Dans sa grande étude sur le marché de la téléphonie mobile en France publiée la semaine dernière, l'association UFC-Que Choisir se félicitait de plusieurs avancées comme la baisse des prix des forfaits grâce à la sortie du carcan de la subvention des mobiles, ce qui a permis par ailleurs une économie de près de 7 milliards d'euros par les foyers, réinjectée ailleurs dans l'économie et potentiellement créatrice de 50 000 emplois.

Elle saluait l'arrivée de Free Mobile en 2012 comme l'un des ressorts de cette évolution rapide en deux ans et s'inquiétait des conséquences du rachat de SFR par Numericable et du risque d'un retour à un marché à trois opérateurs, voulu par le gouvernement mais qui risque de faire remonter les prix à moyen terme.

Sans surprise, la Fédération Française des Télécoms (FFT), qui regroupe les trois opérateurs mobiles hors Free Mobile, ainsi que plusieurs MVNO, évoque une "image biaisée donnée par l'étude de l'UFC-Que Choisir" et souligne que "la situation du secteur des télécoms s'est fortement dégradée depuis trois ans, au point d'en menacer la soutenabiilité même".


Situation intenable pour le secteur
Là où l'association de consommateurs voit des effets bénéfiques, la FFT veut mettre en avant le fait qu'ils se font au détriment de la viabilité du secteur et du maintien des investissements pour améliorer les réseaux et préserver la qualité de service.

La FFT attaque logiquement l'étude sur sa méthodologie et sur la présentation des faits, et donc des conclusions qui en sont tirées. Elle a elle-même publié une étude avec le cabinet Arthur D. Little en fin d'année 2013 qui soulignait une baisse de 22% de l'indice des prix de l'INSEE depuis 2006 dans les services télécoms, observant elle aussi cette baisse des prix, mais en soulignant qu'elle n'était pas tenable dans le temps du fait des forts investissements requis pour améliorer les réseaux mobiles, estimés à 7 milliards d'euros en 2013, soit le même niveau qu'en 2012.

Or avec une baisse de 16% de leurs revenus entre 2010 et 2013, et une sévère baisse des marges, ces niveaux d'investissement seront difficiles à maintenir, alors même que le trafic data explose, et ce malgré les efforts de réduction des coûts déjà menés et qui impactent toute la filière, sous-traitants et intérim compris.


Tout le monde perdant avec des prix trop bas ?
 Ce ne serait pas non plus une bonne nouvelle pour les recettes fiscales car cela a créé une perte de 1,7 milliard d'euros de TVA sur trois ans. La FFT critique là aussi les conclusions de l'UFC-Que Choisir en soulignant que les économies réalisées sont dépensées dans des smartphones et tablettes, c'est à dire majoritairement vers des sociétés hors de France et aux méthodes d'optimisation fiscale telles que ces revenus sont très peu réinjectés dans le pays.

La FFT affirme également que les prix étaient en fait déjà compétitifs avant l'arrivée de Free Mobile. Elle prend donc le contre-pied de l'étude en évoquant une destruction de valeur pour tout le monde : entreprises du secteur, Etat et consommateurs qui, après la chute des prix à court terme, vont être pénalisés faute de moyens pour développer des services innovants et fournir les capacités requises.

Entre l'étude de l'UFC-Que Choisir et celle de la FFT, ce sont donc deux visions et deux explications des mécanismes du secteur qui s'affrontent, la première soulignant les bénéfices pour le consommateurs et sa libération en partie du joug des opérateurs, la seconde qui suggère que la situation est intenable en l'état. La première craint la remontée des prix et demande des garanties pour l'éviter tandis que la seconde l'appelle de ses voeux pour rééquilibrer la situation.

Source : FFT