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A Londres, des expos géniales

18 réponses
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Jerome jj
Hello everybody !

Nous rentrons juste de Londres, épuisés, mais heureux.

Nous avons pu visiter en ce week-end prolongé une multitude
d'expositions, toutes absolument formidables et valant chacune le
déplacement. Jugez donc : Tillmans à la Tate Britain, "Cruel and Tender"
à la Tate Modern, la nouvelle galerie Saatchi. Pour les amateurs de
peintures, il y a aussi Pissarro à Londres et surtout une géniale
exposition Kirchner à la Royal Academy.

Bien, cela donne un terrible coup de vieux à Paris, qui nous propose des
expositions (certes géniales) posthumes (ha, je suis méchant) de
Cartier-Bresson et Lartigue.

Pour dire les choses, je suis un fan de Tillmans et voir ses photos en
tirage original est un plaisir décuplé, tant ses reproductions
n'arrivent pas à rendre l'intensité de ses rouge/bleu/vert tellement
intenses et tellement beaux. Il y a des agrandissements gigantesques,
laissant apparaître du grain à mort vue de près. Les photos sont
scotchés directement sur les murs, pas de cadres, pas de vitres. Les
mêmes photos peuvent être tirées plusieurs fois dans des formats
différents.

Tillmans donne un sacré coup de pied dans la fourmilière photographique
et nous laisse sur le cul avec ses photos. Ses natures mortes sont à se
rouler par terre, ses portraits remplis d'amour et ce type est un touche
à tout génial et perturbateur. Il file un coup de vieux à une vision
passéiste et compassée de la photographie : la recherche dérisoire du
noir &blanc esthétisant, les poses ridicules de modèles vues cinquante
milles fois, les discours ringards sur le filet noir, le cadrage sacré,
la parole du maître et autres conneries.

Tillmans vous montre sa queue et le bordel de la vie moderne. Comme HCB
et sa modernité de l'époque, Tillmans propose un regard glouton et
passionné sur la vie. C'est en couleur, c'est plein d'essais. Comment ne
pas tomber sur les genoux devant la quadrature du cercle qu'il arrive à
résoudre avec une élégance stupéfiante : faire du beau avec du moche,
faire du grand avec du rien. Ses photos me rappelle bien sûr des pans
entiers de ma vie, et ses nuits infinies et erratiques résonnent en moi
de quelques souvenirs embrumés.

Ces photos de nuit sont marquées par l'extasie, par ces visions
parcellaires d'une vérité rythmée. Ah, je me laisse aller, mais
vraiment, cette exposition mérite le détour.

Faire le même jour Tillmans et "Cruel and Tender" (C&T) est une
expérience limite.

En effet, C&T c'est rien moins qu'une somme d'expositions de
photographes dont vous avez toujours rêvés de voir de vrais tirages.
C&T, c'est l'évocation de ce que pourrait être un jour un musée de la
photographie. Jugez vous-mêmes : une salle par photographe et que du bon
! Arbus, Eggleston Evans, Frank, Gursky, Ruff, Sander, Shore, Winogrand,
Becher etc !

La thématique, c'est la photographie reflet du réel, sans interprétation
ni implication du photographe. Une photographie qui témoigne sans
romantisme, qui scrute la réalité et la montre telle qu'elle est. Pas de
français dans cette exposition, la poésie d'un Boubat ou le romantisme
d'un Doisneau n'ont pas leur place. C'est une exposition à la fois
géniale, parce que les photos y sont formidables, mais qui vous atteint
tout de même le moral, par cette scrutation "cruelle et tendre" de notre
vingtième siècle.

----

La galerie d'art de Saatchi est dans de nouveaux locaux et c'est
l'occasion d'une exposition sur les "100 oeuvres qui ont changé l'art
britannique". C'est une leçon de muséographie et l'enthousiasme et la
jouissance créatrice qui règne là, relègue tout d'un coup Paris et
Beaubourg dans une certaine forme de ringardise éculé. La provocation
britannique est parfois drôle; souvent choquante, mais laisse rarement
indifférent. Il y a peu de photographies et pas de pari esthétique dans
celles qui sont présentes : montrer, choquer, donner à voir.

