Introduction

Palm III Les affichages tactiles constituent un élément de référence des PDA et PDAPhones. Longtemps considérés comme le nec plus ultra en matière d'interface pour ce type d'appareil mobile, ils ont cependant montré leurs limites lorsque la fièvre de l'email mobile s'est emparée du marché des terminaux mobiles, faisant réapparaître les claviers physiques, plus précis et mieux adaptés que leurs équivalents virtuels.

Cependant l'interface tactile possède l'immense avantage de pouvoir être redéfinie en fonction de l'application utilisée et de simuler les touches nécessaires, au lieu de devoir s'accommoder des boutons physiques existants. Différentes solutions ont été proposées, en combinant les aspects réels et virtuels, par exemple.

Toutefois, l'immense majorité des appareils mobiles à affichage tactile s'est contentée d'une interaction par point de contact unique, avec une multiplication des manipulations du fait de la complexité grandissante des terminaux. Cette approche, de moins en moins satisfaisante, a trouvé un début de solution avec la démonstration des avantages du multitouch, rénovant l'approche de l'interface tactile et de son ergonomie.

Si la qualité du système d'exploitation sous-jacent est un facteur essentiel, l'ergonomie de l'interface tactile est désormais une priorité pour les fabricants. Le centre de gravité des batailles commerciales est en train de glisser du domaine de l'empilement des fonctionnalités à celui de l'attrait de l'interface.

Apple iPhone 3G 01

Aux premiers temps

Les PDA ont une longue histoire conjuguée avec les écrans tactiles. Leur fonction même d'organiseur personnel a rapidement été complétée par des fonctions additionnelles, rendant l'utilisation de touches fixes complexe, différentes actions devant être activées depuis les mêmes boutons et souvent au détriment de l'ergonomie.

Si un affichage non tactile et des touches en nombre réduit pouvaient suffire dans le cas des téléphones portables, la saisie de données inhérente au concept des PDA a obligé à chercher d'autres méthodes d'interactions homme / machine.



PalmOne Tungsten E2 Une fonctionnalité des écrans tactiles se révélait particulièrement attractive pour ce type d'application : la possibilité de saisir du texte manuscrit, avec ou sans reconnaissance d'écriture. Pour des raisons économiques, le choix de la technologie d'écran tactile s'est porté sur des écrans ne gérant qu'un seul point de contact à la fois.

Pour accélérer la saisie et résoudre le problème des caractères nécessitant plusieurs traits discontinus, des codes ont été inventés, avec plus ou moins de bonheur. Ils ont fait le succès de systèmes du type Graffiti et Graffiti 2 sur Palm OS, repris en partie par la suite sur le système PocketPC2000 qui deviendra par la suite Windows Mobile.

Mais la saisie de caractères n'était pas le seul intérêt de l'écran tactile. En permettant de redéfinir des touches de contrôle virtuelles en fonction de l'application lancée, avec leur propre disposition de façon à être la plus ergonomique possible ( avec plus ou moins de bonheur ), on s'assurait de conserver un format compact aux appareils mobiles et on permettait dans le même temps l'élargissement des fonctions au rythme de la miniaturisation des technologies.

Et vint l'email mobile

Parmi les aspects mobiles les plus porteurs dans le domaine professionnel, on peut citer la messagerie mobile. La possibilité de recevoir ses emails sur son téléphone portable et d'y répondre, amplifiant la dimension de mobilité des appels voix a constitué une véritable révolution dans la façon de travailler.

Elle a créé aussi de nouveaux besoins : pouvoir répondre vite et bien. Or, un clavier virtuel montre vite ses limites dans cet exercice. En revanche, le clavier mobile physique sous forme de thumboard ( on tape avec les pouces ) a connu soudainement un regain d'intérêt, sous l'impulsion d'un petit fabricant de terminaux proposant des solutions de push mail ( les emails sont rapatriés automatiquement du serveur de messagerie vers le terminal ) : Research in Motion, avec ses services et terminaux BlackBerry.

S'emparant d'un créneau laissé vacant, et profitant de l'engouement pour les smartphones, ces terminaux mobiles comprenant des fonctions d'organiseur mais dépourvus d'affichage tactile, cette société canadienne a redynamisé un marché des PDA parvenus au terme de leur cycle de développement.

