Colore la vie

Parler de Flower est un plaisir en même temps qu'un exercice pouvant s'avérer bien inutile. Car même des mots bien choisis ne pourront se substituer fidèlement aux sensations ressenties manette en main. D'apparence, le titre de thatgamecompany (auteurs de flOw) représente un parfait jeu "aquarium", celui qu'on laisse tourner en fond histoire de diffuser une ambiance calme et apaisante dans la pièce où il tourne. Il serait toutefois trompeur de ne s'en tenir qu'à son aspect visuel, certes fort attrayant, chatoyant, envoûtant, mais pas déterminant. Les yeux sont bien sûr essentiels pour capter une des composantes du voyage auquel vous convie Flower. Mais pour apprécier le périple comme il se doit, il vous faudra lâcher la bride de vos autres sens, les laisser aller à la rencontre de ce monde magique créé dans le but de vous émerveiller.

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Flower ne ressemble pas à un jeu vidéo. Comprenez par là que ses codes ne sont pas ceux des softs de la masse. En vous lançant dans ce titre, tout juste vous indique-t-on que pour se déplacer, il vous faudra incliner votre manette dans diverses directions, et afin d'avancer (en soufflant plus exactement), presser sur n'importe quel bouton. Peut-on faire plus basique ? Flower ne s'encombre pas de paillettes, fait l'impasse sur le superflu pour se concentrer sur le principal : l'appel au rêve. Dit comme cela, l'expression peut paraître pompeuse. Certains parmi vous ne seront peut-être pas de ceux qui aduleront le titre, mais soyons clair : rien que le titre du soft et un screenshot seraient suffisants pour déterminer si oui ou non l'aventure vous tente, vous attire. Bien évidemment, il faut vivre le jeu pour en récolter la pleine teneur, mais celui-ci ne vous aura pas pris en traître si vous vous y essayez.

Pour un monde meilleur

Curieux, intriguant, prenant, Flower l'est assurément. Preuve qu'il n'est pas toujours besoin d'inonder le joueur de cinématiques parfois rébarbatives pour l'immerger dans un univers crédible. On commence assez fébrilement. Les premiers pas se font quelque peu hésitants, l'écran étant vierge d'inscriptions en tous genres censées nous aider. Mais dès lors qu'on a appuyé sur un bouton, on prend le contrôle d'un pétale de fleur s'étant détaché de celle-ci. Ou plutôt, on dirige un courant d'air. Il ne parle pas, ne dispose pas d'une poitrine avantageuse, ni d'armes de destruction massive, et ne fait pas des bonds de trois mètres de haut pour épater la galerie. Mais il sèmera derrière lui des sourires, des joies innocentes, des sentiments purs, et rien que pour ça, on ne saurait lui en vouloir de ne pas avoir d'Overdrive.

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Votre réflexion ne sera certainement pas mise à contribution lors de vos sessions de Flower. Tout y est instinctif. Pour avancer, il vous faudra toucher de votre brise des fleurs auréolées de bleu, rouge et jaune (entre autres), et ce afin de leur permettre d'éclore. Rarement vous perdrez votre temps à les chercher. Il pourra arriver que votre regard ne les trouve pas du premier coup d'oeil ; mais en tout cas, il apparaît que Flower ne vous rendra pour ainsi dire à aucun moment nerveux ou impatient. L'ensemble se veut tellement vivant, avec un souffle de vie que l'on sent en permanence de toute part, qu'on peut très bien s'autoriser à profiter de tout cela, sans chercher à atteindre tout de suite l'objectif demandé.

Afin que l'éphémère devienne éternel

On ne se perd jamais vraiment involontairement dans Flower. On décide soi-même de s'y abandonner. La musique, complètement en phase avec l'univers graphique, vous entraîne dans un flot d'émotions qui seront propres à chacun d'entre vous. Qui n'a jamais été sensible aux teintes du soleil sur l'herbe, ou à celles caractérisant la fin d'un après-midi ? Chaque ensemble de fleurs que vous aurez rencontrées en feront apparaître d'autres, tout en recolorant une partie du lieu dans lequel vous vous trouvez. Ou pardon, du niveau, car il est question d'un jeu vidéo ici, rappelons-le. Pour au final, parer ce monde virtuel de ses plus belles peintures.