Par exemple Richard Bilingham photographie sa famille (alcoolisme,
pauvreté, déchéance) et l'on voit le chat volé dans l'appartement, la
bagarre conjugale avec coups de poing et nez cassé. Ou bien Sarah Lucas,
qui porte la chasse d'eau d'un WC et devient nous dit-on "Human Toilet".

Cependant, il faut voir là-bas les travaux des frères Chapman
(reconstitution d'un tableau sanguinolent de Goya en 3D avec mannequins
émasculés, par exemple), les sculptures hyper réalistes de Ron Wueck (en
particulier un agrandissement géant de son autoportrait donnant l'image
effrayante et à l'échelle de la vision que peut avoir un bébé d'un
adulte lui faisant les gros yeux "no wonder babies cry".). Mais la part
du lion revient à Damien Hirst, l'enfant terrible britannique de l'art
contemporain.

La pièce maîtresse reste un mouton entier baignant dans du formol et
présenté dans un aquarium : payé 250.000 livres par Saatchi, c'est là un
questionnement sur l'art et la représentation. J'en finirai donc par là,
puisque comme le dit Hirst "mieux qu'une photo représentant un mouton,
mieux qu'une sculpture ou une peinture représentant un mouton, voilà un
*vrai* mouton".

Tant qu'à faire, il a raison, autant exposer de *vraies* choses, plutôt
que leur représentation.
--
Jérôme
(retirez les chaussures pour répondre)
<URL:http://photothera.free.fr>

10 réponses

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Pierre Pallier
Hello, Jerome jj a écrit dans <3f26f40c$0$8895$

<Snip la méga-critique enthousiaste>

Tant qu'à faire, il a raison, autant exposer de *vraies* choses, plutôt
que leur représentation.


T'as bu combien de Guinness là-bas, dis ? :o)
Et dire que c'est moi qu'on soupçonne de fumer la moquette, ou d'autres
substances qui font... Enfin bon...
Merci pour ce bon moment !
--
Pierre.
Mes photographies : <URL:http://perso.wanadoo.fr/pierre.pallier&gt;
La FAQ de frp : <URL:http://frp.parisv.com&gt;
Proses de Vues, vos photos et textes : <URL:http://prosesdevues.stefb.net&gt;

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Jerome jj
"Christophe Frot" a écrit dans le message de news:

"Jerome jj" wrote in message
news:<3f26f40c$0$8895$...



Pour dire les choses, je suis un fan de Tillmans et voir ses photos
en


tirage original est un plaisir décuplé, tant ses reproductions
n'arrivent pas à rendre l'intensité de ses rouge/bleu/vert tellement
intenses et tellement beaux. Il y a des agrandissements
gigantesques,


laissant apparaître du grain à mort vue de près. Les photos sont
scotchés directement sur les murs, pas de cadres, pas de vitres. Les
mêmes photos peuvent être tirées plusieurs fois dans des formats
différents.


Bref, c'est la meme expo qu'au palais de Tokyo...
Je n'aime pas Tillmans depuis l'expo du palais de Tokyo, alors que
j'avais un a priori positif avant...


Ben, je me demandais si les parisiens allaient réagir ...

Bon, qu'est-ce qui t'as déçu à ce point ? (toutes ses expos sont
scotchés et l'expo de la Tate est une reconstitution d'autres expos
effectivement, dont sa première expo d'ailleurs).

