Quitter la mort pour la combattre

Capcom a décidé de se la jouer grand seigneur, en épargnant la vie de son héros de Bionic Commando, Nathan Spencer, alors que celui-ci allait subir la sentence de la peine de mort après avoir suivi, à tort, les ordres de ses supérieurs par le passé. Oui, Capcom, pour se permettre ainsi de ressortir une de ses anciennes franchises du placard afin de la faire (re)découvrir aux joueurs d'aujourd'hui. La jouabilité antédiluvienne caractéristique du temps jadis en moins. Car il faut contenter tout le monde de nos jours, vous savez. Même si, et nous le verrons, les crises de nerfs à répétition pourront tenir compagnie à vos parties. Et cela bien que pendant les premiers pas que vous ferez avec Nathan, la difficulté présente sera loin de livrer bataille avec la "vieille".

Arrivera ensuite le moment où notre homme mettra la main (la droite, forcément) sur un bras bionique très pratique, puisqu'allant lui permettre de s'agripper à peu près à tout. Il pourra ainsi jouer les filles de l'air en se balançant dans les niveaux de manière assez classe, et de toute manière, le level design du jeu vous y obligera.

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Le joli morceau de piano joué à l'écran-titre nous déstabilise quelque peu, puisqu'il ne véhicule pas l'ambiance attendue dans ce genre de titre, c'est à dire très action. Pourtant, une fois l'aventure débutée, on pénètre dans un univers qui ne dépareillerait pas dans un bon blockbuster hollywoodien, en tirant tout son intérêt de son efficacité, au détriment d'une originalité pas très présente. Qu'importe, le héros de Bionic Commando, avec un caractère qui rappelle, allez au hasard, celui de Snake Plissken (Escape from New York), dégage un charisme suffisant pour qu'on se prenne au jeu.

Manchot, pas bandit (quoique)

Alors vous voilà seul, investi d'une mission dont vous ne vouliez certainement pas, mais qui est le prix à payer pour avoir retrouvé la liberté. Les développeurs de Grin, après nous avoir offert le très bon Bionic Commando Rearmed, ont choisi le parti de vous faire valdinguer dans des environnements où le membre cité plus haut vous autorisera à vous accrocher à des panneaux lumineux publicitaires, des bâtiments... bref, tant que le viseur vous donnera le feu vert, il y aura une chance pour vous d'atteindre ces fournisseurs d'adrénaline. La folie des grandeurs ? Il y a un peu de cela dans Bionic Commando.

D'ailleurs, quand vous entrerez dans la ville d'Ascension pour la première fois, vous serez sans nul doute pris d'envie d'essayer votre nouveau joujou un peu partout. Pour l'anecdote, j'ai été surpris de me rendre compte qu'en tombant, et pas qu'une fois, il ne m'était jamais bien difficile de trouver une autre prise d'attache, dont certaines cèdent toutefois si on joue trop souvent avec elles. Il est donc possible, avec un peu d'entraînement, de bouder le sol. Exaltant.

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Et puis, pas de soucis si vous vous loupez, et entamez une fabuleuse chute libre de vingt mètres, vos bottes magiques vous sauveront toujours la mise. Dans ce cas-là, Spencer serait-il invincible ? Point du tout, même si sa barre de vie n'est pas explicitement visible. En fait, au bout de plusieurs coups reçus par des ennemis, ou si vous venez à être touché par des rayonnements néfastes pour votre santé, l'écran se teintera de rouge, et la seule façon pour vous de revenir à un état stable sera de ne pas vous faire toucher pendant un moment, assez court. Pour éviter de vous faire amocher, votre bras surpuissant sera tout indiqué. On mettra de côté le faible coup de poing droit qui sera juste inutile contre certains monstres en armure, pour  montrer au monde entier (du moins, celui du jeu) les fonctions réjouissantes de votre biceps gauche du futur.

20 000 lieues dans les airs

Vous traverserez au début du jeu un tutorial où vous retrouverez et dirigerez Super Joe (héros de Commando). Ce que vous allez devoir principalement maîtriser, c'est le grappin qui se trouve dans votre bras nouvellement acquis. Car sans lui, vous vous retrouverez bien désemparé devant une large étendue d'eau ou une zone de radiations. Passer par les airs sera donc en de nombreuses fois LA solution, et en arrivant à s'accommoder de la caméra pas évidente à dompter, se promener dans les niveaux pourra petit à petit devenir synonyme d'un certain fun. Mais ça ne se fera pas sans volonté et persévérance, car il vous arrivera sûrement d'enchaîner les décès à cause d'une mauvaise visibilité des points susceptibles de recevoir votre grappin. Les objets pourront aussi être agrippés pour être balancés sur la tête de méchants, ou de murs fissurés qui n'ont rien demandé à personne.

