Le projet expérimental de réacteur à fusion nucléaire ITER en cours de construction en France, à Cadarache, doit permettre de construire un démonstrateur d'une centrale pouvant produire de l'énergie de la même façon que dans le Soleil et les étoiles, en fusionnant des atomes simples en atomes plus complexes.

C'est la prochaine étape dans la production d'énergie nucléaire, après la fission utilisée dans les réacteurs actuels. Cette dernière est plus facile à mettre en oeuvre mais nécessite des matières premières rares et produit des déchets difficiles à gérer dans le temps.

Avec la fusion, la ressource initiale sera beaucoup plus abondante et la réaction est moins polluante, de même qu'elle ne risque pas de s'emballer comme dans le cas de la fission.

Nouveaux retards pour la mise en service

 Elle nécessite cependant des températures extrêmes pour être initiée puis maintenue. Tout l'enjeu consiste à pouvoir générer des plasmas hyperchauds de 150 millions de degrés capable de vaincre la répulsion entre les noyaux des atomes pour les forcer à fusionner, ce qui génère alors d'immenses quantités d'énergie.

Pendant que des expériences sont menées dans les laboratoires pour trouver les moyens de démarrer la réaction de fusion et la maintenir aussi longtemps que possible, le projet ITER doit constituer le premier réacteur à fusion nucléaire contrôlée qui servira de référence pour de futures centrales à fusion commerciales.

ITER

Les entrailles du projet ITER de fusion nucléaire

Tout ceci est bien beau sur le papier mais la réalisation concrète du projet s'avère très complexe et compliquée par des retards à répétition. Fin 2022, des défauts de soudure sur des pièces essentielles de l'installation avaient déjà obligé à des retards et d'importants surcoûts.

Dans un nouveau point d'étape, le directeur général du projet ITER, Pietro Barabaschi, a fait état de nouveaux retards dans le calendrier qui vont repousser la première production de plasma à 2033 au mieux et la production "d'énergie magnétique complète" à 2036, pour un système qui aurait dû commencer à produire du plasma...en 2025, selon le calendrier initial.

Une facture qui explose mais des enjeux cruciaux

Ce nouveau contre-temps n'est pas sans conséquences financières et il va falloir rajouter 5 milliards d'euros à une facture qui va désormais atteindre 25 milliards d'euros...alors que l'estimation initiale dans les années 2010 était de...6,6 milliards d'euros.

JET plasma tokamak

Plasma hyperchaud dans le tokamak expérimental JET

Si le projet est trop stratégique pour être abandonné malgré l'accumulation de difficultés, il reste à trouver le financement pour cette rallonge. Car dans le même temps, d'autres pays et d'autres organisations avancent sur divers aspects de la fusion nucléaire, de l'amorce de la réaction en optimisant la formation du plasma ou en concentrant des faisceaux laser au maintien de la réaction durant plusieurs secondes et en affinant la production de quantités toujours plus importantes d'énergie.

La fusion nucléaire est attendue comme un moyen de décarboner l'industrie sans les défauts des réactions de fission nucléaire et celui qui saura la développer le premier aura sans doute un coup d'avance sur le reste du monde en se dotant de sources d'énergie faramineuses dans un temps où la consommation d'énergie des services numériques explose, en partie du fait de l'essor de l'intelligence artificielle.

Source : La Tribune / AFP