Tillmans donne un sacré coup de pied dans la fourmilière
photographique


et nous laisse sur le cul avec ses photos. Ses natures mortes sont à
se


rouler par terre, ses portraits remplis d'amour et ce type est un
touche


à tout génial et perturbateur. Il file un coup de vieux à une vision
passéiste et compassée de la photographie : la recherche dérisoire
du


noir &blanc esthétisant, les poses ridicules de modèles vues
cinquante


milles fois, les discours ringards sur le filet noir, le cadrage
sacré,


la parole du maître et autres conneries.


mais il retombe dans d'autre travers...


Lesquels ?

--
Jérôme
(retirez les chaussures pour répondre)
<URL:http://photothera.free.fr&gt;


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cfrot
"Jerome jj" wrote in message news:<3f27d977$0$24776$...


Bref, c'est la meme expo qu'au palais de Tokyo...
Je n'aime pas Tillmans depuis l'expo du palais de Tokyo, alors que
j'avais un a priori positif avant...


Ben, je me demandais si les parisiens allaient réagir ...

Bon, qu'est-ce qui t'as déçu à ce point ? (toutes ses expos sont
scotchés et l'expo de la Tate est une reconstitution d'autres expos
effectivement, dont sa première expo d'ailleurs).




oui la presentation etait moche et sale.
mais de toute facon les expo photo bien presentes et surtout bien
eclairee ne sont pas legion...
Par ailleurs, c'est deja vu et revu comme image (ecole allemande),
donc ca date et y a pas vraiement de novation... ca irait si il lui
ajoutais du brio, du genie et de l'invention ce qui n'est le cas a mon
gout...
on a l'impression qu'il tourne en rond...

bref une expo qui ne m'a pas marque, pas emu
mais je comprend qu'on puisse aimer!

@+

Christophe


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cfrot
"Jerome jj" wrote in message news:<3f26f40c$0$8895$...


Faire le même jour Tillmans et "Cruel and Tender" (C&T) est une
expérience limite.


frime pas, moi, j'ai vu Leon et Tueurs-nes a la suite! (mais je
faisais mon service, ca deprime ;o) )

@+

Christophe

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cfrot
"Jerome jj" wrote in message news:<3f26f40c$0$8895$...
En effet, C&T c'est rien moins qu'une somme d'expositions de
photographes dont vous avez toujours rêvés de voir de vrais tirages.
C&T, c'est l'évocation de ce que pourrait être un jour un musée de la
photographie. Jugez vous-mêmes : une salle par photographe et que du bon
! Arbus, Eggleston Evans, Frank, Gursky, Ruff, Sander, Shore, Winogrand,
Becher etc !
La thématique, c'est la photographie reflet du réel, sans interprétation
ni implication du photographe. Une photographie qui témoigne sans
romantisme, qui scrute la réalité et la montre telle qu'elle est. Pas de
français dans cette exposition, la poésie d'un Boubat ou le romantisme
d'un Doisneau n'ont pas leur place. C'est une exposition à la fois
géniale, parce que les photos y sont formidables, mais qui vous atteint
tout de même le moral, par cette scrutation "cruelle et tendre" de notre
vingtième siècle.


je ne suis pas sur de ton interpretation... que ce soit Arbus,
Eggleston, Frank, Gursky ou Ruff, il represente tout sauf la realite
sans romantisme ou poesie (que celui ci soit negatif ou positif).
Prenons Gursky, par exemple, de nombreuse image de lui son montee,
travaille numeriquement...
De toute facon, la photographie n'a probablement jamais represente la
realite mais son fantasme...

Quoi qu 'il en soit, ca doit etre une superbe expo!
@+

Christophe

PS: je te conseille de te reporter a la serie "Contact", dispo en DVD,
pour ecouter et voir ce que pense les photographe "objectifs" selon
toi de la realite qu'ils rapportent...

Avatar
cfrot
mais bon, merci beaucoup pour ton recit de voyage (un genre qui se
perd!) et ton enthousiasme!


@+

Christophe

"Jerome jj" wrote in message news:<3f26f40c$0$8895$...
Hello everybody !

Nous rentrons juste de Londres, épuisés, mais heureux.