Smartphones avec clavier complet intégré

Désormais, la fonction téléphonie devenait essentielle pour un PDA, le marché des terminaux non communicants amorçant son déclin, mais fallait-il conserver l'interface tout tactile de ces derniers ou basculer vers le clavier de messagerie sans interface tactile des smartphones ?

A cette question, les fabricants ont répondu de différentes manières. Une flopée de smartphones sans écran tactile mais avec clavier logé sous l'écran est apparue de manière à ne pas laisser Research in Motion occuper seul un secteur très profitable.

Cependant, l'absence d'interaction tactile pouvait se révéler handicapante pour certaines fonctionnalités. Une partie des PDAPhones, héritiers communicants des PDAs, ont donc été affublés de claviers physiques en plus de leur interface tactile, obligeant à des compromis ( taille de l'écran, dimensions des touches du clavier, ergonomie générale ) ne satisfaisant finalement ni l'une ni l'autre des deux composantes.


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PDAPhones à clavier

Le retour conquérant du tout tactile

Pendant que les PDAs évoluaient en PDAPhones et que leurs interfaces s'alourdissaient de systèmes de saisie hybrides tactile et clavier et que les téléphones portables les plus évolués, devenus smartphones, exploraient les aspects non tactiles, il apparaissait de plus en plus clairement que l'empilement des fonctionnalités et la complexité des interfaces ( arborescence complexe, nombreux items par menu, navigation fastidieuse ) qui en découle conduisait à une impasse.

Une situation amplifiée par le fait que les manipulations se limitaient encore bien souvent au credo une interaction / une action, système efficace seulement si le nombre de choix n'est pas trop grand. Mais quand une fonctionnalité commence à demander une dizaine d'interactions pour être activée, le public refuse de suivre cette logique et n'utilise par la fonction.

D'où des enquêtes de satisfaction mettant les interfaces aux premiers rangs des facteurs de mécontentement et des retours non négligeables de matériel mobile fonctionnant parfaitement mais pour lequel les utilisateurs ont renoncé à comprendre le fonctionnement.

Apple avait bien créé l'heureuse surprise de la molette de défilement sur ses baladeurs iPod, bien adaptée à la navigation dans de grandes listes, idée aussitôt reprise par certains fabricants de mobile pour leurs téléphones dédiés à la musique.

Dans le même temps, une autre révolution a émergé de l'Internet : le Web 2.0 avec ses widgets, sa personnalisation poussée à l'extrême et le pouvoir de décision quant à l'organisation de l'information rendu à l'utilisateur.

Or, quel meilleur support de personnalisation et de modification à loisir des informations affichées que l'interface tactile ? Par ce moyen, les opérateurs et fabricants peuvent mettre en avant leurs services et fonctionnalités, donc les rendre plus facilement accessibles tout en laissant une marge de manoeuvre à l'utilisateur pour les placer comme bon lui semble.

C'est ce qui explique en partie le regain d'intérêt pour les interfaces tactiles depuis le début 2007 dans presque tous les segments de la téléphonie mobile pour des usages redéfinis par la nouvelle plasticité des interfaces, avec ou sans retour haptique.

Mais un autre élément a également fait son apparition : les interfaces tactiles multitouch, emmenées par le désormais célèbre iPhone d' Apple.

Multitouch, une longueur d'avance

Les interfaces tactiles existent depuis un bon moment dans l'univers de la mobilité et particulièrement celui des PDA / PDAPhones. Longtemps, le coût des écrans résistifs à point de contact unique a justifié leur utilisation privilégiée car répondant à des impératifs économiques et ergonomiques.

La précision d'un écran résistif ( bien que déclinante au cours du temps et nécessitant des recalibrages ), est suffisante pour des usages de saisie par stylet ou au doigt et les systèmes à point de contact unique étaient largement suffisants pour des opérations de complexité simple à moyenne.

En revanche, les affichages résistifs laissent moins bien passer la lumière, rendant les écrans moins lumineux et moins précis.

De leur côté, les affichages capacitifs réagissent à la pulpe du doigt ( par transfert de charges électriques d'une plaque vers le doigt ) et non à un objet dur comme un stylet et offrent une qualité d'affichage supérieure. Ils sont moins soumis à des perturbations extérieures ( appui inopiné par un objet dans une poche ou un sac ) mais sont plus coûteux à fabriquer.

D'autre part, la technologie multitouch offre la capacité de gérer plusieurs points de contacts simultanés, permettant d'inventer une véritable gestuelle pour piloter des interfaces. Ce concept a été mis en scène dans le film Minority Report, dans lequel le héros manipule des images par des gestes précis faits de mouvements de doigts et de poignets.

