Le retour du yakuza

Je vais tout d'abord vous faire un aveu : je n'ai pas joué au premier Yakuza. Oui, c'est fort regrettable et non, ça ne nuit pas tant que ça à la compréhension de ce deuxième volet. Au tout début de l'aventure, un long flashback vous est d'ailleurs proposé, découpé en plusieurs parties, et vous avez le choix de vous (re)plonger dans les évènements de Yakuza premier du nom ou non. Et ce ne sera pas de trop, tant il est utile pour la suite de l'histoire de connaitre les raisons qui ont fait se rencontrer Kazuma Kiryu et la petite Haruka, et ce qui a fait qu'on les retrouve dans un cimetière, se recueillant devant les tombes de certains de leurs proches.

Kazuma a fait trois rencontres qui ont changé sa vie, il y a de cela une dizaine d'années. Nishiki Akura, qui est devenu bien plus qu'un frère de sang pour lui ; Sawamura Yumi, une hôtesse dont Kazuma s'est épris, et enfin Fuma Shintaro, qui lui a permis d'entrer dans le clan très fermé des Tojo. Ces trois personnages ont trouvé la mort dans des circonstances tragiques, et tout ce qui restait à Kazuma , c'était une petite fille errant dans les rues à la recherche de sa mère, qui se trouvait être Yumi, alors disparue. Un signe du destin sans doute, et depuis, ils ne sont sont plus quittés, Kazuma ayant juré de veiller sur Haruka et de mettre son passé de yakuza au placard.

Malheureusement, il n'est point facile d'occulter d'avoir fait partie d'une telle famille, et il lui est demandé, pour ce deuxième épisode de Yakuza, de se rendre à Osaka afin de rencontrer le clan Kansai et de mettre un terme aux tensions qui pourraient déclencher une guerre des gangs dans tout le Japon.

Ce qui donne lieu à des cinématiques passionnantes, où les différents protagonistes se meuvent de manière très réaliste, le tout servi par un scénario qui se dévoile au fil des chapitres (les premiers sont assez courts, pour un total de seize) et qui se révèle de plus en plus intéressant. L'envie de lâcher sa manette ne pointe donc pour ainsi dire jamais le bout de sa truffe humide.

Les ressources d'une mourante

Même s'il ne semble pas différer tant que cela de son grand frère, Yakuza 2 ne peut qu'inspirer le respect par sa réalisation classieuse. Animation réaliste, différents effets graphiques qui immergent encore un peu plus dans l'atmosphère du soft, sans compter les visages tous très expressifs, dont ceux des yakuza et autres malfrats, très typés et donc attachants. L'aliasing se fait en outre assez discret, et la Playstation 2 affiche tout ceci sans vraiment sourciller. Lors des déplacements en ville, le passage d'un secteur à un autre se fait par un bref chargement qui ne devrait pas provoquer de crises de nerfs.  Ce qui amène à ce que le sentiment de vie qui se dégage des quartiers où Kazuma mettra les pieds soit d'ailleurs franchement impressionnant.


A ce propos, on sera soulagé de constater qu'il n'est pas utile, à la différence de tant d'autres jeux d'aventure, de tapoter incessamment sur le bouton croix pour parler à chaque badaud que vous rencontrerez; les personnes désireuses d'entretenir une discussion avec vous auront une icône jaune au-dessus de leur tête. En passant près d'eux, vous aurez même le loisir d'entendre, ou plutôt de lire ce qu'il disent, renforçant une fois encore l'immersion. Ultime preuve de cette sensation de vivre au milieu d'un ensemble vivant, quand vous viendrez à entrer en collision avec un passant (et ça vous arrivera sûrement plus d'une fois), ils ne resteront pas inertes mais réagiront vraiment comme si vous veniez de les bousculer, en vous regardant bizarrement.

Le choix des armes

Notre yakuza retraité se prend en main assez bien, sans toutefois atteindre des sommets de jouabilité. Au niveau du gameplay, on se retrouve avec des phases de combat qui occupent une place non négligeable dans le jeu, étant donné que le simple fait de passer devant un type donnera à celui-ci une raison suffisante pour venir vous provoquer, et récolter la plupart du temps une bonne raclée (car vous êtes très fort). Quelques techniques de combat vous seront données dans des tutoriaux qui vous permettront  de vous familiariser avec les commandes (enchainements, coups en arrière, chopes...). Dans les originalités, signalons la présence d'une barre de fureur en haut à gauche de l'écran, qui une fois remplie vous autorisera à délivrer un coup très douloureux pour votre adversaire : il vous suffira de l'empoigner grâce au bouton Rond et de le diriger vers un obstacle, ensuite, une simple pression sur Triangle et la pauvre victime que vous teniez entre vos mains devra ramasser ses dents dispersées par terre. Et plus loin dans l'aventure, il arrivera qu'un comparse vous prête main forte lors de vos joutes.


