux qui ont adopté Firefox à son apparition pour sa légèreté, autrement dit la faible empreinte qu'il laissait dans le Gestionnaire de Tâches de Windows. Depuis, le châton a grandi, grossi, et il réclame bien plus de nourriture qu'à ses débuts.

Un autre point noir, qui fait penser que chez Mozilla, on a peut-être lancé Firefox 2.0 un peu trop tôt : les développeurs des si pratiques extensions n'ont pas toujours eu le temps d'accorder leurs programmes avec le nouveau code-source de Firefox. Certaines extensions et certains thèmes sont encore incompatibles avec la version 2.0 du panda rouge, et leurs amateurs inconditionnels sont susceptibles de faire l'impasse sur la dernière mouture en date de Firefox à cause de cela.


Qu'apporte-t-il de plus '
Certains attendaient avec Firefox 2.0 un thème visuel plus éloigné du thème adopté pour Firefox 1.5, ce qui aurait été un bon moyen de renforcer l'identité du nouveau venu. Le thème choisi, même s'il a été revu et corrigé, reste très (trop ') proche de l'ancien, et manque encore de certaines fonctions de personnalisation basiques. Il faut toujours recourir à des extensions pour "compacifier" la barre d'outils, alors que certains de ses concurrents permettent de le faire, soit directement depuis un menu (Avant Browser et son interface compacte, par exemple), soit depuis un fichier système (Opera). Introduire quelques lignes supplémentaires dans le tronc commun, accessible via About:config, n'aurait pas gêné grand monde, mais ce ne fût pas fait.

Le filtre anti-phishing introduit avec Firefox 2.0 manque parfois de discernement, lui aussi. Uniquement basé sur le principe de la liste noire, il est fortement dépendant de la manière dont ladite liste est alimentée. Qui plus est, il s'appuie sur un moteur de recherche de site frauduleux conçu par Google, ce qui pose une double question : éthique, dans un premier temps, puisqu'il n'est pas garanti qu'un moteur de recherche qui vit grâce à la publicité que d'autres sites font chez lui soit le mieux placé pour en conseiller certains, et en déconseiller d'autres ; technique, ensuite, car il est de notoriété publique que cet outil, une fois n'est pas coutume chez Google, manque parfois de finesse dans son fonctionnement.

Plus gênant est le manque de constance constaté par certains utilisateurs dans le rendu CSS. Mozilla avait axé une bonne partie de son travail sur ce point, afin de rendre Firefox 2.0 plus performant encore (la version 1.5.X était déjà une référence sur ce point), mais il semble que le mieux soit parfois l'ennemi du bien. Des soucis ont été constatés, notamment à l'ouverture de pages employant des techniques hybrides de programmation, comme AJAX, par exemple. Nombreux sont les internautes qui se plaignent du rendu sur des sites tels que Yahoo! Mail, avec des cadres mal définis, ou qui mettent de longues secondes à s'ajuster correctement. Certains liens sont inopérants, et des fonctionnalités sont absentes.


Peut (doit ') mieux faire
Déduire de ce qui précède que Firefox 2.0 est un mauvais produit serait exagéré et inexact. Comme souvent en informatique, personne n'a vraiment raison ni tort. Ceux qui apprécient Firefox 2.0 tel qu'il est, avec ses qualités et ses défauts, n'en changeront probablement pas de toute façon, mais en faisant remonter leurs petits soucis à qui de droit, ils feront avancer les choses, et contribueront à faire progresser leur navigateur Web favori. Les questions relatives à la gestion de la mémoire vive sont connues de longue date, chez Mozilla, et même si les développeurs y travaillent d'arrache-pied, elles n'ont toujours pas trouvé de réponse. Des moyens existent pour pallier ce défaut, comme un redémarrage de temps en temps, accompagné d'une vidange des différents caches. Pas pratique, certes, mais efficace, et pas si contraignant que cela, au final.

Demeure tout de même une mini-polémique à propos de certaines failles de sécurité qui affectent la famille Mozilla depuis quelques temps, notamment sous Linux, et qui n'auraient pas encore trouvé de solution. Les avis sont partagés, car selon certaines sources, des mesures de  contournement auraient été proposées dès l'apparition de ces vulnérabilités, alors que d'autres experts donnent un avis contraire. Le véritable pari de Firefox 2.0 tient peut-être à sa capacité à se démarquer de manière positive de son rival de chez Microsoft, Internet Explorer 7, dans un domaine où Redmond a été maintes fois critiqué.



NB : le présent article a été posté depuis Firefox 2.0 sur Mac, et votre serviteur n'a connu aucun dysfonctionnement grave durant les quelques minutes qu'il a fallu pour "pondre" les lignes qui précèdent. J'ai juste constaté qu'une extension (Keyconfig, pour ne pas la nommer) qui fonctionnait encore parfaitement hier est désormais inactive. Comprenne qui pourra...