Au-delà de l'aspect séduisant, cette technique offre une réponse au problème du nombre de clics correspondant à l'activation d'une fonction rencontré avec les écrans tactiles à point de contact unique. D'un point de vue mobile, elle résoud la question de la complexité des interfaces par quelques gestes simples qu'il va falloir désormais peaufiner pour les rendre les plus intuitifs possibles, avec l'aide de capteurs de mouvements.

Car, toujours dans un contexte mobile, la technologie multitouch a également ses contraintes. Tout d'abord, il faut apprendre les gestes qui permettront d'activer les fonctions. Ecarter les doigts pour zoomer, les rapprocher pour faire l'inverse appartiennent à une " grammaire tactile " qu'il faudra savoir maîtriser. On peut faire déjà confiance aux jeunes générations pour en maîtriser toutes les subtilités.

D'autre part, l'usage du multitouch peut aller à rebours d'un usage mobile : pour manipuler une interface tactile multitouch mobile, il faut une main pour tenir l'appareil et une main pour faire les manipulations. Or, tous les efforts des interfaces mobiles ont consisté jusqu'à présent à tenter de gérer des interfaces complexes d'une seule main.

Et après ?

Sans entrer dans les détails des techniques ni dans les rapports chiffrés, on peut constater que les interfaces des PDAs et PDAPhones, premières expressions de la mobilité ( en excluant volontairement les H/PC ) sont passées par différentes phases, explorant les aspects du tactile à point de contact unique, évoluant vers un mixte tactile / clavier physique avant de revenir au tout tactile à la faveur du développement des concepts du Web 2.0.

En 2007, l'arrivée du multitouch dans un appareil mobile laisse présager de quelle manière il sera possible d'améliorer des interfaces mobiles qui étaient arrivées aux limites de l'ergonomie du fait de leur complexité grandissante.

La gestuelle tactile offre une solution radicale à ce problème en ramenant des actions demandant de nombreuses validations dans le système du point de contact unique à un simple mouvement de doigts. Elle n'est pas cependant dépourvue de défauts ( pour un usage en mobilité ), comme nous l'avons vu précédemment.

Elle a toutefois rénové la vision de l'interface tactile du futur : malléable et intuitive. Les écrans tactile à point de contact unique n'ont cependant pas dit leur dernier mot, comme le montrent les interfaces dédiées créées par HTC pour Windows Mobile.

La surcouche TouchFLO ( et maintenant TouchFLO 3D ) ajoutée par le fabricant permet de reproduire une partie de cette gestuelle en approfondissant l'usage d'une seule main. Là où on écarte ou rapproche les doigts pour zoomer ou dézoomer sur une image dans le système d'exploitation d'Apple, on dessinera un cercle avec le doigt dans le cas de l'interface TouchFLO 3D, le sens de rotation définissant le niveau de zoom.

Toutes ces améliorations confirment l'engouement et le succès à venir des interfaces tactiles dans un plus large éventail de produits électroniques. Les analystes s'accordent pour estimer que le marché des écrans tactiles va très fortement progresser ces prochaines années du fait d'une demande dans presque tous les segments de l'industrie informatique.

Le support du multitouch va s'élargir même si les systèmes tactiles à point de contact unique resteront dominants pendant encore un bon moment. Il commence à gagner en visibilité, grâce à l'iPhone et à l'iPod Touch d' Apple, bien sûr, mais aussi via le concept Surface de Microsoft ou sur le TouchPad des ordinateurs Asus Eee PC.

Microsoft, encore, devrait faire entrer le multitouch comme constituant de base de l'interface de la prochaine version de son système Windows Mobile 7. Depuis 2007, presque tous les fabricants de terminaux mobiles se sont tournés vers des modèles à écran tactile ( ou à pavé tactile ), parfois en combinant plusieurs modes, comme le LG KF700, qui fait dans le cumul.

On notera que les interfaces tactiles ont quitté la seule sphère des PDAPhones et des smartphones pour toucher des segments plus larges. Il sera ainsi intéressant de suivre l'évolution d'une société française, Stantum, dans cette voie. Seul Nokia, le leader mondial, fait de la résistance, mais il devrait également se mettre à la mode du tactile d'ici la fin de l'année 2008 ou au début 2009.

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LG KF700, trois modes de saisie : tactile, clavier numérique, molette