L'hydrogène peut-il être le carburant de demain et un moyen de produire de l'électricité décarbonée pour répondre aux enjeux climatiques de l'Europe ces prochaines décennies ?
La Commission européenne a posé les jalons d'un ambitieux programme qui doit faire de l'Europe un modèle d'utilisation de grandes capacités hydrogène tant produit qu'importé.
Pendant que l'on cherche dans le sous-sol l'hydrogène blanc naturel, des moyens doivent être mis en oeuvre pour produire de l'hydrogène vert, jaune, gris...en fonction de la source d'énergie initiale.
Des objectifs ambitieux, des moyens très insuffisants
Tout ceci est bien beau mais la Cour des comptes de l'UE a épluché le programme européen de l'hydrogène vert (produit à partir d'énergies renouvelables, auxquelles la France voudrait ajouter la production nucléaire) et y voit plus un mirage qu'une réalité à venir, avec un risque de crash par rapport aux objectifs de décarbonation de l'industrie et des transports.
La Cour des comptes estime ainsi que les objectifs fixés de production et d'importation d'hydrogène renouvelable, à savoir 10 millions de tonnes d'ici 2030, sont bien trop ambitieux et manquent de réalité économique.
Elle estime que la stratégie hydrogène européenne n'a pas été suffisamment étudiée en profondeur en terme de faisabilité, avec des objectifs "dictés par une volonté politique, sans reposer sur une analyse rigoureuse".
Pour être vert, l'hydrogène doit être produit par des énergies renouvelables mais le projet européen serait mal dimensionné et nécessiterait de "faire l'objet d'une vérification à l'épreuve de la réalité".
Le coût de l'installation des infrastructures (réservoirs de stockage, réseau d'acheminement) semble avoir été très sous-évalué par les Etats membres et ne colle pas avec les objectifs fixés en haut lieu.
Trop d'incertitudes pour lancer de grands investissements de production
La Cour des comptes note qu'aucun prix de référence n'a été établi pour cet hydrogène vert et que chaque Etat membre a ses propres stratégies qui ne vont pas forcément dans le sens de celle décidée pour l'Union européenne. Par ailleurs, la croissance des moyens de production reste faible du fait des incertitudes qui freinent l'investissement des producteurs dans des moyens conséquents.
Les fonds mis en avant par l'UE sont conséquents mais trop éparpillés sur de multiples projets, ce qui finit par casser la dynamique et ralentir la progression du marché.
Il faudrait donc une stratégie bien plus claire et détaillée pour lever ce manque de visibilité et permettre aux acteurs de se lancer dans l'effort financier qui augmentera franchement les capacités de production d'hydrogène.
La Cour des comptes de l'UE pointe enfin des dysfonctionnements dans une gestion trop bureaucratique qui se perd en réunions et en rapports non suivis d'effets, ralentissant la progression générale du secteur de l'hydrogène en entretenant le flou sur la direction à prendre.