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Jerome jj
Christophe Frot wrote:
"Jerome jj" wrote in message
news:<3f26f40c$0$8895$...
En effet, C&T c'est rien moins qu'une somme d'expositions de
photographes dont vous avez toujours rêvés de voir de vrais tirages.
C&T, c'est l'évocation de ce que pourrait être un jour un musée de la
photographie. Jugez vous-mêmes : une salle par photographe et que du
bon ! Arbus, Eggleston Evans, Frank, Gursky, Ruff, Sander, Shore,
Winogrand, Becher etc !
La thématique, c'est la photographie reflet du réel, sans
interprétation ni implication du photographe. Une photographie qui
témoigne sans romantisme, qui scrute la réalité et la montre telle
qu'elle est. Pas de français dans cette exposition, la poésie d'un
Boubat ou le romantisme d'un Doisneau n'ont pas leur place. C'est
une exposition à la fois géniale, parce que les photos y sont
formidables, mais qui vous atteint tout de même le moral, par cette
scrutation "cruelle et tendre" de notre vingtième siècle.


je ne suis pas sur de ton interpretation... que ce soit Arbus,
Eggleston, Frank, Gursky ou Ruff, il represente tout sauf la realite
sans romantisme ou poesie (que celui ci soit negatif ou positif).
Prenons Gursky, par exemple, de nombreuse image de lui son montee,
travaille numeriquement...
De toute facon, la photographie n'a probablement jamais represente la
realite mais son fantasme...


C'est le thème de l'expo "Cruel et Tendre", c'est comme ça qu'avait
qualifié un critique le travail de Frank Evans. Ils ont pris comme fil
rouge le travail de Evans et August Sander, comme une auscultation
froide de la réalité. Ils ont cherché la descendance dans l'histoire et
aujourd'hui de photographes qui revendiquent une vision "à la surface
des choses".

Bon, évidemment, ça donne un ton général, un texture à l'exposition.
Mais je suis bien d'accord avec toi pour s'interroger sur cette
filiation et sur le fait que les photos échappent à leur auteurs assez
vite. La photographie au fond, montre (aussi/surtout) ce voit le
photographe. Ensuite, on décrypte à sa façon.

La notion de réalité évoquée ici n'est pas le thème récurrent ici "pas
toucher la photo sinon plus vraie". La réalité, c'est plutôt le regard
sur le monde du photographe. Ca veut dire, "montrer les choses et
laisser le spectateur en tirer des conclusions". C'est nous qui
chargeont les images de symboles et de romantismes. Par exemple, Evans
dans son travail sur le sud blanc, ne cherchait rien à démontrer, juste
à montrer. Et pourtant, ses images sont devenues LA référence de la
dépression du Sud (avec Lange, of course).

Non, le traficottage des images, le numérique ou le recadrage est hors
sujet. (c'est en tout cas, ce que j'ai compris ...)

ca doit etre une superbe expo!


Oh que oui !

PS: je te conseille de te reporter a la serie "Contact", dispo en DVD,
pour ecouter et voir ce que pense les photographe "objectifs" selon
toi de la realite qu'ils rapportent...


Je l'ai déjà :)

--
Jérôme
(retirez les chaussures pour répondre)
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Jerome jj
Christophe Frot wrote:
mais bon, merci beaucoup pour ton recit de voyage (un genre qui se
perd!) et ton enthousiasme!


Bah, je tente de partager un peu et de donner envie aux lecteurs de
faire un p"tit tout là-bas. J'ai glissé quelques provocations dans mon
récit, mais les vacances les endorment tous :)

Merci pour tes commentaires qui stimulent l'esprit.
--
Jérôme
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Andre Gély
Jugez vous-mêmes : une salle par photographe et que du
bon ! Arbus, Eggleston Evans, Frank, Gursky, Ruff, Sander, Shore,
Winogrand, Becher etc !
La thématique, c'est la photographie reflet du réel, sans
interprétation ni implication du photographe. Une photographie qui
témoigne sans romantisme, qui scrute la réalité et la montre telle
qu'elle est.


