Face à l'activité croissante des sous-marins russes en Atlantique Nord, le Royaume-Uni lance Atlantic Bastion. Ce programme combine navires, drones autonomes et intelligence artificielle pour créer un réseau de surveillance acoustique inédit, destiné à protéger les câbles et pipelines sous-marins vitaux.
Le ministère de la Défense britannique a officialisé le lancement du programme Atlantic Bastion, une initiative stratégique majeure visant à contrer la recrudescence de l'activité sous-marine russe.
Cette annonce intervient dans un climat de tension palpable, où la sécurité des infrastructures sous-marines, comme les câbles de communication et les pipelines, est devenue un enjeu de sécurité nationale pour tout l'Occident.
Un retour aux fondamentaux de la Guerre Froide ?
Le concept d'Atlantic Bastion n'est pas sans rappeler les dispositifs de la Guerre Froide, comme le réseau d'hydrophones SOSUS qui écoutait les sous-marins soviétiques.
La géographie reste la même : le passage stratégique entre le Groenland, l'Islande et le Royaume-Uni, le fameux « GIUK gap », redevient le théâtre principal des opérations de surveillance.
Cependant, la nature de la menace a profondément changé. Les nouveaux sous-marins russes, à l'image du Khabarovsk, bénéficient de technologies de furtivité acoustique avancées qui les rendent quasi inaudibles. L'ancienne méthode de surveillance passive ne suffit plus face à ces véritables fantômes des mers.
Une force hybride pilotée par l'intelligence artificielle
La réponse britannique repose sur une approche hybride, mêlant tradition et innovation. Le programme associera des plateformes conventionnelles, comme les futures frégates de Type 26 et les avions de patrouille P-8 Poseidon, à une flotte grandissante de drones autonomes de surface et sous-marins.
Le planeur SG-1 Fathom, développé par la société Helsing, est l'un des fers de lance de cette nouvelle flotte sans pilote.
Le véritable cœur du système sera un réseau numérique baptisé « Atlantic Net ». Grâce à l'intelligence artificielle, ce maillage de capteurs mobiles pourra détecter, classifier et suivre les menaces en temps réel sur de vastes étendues océaniques.
L'IA sera entraînée sur des décennies de données acoustiques pour identifier les signatures des navires adverses avec une rapidité et une précision inégalées.
Un défi stratégique et des critiques acerbes
Le Premier Lord de la Mer, le général Sir Gwyn Jenkins, a reconnu que l'avantage naval dont jouissait le Royaume-Uni dans l'Atlantique était « en danger ». Il a souligné une augmentation de 30 % des incursions russes ces deux dernières années, incarnées par des navires espions comme le Yantar. Pour faire front commun, Londres a d'ailleurs renforcé sa coopération avec la Norvège via l'accord « Lunna House ».
Malgré les millions de livres déjà engagés, certains experts restent sceptiques. Peter Roberts, du think tank RUSI, qualifie la stratégie de « cache-misère », arguant que la Royal Navy manque de navires pour remplir cette mission de manière crédible et se tourne vers les drones par souci d'économie.
Pour lui, le pays tente de rattraper un retard accumulé après des années de négligence. Le déploiement des premiers dispositifs en mer dès l'année prochaine sera donc un test crucial pour la crédibilité de ce bastion atlantique.