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Plus haut a été dit que Flower partageait assez peu de similitudes avec les jeux vidéo dits plus "classiques". Une narration peu commune, car exclusivement tournée vers l'image, aucune contrainte si ce n'est celle de parvenir à toucher le plus de fleurs possible, et une ambiance tranchant net avec la plupart des productions actuelles. Flower apaise. C'est d'ailleurs sans doute là sa plus grande force. Pour en revenir à l'aspect sonore, chaque fleur effleurée (hum) délivrera un son, une note, pouvant vous rappeler vos meilleurs moments sur Wii Music, avant que vous ne repreniez vos esprits.

On oublie parfois le but du jeu pour se laisser aller au plaisir de la découverte. Toutes les actions réalisables vous amèneront irrémédiablement à faire le bien. Pas de Game Over, thatgamecompany a privilégié l'expérience pure au challenge. Et ça se sent, les six niveaux se bouclant en quelques heures à peine. Six niveaux (hum bis) où l'intérêt sera sans cesse renouvelé, avec un final grisant. Et je ne vous parle pas des crédits de fin, sans doute parmi les plus originaux (et agréables) qu'il nous ait été donné de voir dans un jeu vidéo.

Un songe à portée de paddle

Il est vrai qu'en une journée, il sera possible d'acheter Flower et de le finir dans les vingt-quatre heures suivantes. Ce qui représente peu, ne nous le cachons pas, surtout que certains considèreront, peut-être à juste titre, que pour moins de 8€ (prix de Flower), d'autres jeux offrent une durée de vie bien plus conséquente. Mais Flower, en ne faisant pas comme tout le monde, ne vous fera pas regretter d'avoir déboursé moins de dix euros pour vous le procurer. Car chaque partie se voudra différente.

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Après avoir terminé le jeu une fois, vous serez peut-être pris d'envie de rendre le monde plus heureux en ne laissant aucune fleur fermée lors de votre seconde balade. D'ailleurs, flâner au milieu des hautes herbes et explorer le terrain de jeu à votre guise débloquera certains trophées, dont certains ne seront pas si évidents à déverrouiller que ça. Il ne vous échappera pas, au terme de l'aventure, que Flower dégage un sentiment de mélancolie. Tout au long du jeu, on assiste en tant qu'acteur à la lutte entre les créations de l'homme et celles de la nature. Et cette impression persiste longtemps après avoir éteint la console. Fermez les yeux après une partie d'à peine trente minutes de Flower, et le rejaillissement du vert devrait instantanément se manifester à votre esprit. Une persistance dont on se se plaindra pas, ma foi.

Un lyrisme exacerbé ?

flower-image Avec 8€, que peut-on s'autoriser à acheter, quand on est un tant soit peu passionné de jeux vidéo ? Il y a les oldies qui nous tendent les bras, mais encore faut-il posséder les machines pour les faire fonctionner. Alors si on est uniquement détenteur de consoles surpuissantes, et plus exactement d'une PS3, pourquoi ne pas laisser sa chance à Flower ? Il serait juste raisonnable de la lui donner en gardant à l'esprit que ces huit euros seront un investissement pour bien plus d'heures de jeu qu'on ne pourrait le penser. Flower n'est pas un jeu parfait. Car en partie court, même s'il est fort plaisant d'y revenir. Faisons le souhait intérieur de voir une suite se matérialiser prochainement.

Flower est disponible sur le PlayStation Store pour la somme de 7,99€.

+ Les plus

  • Une expérience qui a tout pour être inoubliable
  • Un titre reposant
  • Un visuel et une bande son impeccables
  • Pas si cher que ça

- Les moins

  • Maniabilité pas toujours évidente
  • Environnements trop peu nombreux