Christophe Frot wrote:
je ne suis pas sur de ton interpretation... que ce soit Arbus,
Eggleston, Frank, Gursky ou Ruff, il represente tout sauf la realite
sans romantisme ou poesie (que celui ci soit negatif ou positif).


Ils ont pris comme fil
rouge le travail de Evans et August Sander, comme une auscultation
froide de la réalité. Ils ont cherché la descendance dans l'histoire et
aujourd'hui de photographes qui revendiquent une vision "à la surface
des choses".

Evans dans son travail sur le sud blanc, ne cherchait rien à démontrer, juste
à montrer. Et pourtant, ses images sont devenues LA référence de la
dépression du Sud (avec Lange, of course).


Je partagerai plutôt l'avis de Christophe sur la réalité et la poésie
que je trouve bien présentes chez ces photographes.
Je trouve qu'au delà de la représentation de la réalité on trouve une
communion (sens strict) avec le sujet qui peut être appelée de
différentes manières. Romantisme si l'on trouve cette empathie un peu
mièvre, poésie si elle on la trouve éthérée, mais il s'agit bel et bien
d'un travail sur la réalité et non pas une réalité incontestable.
Les portraits de Sanders (le dernier bouquin en six volumes.. une
merveille, pour JJ il est chez Décitre bellecour) sont profondément
impliqués dans sa façon de voir la vie et son engagement est tel qu'il à
été bien perçu comme tel et détruit en partie par les nazis. Ceux de
Arbus projettent ses problèmes perso et rapprochent las apparemment
normaux des apparemment différents.
J'ai du mal à rapprocher Ruff de Sanders j'aurais plutôt vu une
filiation dans l'approche entre Nadar Sanders Evans Lange Arbus et
Ballen plus peut être Bauret ou Mappelthorpe.

30cts de contribution.

--

André GELY
attention à mon adresse en répondant merci



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Jerome jj
Andre Gély wrote:


Je partagerai plutôt l'avis de Christophe sur la réalité et la poésie
que je trouve bien présentes chez ces photographes.


Et bien je vais tenter d'être plus clair. D'abord il s'agit d'un
compte-rendu de visite, donc à priori j'essaie d'expliquer le concept
"Cruel & Tendre" qu'ils ont choisi. Ce dont parlait Christophe était il
me semble différent de ce dont tu parles : la réalité au sens "pas
traffiquée, directe de la pelloche". Il s'agit d'un autre concept de
réalité (mais je me goure peut-être), celle du captage de l'air du
temps, sans critique social ou partie-pris évident. Par exemple, sur les
photos de portraits, tous les photographe demandent à leur modèles de
poser sans aucune expression sur le visage.

Ces visages inexpressifs sont véritablement le fil rouge de l'exposition
oui, ceux de Sanders ont le regard fixe, absent et droit dans
l'objectif. Ceux de Evans pareil. Idem chez Ruff, ses portraits géants
sont totalement inexpressifs. Le pompon, c'est peut-être Philip-Lorca
diCorcia (que je ne connaissais pas avant cette expo) : de la photo
d'inconnus dans la rue, mais prise avec une caméra cachée et surtout un
éclairage sophistiquée (en clair des flashs si j'ai bien tout compris)
positionnés à l'avance pour éclairer la scène. Et puis quand le bon
candidat passe, hop, déclenchement à distance. Le résultat est
stupéfiant, présentation de pauvres hères : un clochard et surtout un
vieille genre hystérique-bigote les mains crispées sur ses sacs de
magasins (photos devenues paraît-il icone de la consommation et de
l'avidité qui bien entendue choque à côté de la pauvreté du clochard).

En terme de filiation, celle avec Evans et son appareil caché dans son
manteau pour les portraits du métro paraît assez évidente.

