Que l'accord entre Bouygues et Orange aboutisse ou non, Free Mobile pourrait être l'opérateur qui rafle la mise à la fin et sorte ainsi grand gagnant sur le marché. Peu importe l'issue des négociations, Free Mobile aura tôt ou tard l'occasion de mettre la main sur les actifs qui l'intéressent à un prix plus qu'attractif.

Si Orange rachète l'activité mobile de Bouygues, le groupe devra céder une partie des actifs aux autres opérateurs du marché. Une situation imposée par le régulateur de la concurrence qui ne permettra pas à un acteur d'en absorber un autre pour déséquilibrer le marché et devenir tout puissant.

4G bouygues

En conséquence, l'accord négocié entre Bouygues et Orange dépendra également de la bonne volonté de Free d'accepter ou non le deal. Pour que l'accord soit validé, il faudra qu'Orange procède à un équilibrage immédiat de ses activités, l'accord devant prétexter l'ensemble des négociations avec Bouygues, mais aussi un volet sur la cession d'une partie des actifs aux autres acteurs du marché.

Free dispose ainsi de la meilleure place : sans son accord, la négociation engagée entre les deux poids lourds ne servira à rien. En d'autres termes : Orange devra revendre une partie du réseau ou des boutiques de Bouygues à Free. Mais si Free décide que le prix de vente est trop élevé et décide de ne pas accepter l'offre, alors le rachat de Bouygues ne pourra pas se faire.

Dans cette position, c'est bien Free Mobile qui tire les cartes et fait la pluie et le beau temps sur le marché.

Orange stéphane richard

D'un autre côté, si les négociations entre Orange et Bouygues ne vont pas plus loin, Bouygues devrait continuer à chercher à revendre ses actifs dans la téléphonie. Malheureusement pour le groupe, l'offre de 10 milliards d'euros proposée par Free Mobile au printemps 2014 risque de ne plus être au gout du jour. Bouygues se retrouve coincé, d'autant que la santé de l'opérateur n'a eu de cesse de se dégrader entre temps... Pas question donc de maintenir une offre alors que le contenu proposé a perdu en valeur... Bouygues devra donc s'aligner sur les tarifs proposés, ou continue sa lente agonie.

Malgré tout, Free Mobile ne jouera pas non plus trop longtemps au plus fin, car l'idée de récupérer les fréquences de Bouygues reste alléchante et permettrait à l'opérateur de gagner deux ans sur son calendrier de déploiement, voire plus, compte tenu de la difficulté croissante des opérateurs à implanter de nouvelles antennes en ville, notamment du fait de l'opposition des bailleurs et des actions de diverses associations de protection contre la prolifération des ondes radio néfastes.

Free devra également prendre en compte les économies réalisées par ce type d'acquisition : l'achat de nouvelles fréquences et antennes lui permettra enfin de mettre un terme à l'itinérance payée au prix fort à Orange.

Reste que Free a mis les bouchées doubles ces derniers mois pour étendre son réseau, et les besoins de l'opérateur sont désormais moindres qu'au moment des premières négociations avec Bouygues.

D'ailleurs, la vente récente des lots de fréquences basses sur la bande des 700 MHz a changé la donne, et désormais, Free est passé devant SFR Numéricable au niveau des sites 4G.

Finalement, les négociations pourraient ne pas véritablement avoir la France en ligne de mire, mais plutôt une dimension internationale : Xavier Niel a récemment acquis 15% d'options sur le capital de Telecom Italia, un opérateur convoité par Orange.

Les parts de Telecom Italia de Free Mobile pourraient ainsi se présenter comme une monnaie d'échange dans la transaction. Reste à savoir si Xavier Niel souhaite maintenir ses positions à l'international ou si le rachat était bel et bien stratégique par rapport à Orange.

Selon Stéphane Dubreuil, président de Stallych Consulting, Orange pourrait être le grand perdant dans les négociations : " Le groupe devra à la fois gérer la question sociale et la revente à la découpe de Bouygues Telecom, sans aucun avantage si ce n'est l'élimination d'un concurrent, c'est faible au final."