Ultime péripétie donc quand on se souvient que, en décembre 2006, le Sénat avait rejeté cette proposition. Or, le 1er février 2007, lors d’une séance assez tardive (vers 23h50), l’Assemblée Nationale a approuvé le principe du crédit d’impôts réservé aux entreprises qui font du jeu vidéo leur gagne-pain.


Une bouée de sauvetage
C’est dans le cadre de l’examen du texte de loi sur « la modernisation de la diffusion audiovisuelle et télévision du futur » qu’un amendement concernant ledit crédit d’impôts a été adopté par les députés. Ce crédit d’impôts couvre 20% des coûts de production mais dans une limite de 3 millions d’euros par exercice fiscal.

Apparemment, c’est l’aspect culturel et artistique du domaine des jeux vidéo qui aurait séduit les députés de la Chambre basse. A cet effet, le président de la commission des affaires économiques à l'Assemblée, Patrick OLLIER, a eu le très bon réflexe de s’interroger : « Qui pourrait prétendre aujourd'hui que les jeux vidéo ne constituent pas des oeuvres multimédia de création artistique ' »

De plus, Patrick OLLIER reconnaît que ce secteur demeure fragile. En 1994, l’industrie vidéoludique employait environ 25 000 personnes tandis qu’en 2005, ce chiffre n’était que de 12 000. Simultanément, le nombre de studios de développement a été divisé par quatre.


Plus compétitif à l’international
Dans une certaine mesure, ce crédit d’impôts devrait soulager l’industrie, et cet avis est partagé par Geoffroy SARDIN, le directeur général d'Ubisoft France : il avouait récemment à nos confrères du mondeinformatique.fr que cette mesure « redonne un coup de fouet à la compétitivité de la production française et réduit la distorsion avec les studios basés à l'étranger, notamment au Canada et en Asie ».

De son côté, Guillaume de Fondaumière, le président de l'APOM (Association des Producteurs d'Oeuvres Multimédia) ne peut qu’être soulagé : « C’est un signe d’encouragement très fort pour l’ensemble de l’industrie française du jeu vidéo. [...] Je salue aussi la détermination du Ministre de la Culture et de la Communication. Monsieur Renaud Donnedieu de Vabres a été le premier Ministre de la Culture à reconnaître le jeu vidéo comme faisant partie de notre patrimoine culturel et à nous soutenir dans notre engagement pour sauver une industrie française chancelante. [...] Nous espérons que la Commission de la Concurrence de Bruxelles pourra rendre rapidement son avis sur la mesure afin qu’elle soit mise en application dans les prochains mois ».

Or, il se murmure que cet amendement au sein de la loi sur « la modernisation de la diffusion audiovisuelle et télévision du futur » ne serait qu’un tour de passe-passe afin de faire passer une aide étatique à l’industrie vidéoludique comme une action dédiée à la promotion culturelle et artistique. Sur ce point, la position de la commissaire européenne à la Concurrence, Neelie KROES est notoire : « nous devons nous assurer que cette mesure a vraiment pour objectif de promouvoir d'authentiques projets culturels et n'est pas un instrument de politique industrielle en faveur du secteur des jeux vidéo ».


Chers présidentiables, vous trouverez ci-jointe une liste de doléances

En d’autres mots, ce crédit d’impôts ne serait qu’un cadeau électoral. Il faudra donc attendre l’avis de la Commission de la Concurrence de Bruxelles. Mais pour le moment, l’industrie en général se réjouit de cette décision politique : « on obtient enfin une reconnaissance, notre industrie n'est pas secondaire, elle est aujourd'hui considérée comme oeuvrant à part entière dans l'univers culturel. L'adoption de l'amendement à l'unanimité renforce d'autant plus ce point de vue », dixit Geoffroy SARDIN.

Le DG d’Ubisoft va même, chiffres à l’appui, affirmer que les productions vidéoludiques sont devenues « le premier bien culturel en France avec 1 milliard d’euros de chiffre d'affaires et 35 millions d'exemplaires vendus ». Geoffroy SARDIN annonce aussi que cet amendement redynamisera l’embauche dans ce secteur : « Quand le mécanisme sera validé par la Commission européenne - ce qu'elle a fait il y a plusieurs années pour les productions cinématographiques - nous effectuerons entre 100 et 150 embauches annuelles supplémentaires […] on a les meilleurs créatifs en France, on a des formations de troisième cycle liées à la production de jeux vidéo qui existent depuis plus de 10 ans. Au lieu d'aller à l'étranger, ces gens vont pouvoir rester ».

La balle est désormais dans le camp de l’Union Européenne. Quitte à faire le difficile : si le gouvernement voulait vraiment aider le secteur du jeux vidéo, une exonération pure et simple d’impôts ne serait-elle pas plus opportune qu’un simple crédit de 20% ' Mais comme on est en pleine campagne électorale, c’est le moment ou jamais de demander des choses, n’est-ce pas Mesdames et Messieurs les présidentiables '