L'hégémonie américaine dans l'espace n'est plus une certitude. Un rapport choc, intitulé "Redshift" et commandité par la Commercial Space Federation américaine, tire la sonnette d'alarme : la progression du programme spatial chinois est si fulgurante que l'écart avec les États-Unis se réduit à une vitesse vertigineuse.
Loin d'être un simple suiveur, Pékin est en train de "dicter le rythme", redéfinissant le leadership orbital grâce à une stratégie à long terme qui commence à porter ses fruits.
Comment la Chine a-t-elle orchestré une telle montée en puissance ?
Le tournant a eu lieu en 2014 avec une directive gouvernementale passée presque inaperçue, le "Document 60". Cette politique a ouvert le secteur spatial, jusqu'alors chasse gardée de l'État, aux capitaux privés. Le résultat est spectaculaire : le programme spatial chinois a vu ses investissements commerciaux exploser, passant de 164 millions à près de 2,86 milliards de dollars entre 2016 et 2023.
Cet afflux de capitaux a permis l'émergence d'un écosystème hybride redoutable, où des start-ups agiles collaborent avec des géants publics sous la direction d'une stratégie nationale claire. Aujourd'hui, la Chine compte six bases de lancement et plus d'une douzaine d'entreprises privées développant des lanceurs.
La Chine peut-elle vraiment rivaliser avec SpaceX ?
La réponse est oui, et rapidement. Plusieurs sociétés privées chinoises, comme Space Pioneer, développent activement des fusées réutilisables directement inspirées du Falcon 9. Le lanceur Tianlong-3, par exemple, affiche des capacités similaires à celles de la fusée d'Elon Musk et a récemment réussi un test statique crucial de ses neuf moteurs.
Pour Pékin, le nouvel enjeu est de soutenir le déploiement des méga-constellations de satellites chinoises, comme Guowang, et atteindre une cadence de plus de 30 lancements par an. Sans SpaceX, le nombre de lancements annuels chinois dépasserait déjà celui des États-Unis.
La course à la Lune est-elle déjà perdue pour les États-Unis ?
Le contraste est saisissant. D'un côté, la Chine maintient avec une régularité sans faille son objectif d'envoyer des taïkonautes sur la Lune d'ici 2030. De l'autre, le programme Artemis américain accumule les retards et les dépassements de budget. La mission habitée Artemis 2 est désormais repoussée à 2026, et l'alunissage d'Artemis 3 en 2027 semble de plus en plus irréaliste.
Pendant ce temps, Pékin tisse sa toile diplomatique avec son projet de station de recherche lunaire internationale (ILRS), qui rassemble déjà 17 pays partenaires, dont la Russie. La dynamique semble clairement en faveur de la Chine.
Foire Aux Questions (FAQ)
Qu'est-ce que le "Document 60" ?
Le "Document 60" est une directive clé publiée par le gouvernement chinois en 2014. Elle a autorisé pour la première fois les entreprises privées à investir et à innover dans le secteur spatial, tout en obligeant ces dernières à partager leurs avancées avec le secteur militaire si nécessaire. C'est ce document qui a permis l'essor du "New Space" chinois.
Quels sont les objectifs concrets du programme spatial chinois ?
Les ambitions de la Chine sont multiples : assurer son autonomie d'accès à l'espace, déployer ses propres constellations de satellites pour l'internet et l'observation, établir une présence humaine durable sur la Lune avec une base permanente (le projet ILRS), et à terme, devenir la première puissance spatiale mondiale sur les plans civil, commercial et militaire.
La station spatiale chinoise Tiangong est-elle une menace pour l'ISS ?
La station Tiangong n'est pas une menace directe, mais une alternative stratégique. Alors que la Station Spatiale Internationale (ISS) doit être mise hors service vers 2030, Tiangong pourrait devenir le seul avant-poste orbital habité en permanence, donnant à la Chine un avantage considérable pour la recherche et la coopération internationale dans l'espace.