Au cours de sa quête pour la paix entre les clans, Kazuma aura l'occasion de faire un petit tour dans diverses enseignes, dont une supérette très sympathique où il pourra, par votre intermédiaire, se procurer des dessous féminins. Pour certains, ce détail sera suffisant pour conférer à Yakuza 2 le titre de meilleur jeu du monde.  Pour les autres, ils apprécieront la variété des articles mis en vente (okonomiyaki, ramen, nourriture pour chien pour ce qui est de l'alimentation), le droit de draguer des hôtesses et de pouvoir ensuite échanger vos adresses e-mail, si vous leur avez tapé dans l'oeil, et pour finir l'augmentation de niveau de plusieurs de vos capacités au fil des combats, avec des points qu'il faudra répartir avec soin.

Des minis-jeux sont eux aussi disponibles. Vous trouverez ainsi dans les clubs SEGA, entre autres, l'assez spécial YF6, de MA2 (clin d'œil à peine déguisé à Virtua Fighter et l'AM2, responsables du développement du soft). Dans ce jeu de combat à la première personne dans une ambiance rappelant étrangement le film Tron, le pistolet et le sabre laser seront vos meilleures (et seules) armes pour sortir vainqueur des différents combats que vous aurez à mener. Une curiosité plus qu'autre chose, mais qui pourra trouver ses fans.

La voix du respect

Figurant parmi les derniers grands jeux qui permettent encore aux rayons PS2 des enseignes spécialisées d'exister, mais le support commençant petit à petit à se marginaliser, Yakuza 2 n'aura pas bénéficié du soin apporté au premier volet. Exit donc les voix américaines et la localisation textuelle en français, place à la V.O. parlée et à l'anglais écrit. Pour ce qui est des textes, le niveau requis n'est pas si élevé que ça (même si le langage employé est bien souvent cru), il vous faudra en tout cas en saisir une bonne partie si vous tenez à ne pas perdre une miette du scénario, qui n'est pas avare en situations palpitantes.


On se réjouira par contre d'entendre les intervenants du jeu s'exprimer dans la langue de Shigeru Miyamoto. Pourquoi cela n'a pas été fait dans le premier Yakuza, mystère, et ça rappelle ce qu'on avait connu avec Shenmue, un titre qu'on rapproche beaucoup de Yakuza. Des Japonais qui s'exprimaient en anglais, puis des Chinois parlant japonais, c'était à en perdre son latin. Mais il n'y a pas raison de se plaindre ici, puisqu'en plus, cette fidélité à la version originale nous permet de profiter de la synchronisation labiale que les développeurs ont travaillé pour le soft.  Un aspect qu'on aimerait tant voir appliqué à d'autres titres...

L'aspect musical de Yakuza 2 ne souffre d'aucun reproche, avec une partition comportant notamment du rock et du jazz. Les genres musicaux cohabitent à merveille, l'action étant habilement soulignée par des musiques dans le ton. Les mélomanes apprécieront la participation de Norihiko Hibino (Metal Gear Solid) et Hideki Sakamoto (Echochrome) à la bande-son.

Un honneur sauf

On prend ainsi un plaisir conséquent dans la peau de Kazuma Kiryu à atteindre son objectif utopique, tout en donnant des baffes par-ci par-là  aux raclures qui se comptent malheureusement par centaines dans certaines contrées japonaises. On notera que la caméra, manipulable en de nombreux endroits dans le jeu, ne l'est pas lors de passages qui, pourtant, mériteraient un recadrage afin d'éviter de perdre bêtement son temps à retrouver son chemin. La durée de vie s'avère honnête, comptez plus ou moins une vingtaine d'heures pour terminer le jeu en mode normal. Le niveau de difficulté, bien que progressif, n'est par ailleurs pas très retors, ce qui rend le challenge d'autant plus accessible.


 Mais avoir attendu si longtemps avant de pouvoir mettre la main sur Yakuza 2 est-elle une raison suffisante pour bouder son plaisir ? Bien évidemment que non. Le scénario extrêmement bien écrit (si tant est que les histoires de mafia japonaise ne vous laissent pas indifférent), les tas de petites choses à faire à côté, et puis son ambiance mafieuse-asiatique achèvent de faire de Yakuza 2 un incontournable de la PS2 en ces temps de vaches maigres, qui malheureusement, ne devraient pas connaitre de fin. On pourra toujours reprocher à Sega d'avoir pris son temps pour l'amener chez nous, mais ici, on préfèrera lui dire merci pour nous permettre d'éviter d'avoir un train de retard quand l'heure sera venue pour Yakuza 3 de livrer ses charmes...

Yakuza 2 est disponible à partir de 28,56 €.


+ Les plus

  • Enfin en Europe !
  • Une ambiance envoûtante
  • Voix originales japonaises
  • Le prix

- Les moins

  • Seulement maintenant en Europe !
  • Assez peu différent de Yakuza
  • Une traduction française aux abonnés absents