Conflits d'idéal

De nombreux jeux d'action estampillés consoles nouvelle génération accusent des scénarios creux, inintéressants, voire complètement prévisibles. Malheureusement, Fracture ne déroge pas à la règle en proposant une trame vue et revue dans de nombreuses productions et autres séries B de bas étage. On se retrouve propulsé en 2161 au plein cœur des États-Unis. Après une fonte des glaces due au réchauffement climatique de plus en plus présent, l'humanité se trouve en état de danger. Le gouvernement américain a décidé d'utiliser la technologie de déformation de terrain pour protéger les côtes du continent d'une inévitable montée des eaux.

Face à cette panique, les États de l'ouest, nommés les « Pacificains » ont commencé à modifier l'ADN humain dans l'unique but de résister aux bouleversements à venir. Les États de l'est, l'Alliance Atlantique, a préféré user de la cybernétique pour sauver la population. Le gouvernement a alors voté des lois visant à annihiler la recherche génétique, jugée trop dangereuse. Les Pacificains ne comptent pas en rester là et tournent le dos à leur pays, continuant promptement leurs sombres expériences.  C'est alors que le pays s'est coupé en deux clans, engendrant une véritable guerre que les médias traitent à outrance. Vous incarnerez Jet Brody, soldat de l'Alliance Atlantique équipé d'une combinaison cybernétique et d'équipements de déformation de terrain. Suivant les commandements de votre chef, vous serez donc en première ligne face à des génomes particulièrement féroces.


Après cette mise en situation, sachez que le scénario ne sera en aucun cas sujet à une quelconque profondeur, le jeu se focalisant essentiellement sur l'éradication des Paficicains. Les quelques rares rebondissements de l'histoire sont totalement prévisibles et surtout mal exploités. On remarquera également que les cut-scenes accusent un réel manque de charisme, soulignées par de sérieux soucis de synchronisation entre les voix et les animations faciales. Encore heureux que le titre s'en tire au niveau de ses impressionnants effets visuels, offrant ainsi parfois du grand spectacle hollywoodien.

Quoi qu'il en soit, la prise en main de Fracture reste globalement cohérente, offrant plusieurs subtilités liées à la déformation du terrain. Les développeurs se sont en grande partie focalisés sur cet aspect du jeu qui, il faut l'admettre, offre la seule réelle originalité parmi la pléthore de jeux d'action à la troisième personne du marché. Malgré tout, cette recette a semble-t-il été trop mise au centre des attentions puisque le reste de la mécanique de jeu se présente sous un aspect bien trop générique. Qui plus est, le titre recèle quelques similitudes avec divers blockbusters du marché.

Du forage efficace ?

Bien que notre héros dispose d'un panel d'armes récupérable tout au long de vos affrontements, vous êtes avant tout équipé d'un Distordeur, le couteau suisse du terraforming. C'est avec cette arme que vous pourrez créer des dômes et des cratères à même le sol. La zone d'entraînement du début du jeu explique d'ailleurs bien les premières utilisations possibles de cet outil, permettant par exemple de passer dans des tunnels enterrés ou au contraire gravir une muraille élevée. Vous constaterez bien assez vite que le Distordeur sera la clé de nombreuses énigmes. Il faudra par exemple surélever des générateurs pour les désactiver, déplacer des débris pour supprimer des champs de force, voire combiner avec une arme de gel pour bloquer des réacteurs. Seulement, on regrettera que ces contributions soient trop peu nombreuses, surtout que le potentiel était clairement intéressant.