Je trouve qu'au delà de la représentation de la réalité on trouve une
communion (sens strict) avec le sujet qui peut être appelée de
différentes manières. Romantisme si l'on trouve cette empathie un peu
mièvre, poésie si elle on la trouve éthérée, mais il s'agit bel et
bien d'un travail sur la réalité et non pas une réalité incontestable.


Je crois que personne ne peut nier ce qu'il ressent personnellement en
regardant ces photos. On y collera bien des choses, mais le propos est
plus axé sur la pensée du photographe que sur celle du spectateur.
Personnellement, je ne peux que m'émerveiller devant les portraits
d'Evans en particulier ceux de la familles Burroughs, dans lesquels
j'aurais tendance à projetter un tas de choses : la difficulté de la
vie, la profondeur de l'âme, la beauté sauvage et je ne sais quoi
encore. Mais ce n'est pas le propros (mes sentiments).

Les portraits de Sanders (le dernier bouquin en six volumes.. une
merveille, pour JJ il est chez Décitre bellecour) sont profondément
impliqués dans sa façon de voir la vie et son engagement est tel
qu'il à été bien perçu comme tel et détruit en partie par les nazis.


Oui, d'autant que les Nazis ont brulés ses oeuvres et rejetés son
travail. Son propres fils est mort dans les prisons nazis. Oui, il a
photographié les mendiantes comme sont huissiers (il semblerait nous
dit-on qu'il avait les huissiers aux fesses), les aveugles comme les
aliénés. Un parti pris de non choix, de mise sur un même niveau de toute
la population. C'est bien ce qui a ulcéré les nazis, que les tsiganes et
les fous, paraissent aussi normaux et posent de la même façon que le
paysan.

Cause de fureur aussi, ces portraits sans idéal, froid et proposant une
germanité humaine et humble, bien loin du decorum nazi. On ne voit
personne faire de salut, pas de manifestation d'enthousiame ou de
colère, bien loin de nous toute l'agitation de l'époque. Une
radiographie froide (tendre ou, mais cruel, certes) d'un pays. Encore
une fois nous projetons beaucoup dans ces images : on tressaille en
imaginant le destin de ses amis juifs (compositeurs, artistes), de ses
modèles tsiganes, aveugles et de toute cette population : qui était
nazis, qui a fait des saloperies, qui a été gazé ?

Ceux de Arbus projettent ses problèmes perso et rapprochent las
apparemment normaux des apparemment différents.


J'ai déjà exprimé mon admiration pour Arbus, et d'ailleurs pour les
femmes photographes en général : Goldin, Lange ou Miller par exemple.
Dans l'exposition, il y a des portraits d'elle volée par Winogrand et
c'est très émouvant. Mais oui, il a là une filiation assez claire avec
Sanders ou Evans : toutes les personnes photographiées ont cette
expression vide caractéristique de l'exposition, une façon de fixer la
caméra pour l'éternité qui vous glace et vous émeut. Il y a un discours
en creux chez Arbus : "regardez cette amérique que vous ne voulez pas
voir" (voilà le fil rouge avec Robert Franck d'ailleurs).

Et que voit-on de cette amérique ? Et bien le même constat que chez
Sanders, les plus effrayants sont peut-être les plus normaux. Il y a une
angoisse indicible chez les bourgeois où ces jeunes couples "modernes",
la même chez les travestis. Quand Arbus va chez les nudistes, elle
adopte les règles locales et ne choissit pas de beaux garçon ou de
belles filles : elle photographie ceux qui sont là.

J'ai du mal à rapprocher Ruff de Sanders j'aurais plutôt vu une
filiation dans l'approche entre Nadar Sanders Evans Lange Arbus et
Ballen plus peut être Bauret ou Mappelthorpe.


Je vais méditer là-dessus :)

30cts de contribution.


Ca marche "sklongeux" !
--
Jérôme
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