Dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances 2026, la commission des Finances de l'Assemblée nationale a retoqué la suppression des avantages fiscaux sur les biocarburants E85 et B100.

Un revers pour le gouvernement, soutenu par une opposition transpartisane soucieuse de protéger la filière agricole et le pouvoir d'achat. La bataille parlementaire ne fait que commencer.

Au cœur des débats sur le budget, une mesure technique aux conséquences bien réelles. Le projet de loi de Finances pour 2026, présenté par l'exécutif, prévoyait de mettre un terme progressif à la fiscalité avantageuse de deux carburants alternatifs majeurs : le Superéthanol-E85, produit à partir de betteraves et de plus en plus prisé des automobilistes, et le B100, un biogazole à base de colza principalement utilisé par les flottes de transporteurs routiers.

Le projet de loi budgétaire prévoyait de normaliser la taxation de ces carburants, mais la proposition a immédiatement provoqué une vive opposition de toute la filière, transporteurs ayant fait l'effort de convertir leurs véhicules et producteurs de ces biocarburants en tête.

Une levée de boucliers transpartisane

La réaction ne s'est pas fait attendre. Dès l'examen du texte en commission des Finances, ce mardi 21 octobre 2025, les députés ont adopté des amendements pour annuler cette hausse de fiscalité.

L'opposition à la mesure gouvernementale a transcendé les clivages politiques traditionnels. La députée macroniste Anne-Sophie Ronceret a ainsi défendu la nécessité de préserver une filière mobilisant, selon ses dires, plus de 120 000 exploitants agricoles et d'éviter un report des usagers vers des carburants fossiles, plus polluants.

biocarburant biochimie agriculture

L'opposition de des deux bords a fustigé la « brutalité » de la méthode gouvernementale. Elle a mis en garde contre le risque de déclencher une nouvelle crise sociale, évoquant le spectre des « gilets jaunes dans la rue » face à une suppression sèche sans alternatives crédibles.

Pourquoi la filière des transports s'inquiète-t-elle tant ?

Du côté des professionnels de la route, l'annonce a été reçue comme un véritable coup de massue. Les fédérations professionnelles,avaient rapidement exprimé leur vive inquiétude face à une mesure perçue comme une pénalisation de leurs efforts.

Ces investissements ont été réalisés en se basant sur un cadre fiscal stable. Une hausse potentielle de 40 % de la taxation, comme évoquée, rendrait ce modèle économique totalement caduc.

pompe station essence

Selon les transporteurs, le surcoût lié à l'utilisation des biocarburants (consommation supérieure de 10 %, maintenance spécifique) n'est acceptable que grâce à l'avantage fiscal à la pompe. Le supprimer reviendrait à sanctionner ceux qui ont joué le jeu de la transition énergétique (même si un rapport de l'association Transport & Environment les dépeint comme une fausse bonne idée)

Le risque d'un retour en arrière vers le gazole

La conséquence la plus redoutée est paradoxale. Plutôt que d'accélérer la transition, la fin de la niche fiscale pourrait provoquer un retour massif au diesel. Il serait en effet techniquement simple de retirer les kits d'adaptation sur les moteurs pour qu'ils fonctionnent de nouveau exclusivement au gazole.

Le calcul est simple pour les professionnels : si le coût d'exploitation des véhicules verts dépasse un certain seuil, le retour au gazole deviendrait inévitable, anéantissant des années d'efforts et d'investissements.

Cette première manche remportée en commission par les opposants à la hausse n'est cependant qu'une étape. L'examen du projet de loi de finances se poursuit avant l'arrivée du texte dans l'hémicycle ce vendredi.

Les débats repartiront alors de la version initiale du gouvernement, et l'issue de cette bataille fiscale reste donc totalement ouverte. Le gouvernement devra décider s'il maintient sa position ou s'il choisit de lâcher du lest pour éviter une fronde plus large.