Aux Etats-Unis, les plaintes des grandes compagnies du disque et du cinéma contre les internautes qui téléchargent illégalement des fichiers se multiplient. Outre-Atlantique, on regarde avec un certain scepticisme s’engager le débat au sein de notre Assemblée Nationale…

Alors que la RIAA (Recording Industry Association of America) et la MPAA (Motion Pictures Association of America), soit les représentants respectifs de l’industrie du disque et de celle du cinéma aux Etats-Unis, rivalisent d’ingéniosité pour attaquer en justice les internautes qui se livrent au téléchargement de fichiers pirates, en France, une poignée de députés, en pleine nuit, refusent d’entériner un projet de loi pénalisant au sens strict du terme l’échange des mêmes fichiers.

Le gouvernement français pensait que le vote de son projet de loi ne serait qu’une formalité, un ‘’slam dunk’’, comme on dit outre-Atlantique. Mais les représentants du peuple en ont décidé autrement, en trop petit nombre cependant pour enterrer définitivement le projet. Il sera débattu à nouveau vers la mi-janvier 2006, devant un hémicycle plus rempli, sans doute, et un vote formel aura alors lieu. Qu’ils soient ou non désavoués par le Sénat n’a que peu d’importance, puisque le texte de loi reviendra devant les députés en deuxième lecture, amendé ou non.

Aux Etats-Unis, on assiste à cette passe d’arme d’un air mi-amusé, mi-inquiet, car la France est en quelque sorte l’arbre qui cache la forêt du P2P (peer-to-peer) : d’autres pays européens vont devoir se prononcer sur ce thème dans les prochains mois, et la Cour européenne de Justice pourrait de toute façon adopter une position plus consensuelle que celle qui prévaut en Amérique. La notion de propriété intellectuelle est prise très au sérieux de l’autre côté de l’Atlantique, mais jusqu’ici, aucune plainte pénale n’a abouti : toutes les affaires ont été, soit réglées à l’amiable, soit tranchées par des juridictions civiles, les seules à même de juger ce genre de plaintes aux yeux de la justice américaine.

Chez nous, ce sont les juridictions pénales qui sont systématiquement saisies, notamment pour contre-façon (un délit grave, punissable d’une peine d’emprisonnement de trois ans, et d’une amende pouvant aller jusqu’à 300.000 euros), mais ce qui frappe le plus les esprits, ici comme là-bas, c’est le fait que pour la première fois depuis la réelection de Jacques Chirac en 2002, la majorité parlementaire UMP n’a pas voté un projet de loi présenté par le gouvernement.

Pendant que les représentants des artistes français se déchirent autour du projet de licence légale—qui prévoit le paiement d’une taxe mensuelle sensée couvrir les téléchargements légaux de fichiers musicaux et vidéo--, les associations de consommateurs estiment que tout le monde aurait à gagner à une résolution amiable du problème, ce à quoi la SACEM (Société des Auteurs et Compositeurs de Musique), fondée en 1851, n’a pour l’instant rien répondu.

En 2004, la SACEM a reversé aux artistes qui y étaient inscrits 578 millions d’euros en royalties diverses et variées. On touche là au fond du problème...