La startup Amogy, issue du MIT, a mis au point un catalyseur capable de transformer l'ammoniac en hydrogène sans combustion, éliminant les émissions toxiques.

Cette innovation ouvre la voie à la décarbonation du transport maritime et de l'industrie lourde, avec des déploiements prévus dès l'an prochain grâce à des partenariats stratégiques majeurs.

Sur le papier, l'ammoniac a tout du carburant idéal. Dense en énergie, sans carbone et bien plus simple à stocker ou transporter que l'hydrogène, il bénéficie déjà d'infrastructures de production et de logistique mondiales.

Cependant, son utilisation massive était jusqu'à présent freinée par deux obstacles de taille : sa combustion directe génère de dangereux oxydes d'azote, et le "craquer" pour en extraire l'hydrogène est un processus énergivore nécessitant des installations complexes.

Le secret : un "craquage" ultra-efficace

Le cœur de l'innovation d'Amogy réside dans un catalyseur propriétaire capable de réaliser le "craquage de l'ammoniac" (la séparation de la molécule NH3 en azote N2 et hydrogène H2) avec une efficacité jusqu'à 70 % supérieure aux systèmes actuels.

En travaillant à des températures plus basses, les quatre fondateurs issus du MIT ont pu utiliser de nouveaux matériaux pour miniaturiser le processus. Surtout, la technologie d'Amogy ne brûle pas l'ammoniac.

Elle l'utilise pour produire de l'hydrogène qui alimente ensuite une pile à combustible ou un moteur adapté. Cette approche ingénieuse contourne totalement le problème des émissions d'oxydes d'azote et ne rejette ni CO2 ni gaz polluants, positionnant l'ammoniac comme un véritable carburant propre.

De la théorie à la pratique : des démonstrations concluantes

Loin de se limiter à la théorie, Amogy a rapidement prouvé la viabilité de son approche en convertissant l'ammoniac en énergie pour alimenter successivement le premier drone au monde en 2021, puis un tracteur, un camion semi-remorque et même un remorqueur. Ces démonstrations à échelle réelle ont validé la scalabilité de leurs systèmes modulaires.

"Personne n'a montré comme nous que l'ammoniac pouvait être utilisé pour propulser des engins de la taille des navires et des camions", affirme Seonghoon Woo, PDG et cofondateur d'Amogy.

L'entreprise a ainsi prouvé que sa solution était non seulement fonctionnelle mais prête à s'attaquer à la décarbonation des secteurs les plus exigeants en puissance.

Une industrialisation déjà en marche

Le passage à l'échelle industrielle est déjà une réalité pour la startup, qui a finalisé son usine de recherche et de production à Houston. Cette ambition est soutenue par des partenariats stratégiques avec des géants comme Samsung Heavy Industries, qui fabriquera les systèmes d'Amogy, mais aussi Saudi Aramco, KBR ou encore Hyundai.

Les premières livraisons clients sont prévues pour l'année prochaine. Un projet pilote d'un mégawatt sera déployé avec la ville sud-coréenne de Pohang en 2026, avec un objectif de 40 mégawatts d'ici 2029.

NH3 Kraken, démonstrateur sous forme de remorqueur

Des dizaines d'autres projets sont en cours de négociation, ciblant en priorité le transport maritime, la production d'électricité, la construction et l'exploitation minière.

Pour ces industries où les batteries électriques ne peuvent rivaliser en termes de densité énergétique et d'autonomie, la solution d'Amogy apparaît comme une alternative crédible.

En rendant l'hydrogène accessible via un vecteur liquide stable à température ambiante, la startup lève l'un des principaux verrous de la transition énergétique pour l'industrie lourde.

Source : MIT