Malgré tout, l'outil sera complémentaire aux armes conventionnelles lorsque vous affronterez les Pacificains. Vous pourrez par exemple jouer de la déformation de terrain pour créer un dôme en guise de couverture, ou encore écraser les ennemis au plafond si l'environnement se veut propice à cette utilisation. Fort malheureusement, il n'est possible d'altérer que les terrains à base de terre, laissant de larges zones impossibles à déformer. Ainsi, n'espérez pas pouvoir détruire les objets que vous désirez, les quelques rares décors susceptibles d'être démolis clignoteront, réduisant ainsi davantage le potentiel qu'aurait pu avoir le soft. Au fur et à mesure de votre cheminement, votre chef vous offrira gracieusement des amplifications améliorant la résistance de votre armure et de vos coups au corps à corps, mais ajouteront également des pouvoirs supplémentaires tels que la possibilité de faire un double saut et de créer une onde de choc.

Afin d'agrémenter les possibilités du terraforming, quatre grenades différentes pourront être utilisées. Tandis que les grenades tectoniques et subsoniques permettent respectivement de soulever et d'abaisser le sol pendant l'explosion, les grenades pitons peuvent créer de véritables colonnes de magma. Ces dernières seront très utiles pour accéder à des endroits surélevés, ainsi que pour rehausser certains décors tels que des ponts détruits et autres blocs de béton dissimulant des passages souterrains. Enfin, la grenade vortex, la plus destructrice, émet un véritable tourbillon magnétique qui s'accélère de façon exponentielle, aspirant éléments du décor et ennemis avant d'exploser violemment. Cette dernière amusera les plus vicieux d'entre-nous et ce, malgré le fait qu'on ne peut en transporter qu'une seule à la fois (et les réapprovisionnements se veulent rares).


Au niveau de l'arsenal « classique », on retrouve bien évidemment deux mitraillettes (Bulldog et Pacificaine), un fusil Raptor particulièrement efficace, un lance-roquettes Bangalore, un fusil à pompe Invader, ainsi qu'un sniper Scorpion expéditif. Au rayon des armes plus exotiques, on retrouvera le lance-grenades Veuve Noire et son déclenchement manuel, un ST-4 qui expédie des torpilles souterraines, voire un pistolet magnétique utile pour déplacer des objets. Malheureusement, le jeu se montre extrêmement avare en munitions pour les armes les plus jouissives, nous forçant irrémédiablement à nous tourner vers l'utilisation de l'arsenal de base pendant une bonne partie de l'aventure.

À ce sujet d'ailleurs, sachez que la progression se veut poussive, le jeu manquant sérieusement de profondeur. Même si on s'amuse lors des première minutes à dézinguer du Pacificain à tour de bras, sachez que le côté répétitif alimentera une certaine lassitude, accusant un côté trop fouillis des affrontements, une IA des ennemis complètement aux fraises et d'ailleurs un bestiaire clairement pas inspiré. En effet, tous les ennemis étant des génomes, on se retrouve à fracasser des humanoïdes aux combinaisons foncièrement similaires, seule l'arme en leur possession et éventuellement leur structure permettra de les reconnaître. Certes, une poignée d'ennemis cassent légèrement la morosité : certains s'entourent d'un champ de force rougeâtre et disposent du pouvoir des grenades pitons, d'autres disposent du réplique exacte du Bio Rifle d'Unreal Tournament, quelques rares spécimens pourront également se déplacer instantanément et... c'est à peu près tout. La seule « originalité » du bestiaire se situera au niveau des insectes rappelant fortement le passage des ant-lions d'Half-Life 2 (ils sortent également du sable). Plus loin dans le jeu, on se frottera à des ennemis plus imposants, gabarit qui servira d'ailleurs de base au boss de fin, tout aussi prévisible que sa taille. De plus, les génomes déboulent par vagues bien distinctes d'un point bien précis. Avouez que ça gâche fortement l'intérêt.

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Charisme au placard

Vous l'aurez compris, Fracture s'est focalisé uniquement sur le hype de la déformation du terrain, laissant malheureusement un gameplay dénué de subtilités en parallèle. Qui plus est, les possibilités de leur système n'ont pas été suffisamment poussées, bien que le potentiel était clairement présent. On aurait bien aimé une gestion plus poussée des modifications du terrain sans avoir une restriction de hauteur et de profondeur hautement frustrante. Le jeu manque également en capacités tactiques, surtout par le nombre impressionnant d'ennemis à QI d'huître qui sillonnent les niveaux. Le joueur, trompé sur ses possibilités, se contentera finalement de foncer tête baissée, l'attaque au corps à corps étant clairement plus expéditive qu'une quelconque utilisation du Distordeur et autres grenades.

