Un projet de document de la Commission européenne révèle l'intention de bloquer la Chine de pans entiers du programme de recherche Horizon Europe. En cause : les risques pour la propriété intellectuelle et les liens entre universités chinoises et l'appareil militaire de Pékin.
La Commission européenne envisage de prendre des mesures drastiques pour protéger ses intérêts stratégiques. Au cœur des débats : l'accès des institutions chinoises au prestigieux programme de recherche et d'innovation Horizon Europe, doté d'un budget de plus de 95 milliards d'euros.
Les préoccupations grandissantes autour de l'espionnage technologique et du transfert de savoir-faire sensible poussent l'UE à revoir sa copie.
Quels sont les secteurs concernés par cette exclusion ?
Selon un projet de programme de travail pour la période 2026-2027, les entités chinoises seraient exclues de trois des six grands domaines de recherche. Sont directement visés la santé (Cluster 1), la sécurité civile (Cluster 3) et le pôle "numérique, industrie et espace" (Cluster 4).
Cette décision est motivée par une impasse dans les négociations sur une feuille de route de coopération sino-européenne, un dossier où le manque de garanties pour la propriété intellectuelle est un point de blocage majeur depuis 2019.
Des universités chinoises totalement bannies ?
Le tour de vis ne s'arrête pas là. Le document propose un bannissement pur et simple pour toutes les universités supervisées par le ministère de l'Industrie et des Technologies de l'Information en Chine.
Ces institutions, suspectées d'entretenir des liens étroits avec l'armée, seraient jugées incompatibles avec le mandat d'Horizon Europe, qui stipule que la recherche doit avoir des applications exclusivement civiles.
Le groupe des "Sept Fils de la Défense Nationale", un conglomérat d'universités chinoises très orientées sur les applications militaires, serait en première ligne.
Une stratégie de protection de l'autonomie européenne
Cette posture plus ferme s'inscrit dans une volonté claire de la part de Bruxelles de préserver son avance technologique et son autonomie stratégique. La Commission européenne met en avant un "déséquilibre réglementaire fondamental" entre l'UE et la Chine, qui crée des risques inacceptables.
La stratégie chinoise de "fusion civilo-militaire", qui vise à utiliser les avancées technologiques civiles à des fins militaires, est explicitement citée comme une source de préoccupation majeure.
Le Royaume-Uni, qui a réintégré Horizon Europe en 2023, adopte une ligne similaire, limitant sa propre coopération avec Pékin à des domaines jugés "non controversés".
Bien que ce projet ne soit pas encore officiellement adopté, il envoie un signal fort sur le durcissement des relations scientifiques entre l'Europe et la Chine. La question reste ouverte : comment concilier le besoin de collaboration scientifique mondiale sur des enjeux comme le climat avec la nécessité de protéger la sécurité et les secrets industriels européens ? La réponse déterminera l'avenir de la recherche pour les années à venir.