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En revanche, on pestera sûrement moins de mourir sous les balles des soldats bioniques, un headshot suffisant à se débarrasser d'eux si on s'y prend bien. L'esquive aussi est un mouvement qui pourra trouver son utilité. Cela étant dit, et pour en revenir aux échecs que vous ne compterez fatalement plus au bout d'un moment, l'endroit où votre personnage sera ramené dans ces cas-là se montrera parfois bien éloigné du lieu de votre mort.

Sans parler des lourds temps de chargement qui surviendront alors et qui ajouteront un peu plus à l'énervement. Et vu que les niveaux sont grands et truffés de moyens de trépasser, il faudra faire attention à ses mouvements, ce qui vous conduira pendant les premières heures à ne pas vous risquer sans cesse à vous balancer au bout de votre grappin pour terminer sur un saut des plus périlleux. On ressent bien la marge de progression dans Bionic Commando, et les moins patients, s'ils veulent prendre leur pied de suite, pourront ne pas apprécier.

Des sensations rares

Il n'empêche, le jeu nous laisse un goût curieux dans la bouche qu'on peine à identifier. D'un côté, le titre de Capcom possède une réelle identité, avec des graphismes très corrects et une action plaisante pour peu qu'on accepte de passer outre la frustration pendant un certain temps. De l'autre, l'intrigue est peu présente, rendant le déroulement du jeu pas vraiment palpitant pendant les premières heures. Les boss se feront aussi désirer, alors qu'au vu des possibilités du gameplay, on s'attendrait à en affronter très vite. Mais non. Rallier un point B à partir d'un point A en jouant les hommes-araignées, tout en exterminant la vermine armée, résumera vos premières parties. Mais même si ces phases sont agréables à jouer, les recommencer sans cesse pour de bêtes erreurs n'aidera pas à faire preuve de patience en attendant que le jeu nous serve une bonne surprise au détour d'un évènement, d'une cinématique.

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Alors on pourra se rabattre sur le multijoueur, qui vous proposera des deathmatchs seul ou en équipe, ainsi qu'une capture de drapeaux. Classique. Il ne sera pas toujours aisé de trouver des partenaires de jeu, d'autant plus qu'il faudra faire preuve de patience une fois que ceux-ci seront réunis avant que les festivités ne commencent. Les habitués du genre y trouveront sans doute leur compte, mais l'intérêt principal du soft ne se trouve sûrement pas là. Capcom ne l'avait apparemment pas compris, en faisant de cette partie du jeu le coeur de la démo à laquelle les possesseurs de Xbox 360 avaient eu droit.

Certains diront que le jeu dépote au niveau esthétique, mais que d'un plan de vue technique, d'autres softs le supplantent sans trop de mal. Si de temps à autre, on a effectivement cette impression, on notera toutefois que les décors laissent un certain sentiment d'immensité. Et le level design fait tout de même perdre la tête (dans le bon sens), encore faut-il savoir jouer efficacement du grappin pour ne pas enchaîner les décès comme l'EDF de football les contre-performances. Les mauvais choix de direction seront presque aussitôt sanctionnés. Des nuages bleus signes d'une radioactivité néfaste, ainsi que des espaces submergés qui feront office de tombeau si vous ne parvenez pas à vous en extirper à temps.

Bionic Commando peut rappeller Tomb Raider, justement par ces moments où l'on cherche où se diriger, tellement le chemin à parcourir ne s'imposera pas comme une évidence à vos yeux. On comptera ça comme un bon point. Autre comparaison avec le titre d'Eidos, l'alternance entre ces passages où vous abatterez des ennemis très agités de la gachette, et d'autres où votre habileté à virevolter d'un endroit à l'autre vous fera découvrir des décors et ambiances comme on n'a pas souvent l'habitude de voir ces temps-ci.

Taillé pour cette génération ?

bionic-commando-jaquette Finalement, Bionic Commando aura payé le prix de sa non-immédiate accessibilité. Car aux Etats-Unis, le jeu a effectivement fait un four. Peut-être bien que cela doit être imputé au choix curieux d'avoir uniquement proposé un aperçu du mode multijoueur dans la version démo. Ou bien, serait-ce parce que le soft des studios Grin n'a pas été capable d'offrir un plaisir fort d'entrée ? Il ne mérite en tout cas pas tel dédain, assurément. La maniabilité n'est en rien ratée, et délivrera ses secrets assez rapidement, pour peu que le reste du jeu vous passionne. On passe un bon moment avec Bionic Commando, certes pas grâce à son intrigue, mais tout simplement car son essence même est le gameplay, et rien d'autre. En étant bien huilé en plus. Comme Mickael Vendetta.

Bionic Commando est disponible sur PS3 à partir de 58,99€ (mais également sur Xbox 360 et PC).

+ Les plus

  • Comme au temps des 16 bits...
  • ... place à l'action !
  • Un level design que l'on salue
  • Une marge de progression appréciable

- Les moins

  • Comme au temps des 16 bits...
  • ... mais en plus cher et pas assez développé
  • Beaucoup de décès à prévoir, la difficulté aidant
  • Des premières parties frustrantes
  • Les temps de chargement