Apple a présenté ses deux nouveaux modèles : l'iPhone 6 et l'iPhone 6 Plus. Deux smartphones immédiatement consacrés par la critique et les chiffres.
Pour le Wall Street Journal, l'iPhone 6 est « le plus confortable des smartphones », pour TechCrunch il s'agit du « meilleur smartphone disponible sur le marché » et l'iPhone 6 Plus est qualifié de « téléphone impressionnant et désirable ».
Des commentaires auxquels les acheteurs ont emboîté le pas : en un week-end les ventes des deux nouveaux smartphones ont dépassé les 10 millions d'exemplaires. Soit le meilleur lancement commercial de l'histoire d'Apple !
Alors qu'un examen rapide de cette compilation de faits et de chiffres peut donner l'impression qu'Apple reste la locomotive de l'innovation, une analyse attentive de l'évolution du secteur et de la place des créations d'Apple dans celle-ci donne le sentiment contraire. Un sentiment dont les marchés ont été les premiers témoins. En effet juste après l'annonce des iPhones 6 et 6 Plus, le cours de l'action d'Apple a littéralement chuté sanctionnant manifestement une mauvaise nouvelle.
Laquelle ? La confirmation que la plus grosse capitalisation boursière au monde est devenue un suiveur de tendances !
Eu égard aux excellents résultats commerciaux enregistrés à ce jour, n'est-il pas excessif d'analyser la séquence récente comme celle de l'arrêt de l'innovation véritable chez Apple ?
Non. Car même avec le lancement de la phablette, de l'intégration de la fonctionnalité NFC, et de l'Apple Watch, la firme de Cupertino n'a pas créé de rupture sur son marché comme elle l'avait fait en inventant l'iPhone ou l'App Store. Elle s'est limitée à entériner trois tendances du marché.
Les phablettes
Les phablettes, à mi-chemin entre le smartphone et la tablette, connaissent un impressionnant succès à travers le monde et leur croissance ne semble pas prête de s'arrêter. La revue de référence, BI Intelligence annonce même qu'il s'agit de la catégorie de smartphones avec le taux de croissance le plus fort et que ses ventes passeront de 35% cette année, à 59% des ventes totales de smartphones en 2019. En lançant son iPhone 6 Plus, la firme à la pomme croquée s'est donc contentée de s'engouffrer dans une voie prometteuse sans innover. Soit une rupture non pas avec le marché mais avec Steve Jobs et sa réticence aux phablettes.
La technologie NFC
Depuis 2011, la technologie NFC est intégrée dans les smartphones. HTC, Huawei, Nokia, Samsung… A l'exception d'Apple quasiment tous les fabricants ont embrassé cette innovation depuis des années. Les chiffres sont éloquents : des puces NFC ont été implantées dans 300 millions de smartphones l'an passé, soit le tiers environ de la totalité des combinés livrés. Comme dans le cas de la phablette, Apple a suivi la tendance au moment où celle-ci semblait la plus mûre. A défaut d'avoir initié le mouvement, Apple se contentera donc d'être celui qui va permettre sa démocratisation.
Les montres connectées
Avec 70% des ventes, Samsung règne sur le marché de la montre connectée. En un an le principal rival d'Apple a conçu trois modèles. Grâce à ce rythme frénétique le sud-Coréen a pris une avance certaine sur son meilleur ennemi dans un marché embryonnaire mais prometteur : deux millions de montres connectées ont été vendues en 2013 et le secteur devrait progresser de 500% cette année selon Strategic Analytics. Afin de ne pas être irrémédiablement distancé, Apple a présenté en toute hâte sa Apple Watch. En toute hâte car la Apple Watch annoncée en Septembre ne sera disponible que “début 2015”.
Ce n'est pas la première fois qu'Apple associe la précipitation au suivisme.
Qui a oublié l'épisode Carplay ? Dans sa course face à l'Android Auto de Google, Apple avait annoncé la disponibilité de cette version de leur OS pour voitures en 2014, avant d'être repoussée sine die.
Plus récemment, c'est même sur son OS, pourtant un des points forts d'Apple, que la firme donne un sentiment de précipitation. Suite à des problèmes sur la première version de son OS 8.0.1, la firme a été contrainte de sortir en urgence une version corrective pour tenter de stopper la chute de son cours de bourse.
Et que dire des ratés de son application Plans qui avait valu à son concepteur, pourtant un temps imaginé comme le successeur de Steve Jobs, d'être licencié ? D'ailleurs, la liste des mésaventures risque de s'allonger après le récent bendgate.
Indiscutablement Apple a pris le risque de se fragiliser, de perdre son aura en quittant l'avant-garde de l'innovation. Pour le moment les conséquences de ce renoncement ne sont pas encore visibles car à la manière d'un rentier Apple vit de son extraordinaire popularité liée à la combinaison de la simplicité, des fonctionnalités avancées et d'un design plaisant.
Et même s'il existe des smartphones réunissant ces caractéristiques, aucun d'entre eux ne le fait comme Apple… Pour le moment.
Mais combien de temps cela pourra-t-il durer ?