Au niveau de la réalisation générale, le titre de Day 1 Studios s'en sort correctement, mais pas sans mal. Le moteur offre un rendu de bonne facture, ainsi qu'une très bonne gestion de la physique lors des déformations de terrain. Cependant, force est de constater que ça rame lors des scènes en extérieur, et que le titre comporte une poignée de bugs. Pour illustrer de dernier point, il n'a pas été rare que je me confronte à des ennemis emmurés, ou à une barre de bouclier bloquée à zéro. De plus, certains chargements entre les cut-scenes et les phases de jeu offrent parfois des plans de vue malvenus. Bref, on sent que l'optimisation n'a pas été des plus approfondies, bien que certains passages se veulent très pertinents. Le level design se montre quant à lui de qualité assez honorable, proposant certains environnements bien élaborés. Néanmoins, on appréciera la modélisation des vaisseaux parfois impressionnants, bien que le frame rate perde pour le coup en efficacité.


Soyons clair : Fracture n'est pas un jeu de longue durée. En effet, la trame solo se plie en plus ou moins cinq heures, ce qui est affreusement léger. Pour profiter d'un rapport heure / prix honorable, je ne peux que vous conseiller de débuter au moins par le mode normal, le premier niveau de difficulté étant clairement trop simpliste, surtout que notre héros dispose d'un système de récupération automatique à l'image de Brothers in Arms : Hell's Highway (accéder au test) ou plus spécifiquement Halo 3. Pour relancer de l'intérêt au soft, le mode multijoueur jusqu'à 12 simultanément propose divers types de partie intéressants. Outre les éternels Deathmatch, Team Deathmatch, Capture the Flag, on notera la présence du mode Conquête bien connu des amateurs de Battlefield, ainsi que les modes Intrusion et Excavation. Tandis que le premier mode nécessite de prendre possession du bunker de l'équipe adverse, le second propose de contrôler plusieurs zones sur la carte. La subtilité réside dans le fait qu'il faut user du Distordeur pour déterrer les balises et y bâtir des colonnes de magma. Plus ces dernières restent dressées, plus l'équipe marque des points.

Au final, que dire de ce Fracture ? Il s'agit d'un jeu d'action à la troisième personne affreusement classique et assez maladroit dans la mise en œuvre de son système de terraforming. Un cruel manque de possibilités allié à une progression ennuyeuse, frustrante et répétitive fait que le titre reste clairement en deçà de ce qui se fait chez la concurrence. Rien n'est clairement mauvais dans la production de Day 1 Studios - si ce n'est les quelques soucis d'optimisation -, mais les arguments d'originalité ne sont pas pour autant légion. Le multijoueur, bien que fourni en modes de jeux, ne fait que confirmer l'aspect primitif du gameplay. Qui plus est, difficile de cumuler 12 joueurs dans une partie, les serveurs demeurant peu alimentés en utilisateurs et ce, même quelques jours après sa sortie. Le titre se destine donc à un public en mal de jeux d'action nouvelle génération, prêt à se frotter à quelques frustrations et à une durée de vie au ras des pâquerettes.

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Fracture est disponible à l'achat à partir de 42,80 €.

+ Les plus

  • Particulièrement défoulant
  • Graphiquement honnête
  • Certaines armes originales
  • Le multijoueur et ses nombreux modes
  • Concept de terraforming bien imaginé...

- Les moins

  • ... mais trop peu exploité et bridé
  • Scénario creux
  • Cut-scenes pauvres
  • Synchronisation labiale à l'ouest
  • IA aux fraises
  • Durée de vie très faiblarde
  • Bestiaire impersonnel
  • Bugs récurrents