Le marché du jeu vidéo n'a jamais été aussi saturé, avec plus de 18 000 titres sortis sur Steam rien qu'en 2024. Pourtant, derrière cette abondance se cache une réalité bien plus sobre : la grande majorité des joueurs achète très, très peu de jeux.

Une nouvelle étude de l'institut Circana, un poids lourd de l'analyse de marché, vient de mettre des chiffres sur ce phénomène, et ils sont pour le moins déconcertants. Loin de l'image du joueur boulimique, le consommateur moyen est devenu extrêmement sélectif.

Que révèlent précisément les chiffres de l'étude ?

Cette nouvelle étude, menée par l'institut Circana, dresse un portrait surprenant et contre-intuitif des habitudes de consommation. Les données, issues de leur enquête "Future of Games" pour le troisième trimestre 2025, montrent une concentration extrême des achats. Voici le détail :

  • 33 % des joueurs achètent moins d'un jeu neuf par an (soit, pour beaucoup, zéro).
  • 12 % achètent environ un jeu par an.
  • 18 % achètent environ un jeu tous les six mois.

Call of duty black ops 7

Le calcul est rapide : 63 % des joueurs aux États-Unis achètent deux jeux, ou moins, chaque année. À l'inverse, seule une petite fraction de "hardcore gamers" fait tourner l'industrie. Ils ne sont que 4 % à acheter plus d'un jeu par mois, et 10 % à en acheter un mensuellement. C'est cette minorité de 14 %, qualifiée par l'analyste Mat Piscatella de "hyper-passionnés et insensibles au prix", qui soutient l'essentiel du marché des jeux vendus plein pot.

Pourquoi les joueurs achètent-ils si peu de jeux neufs ?

La première raison, et la plus évidente, est l'explosion du prix des jeux. Le passage quasi généralisé des titres AAA à 70 €, voire 80 €, a logiquement freiné les achats d'impulsion. Quand un seul jeu représente une part non négligeable du budget loisirs, le choix devient drastique.

Upcoming U.S. video game market results from Circana: Coverage Month - Public Release Date Aug (Aug 3 - Aug 30) - Oct 8 Sep (Aug 31 - Oct 4) - Oct 22 Oct (Oct 5 - Nov 1) - Nov 20 Nov (Nov 2 - Nov 29) - Dec 17 Digital Data Sharing Participating Publishers:

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— Mat Piscatella (@matpiscatella.bsky.social) 3 octobre 2025 à 16:49



Mais ce n'est pas tout. Le paysage du gaming a été profondément transformé par l'essor de modèles alternatifs. Les jeux free-to-play, massivement populaires, captent une part énorme du temps de jeu et des dépenses (via les microtransactions). De même, les services par abonnement comme le Xbox Game Pass, même s'ils augmentent aussi leurs tarifs, offrent un accès à des centaines de titres pour un coût mensuel fixe, rendant l'achat à l'unité moins attractif.

Quelles sont les conséquences pour l'industrie du jeu vidéo ?

Cette polarisation du marché a une conséquence directe : les éditeurs concentrent tous leurs efforts sur cette minorité d' "hyper-passionnés", les seuls jugés "insensibles au prix". C'est ce qui explique la multiplication des éditions Deluxe, Gold ou Collector à plus de 100 €, des accès anticipés payants et des bonus de précommande. La stratégie n'est plus de vendre à tout le monde, mais de vendre plus cher à ceux qui achètent déjà.

GTA-6

Cela explique aussi la peur panique des studios à l'idée de sortir leur jeu en même temps qu'un mastodonte comme GTA ou Call of Duty. Si la majorité des joueurs n'achète qu'un ou deux titres par an, il est vital de ne pas être en concurrence frontale avec celui qui captera l'essentiel du budget des consommateurs.

Foire Aux Questions (FAQ)

Cette étude concerne-t-elle uniquement les États-Unis ?

Oui, l'enquête de Circana a été menée sur un panel de joueurs aux États-Unis. Cependant, les tendances de fond comme la hausse des prix des jeux, la popularité des free-to-play et des services d'abonnement sont mondiales, il est donc très probable que les habitudes d'achat en Europe soient très similaires.

Les achats de jeux en promotion (soldes Steam, etc.) sont-ils comptés ?

L'étude parle de la fréquence d'achat de "nouveaux jeux", ce qui est une notion un peu floue. Elle semble se concentrer sur les achats de titres récents plutôt que sur l'accumulation de jeux en promotion. Cependant, elle met surtout en lumière que le budget et le temps des joueurs ne sont pas infinis, quelle que soit la manière dont ils achètent.

Est-ce que cela signifie que l'industrie du jeu vidéo est en crise ?

Pas nécessairement une crise, mais une profonde mutation. L'industrie génère toujours des revenus colossaux, mais ils sont de plus en plus concentrés sur un petit nombre de jeux "live service" et sur les dépenses d'une minorité de joueurs très engagés. Pour les jeux solo de taille moyenne, en revanche, la situation est de plus en plus compliquée pour trouver sa place sur un marché aussi polarisé.