A l'heure où des critiques s'élèvent contre le degré médiocre de sécurité de la technologie RFID, le fabricant de vêtements Levi's tente une expérience pour améliorer la gestion des stocks de ses revendeurs.


Marché aux puces...
D'ordinaire, lorsqu'un bien destiné à la revente arrive chez un détaillant, c'est à ce dernier qu'il incombe de l'étiqueter et de l'enregistrer dans le stock de l'entreprise, afin d'assurer ce que l'on appelle le réassortiment de la boutique. Cette opération est longue, et entraîne parfois des erreurs, d'autant qu'elle s'effectue au moyen de codes-barres édités sur place. Chaque magasin a sa propre codification, ses propres tarifs, ses propres marges, etc... Et bien entendu, chaque détaillant peut, à un moment ou à un autre, décider de brader certains articles pour assurer la rotation de son stock. Conscient des problèmes de logistique que ces procédures entraînent, Levi & Strauss, que nous connaissons tous sous son petit nom, Levi's, a décidé d'agir en amont, en lançant une opération grandeur nature, et en dotant de puces RFID certains de ses articles, dont le fameux jeans 501.


Dresseur de puces
Dans un premier temps, et à des fins d'expérience, Levi's a choisi un magasin américain, pour l'instant anonyme, en fonction de sa représentativité, tout en confirmant à la presse que les grandes chaînes d'hyper-marchés comme Wal-Mart ou Target Corp (l'équivalent des Carrefours chez nous) ne seront pas concernés par ces envois, dans la mesure où elles implémentent leur propre politique en matière d'étiquetage par RFID. Levi's réalise 80% de ses ventes outre-Atlantique via dix réseaux de distribution, dont les deux poids lourds évoqués plus haut.

Grâce à la RFID, dès la sortie de ses entrepôts, Levi's espère aider les distributeurs à mieux gérer leurs stocks, puisqu'à chaque vente d'article, le grossiste dont dépend le détaillant sera immédiatement averti par voie informatique. Les statistiques d'activité commerciale seront affinées, et le réassortiment des stocks accéléré. Reste que la RFID est une technique plus onéreuse que le code-barre, sans que l'on puisse--ou veuille--vraiment la chiffrer. Un des grands spécialistes de la question, TAGSYS, estime qu'elle est la plus appropriée lorsque le prix des articles au détail atteint ou dépasse 25 dollars US.


"Big Brother is watching you. And he's wearing blue-jeans..."*
Se pose également la question du respect de la vie privée, puisqu'il semble que Levi's se soit orienté vers une puce non-amovible. Elle restera donc attachée au produit qu'achètera le consommateur, ce qui réactive chez certains le spectre d'un "1984" à la sauce du 21ème siècle. Une quarantaine d'associations américaines de respect des libertés individuelles ont appelé à la signature d'un moratoire entre industriels et gouvernement, afin de garantir que la technologie RFID ne sera pas utilisé pour localiser les citoyens à leur insu.

En 2003, déjà, la branche américaine de Benetton avait fait les frais d'une des premières implantations de puces RFID dans certains de ses articles : lorsque le public avait eu vent de l'affaire, la marque Sisley du fabricant italien avait été durablement boudée, au point d'être temporairement retirée du marché US.

Gageons que Levi's aura retenu la leçon...



* "Big Brother vous regarde. Et il porte un blue jean..."



Source : InformationWeek