C'est une décision qui transforme l'épargne la plus populaire de France en un levier de souveraineté énergétique. Olivier Sichel, le directeur général de la Caisse des Dépôts (CDC), a confirmé ce jeudi qu'un accord avait été trouvé avec Bercy et EDF pour mobiliser une partie des fonds colossaux du Livret A et d'autres livrets réglementés dans le financement du nouveau programme nucléaire français.
Loin de simplement dormir à la banque, votre épargne pourrait bientôt construire les centrales de demain.
Comment l'épargne des Français sera-t-elle utilisée ?
L'argent que vous déposez sur votre Livret A, votre Livret de Développement Durable et Solidaire (LDDS) ou votre Livret d'Épargne Populaire (LEP) n'est pas conservé par votre banque. Une grande partie (près de 60 %) est centralisée par la CDC au sein du Fonds d'épargne, une manne financière gigantesque de plus de 400 milliards d'euros. Historiquement, la moitié de ce trésor est dédiée au financement de projets d'intérêt général, comme la construction de logements sociaux.
L'accord annoncé prévoit d'élargir cet usage pour inclure le financement des six nouveaux réacteurs EPR2 actés par le gouvernement. Concrètement, la Caisse des Dépôts prêtera de l'argent à long terme pour soutenir ce chantier titanesque, estimé à près de 100 milliards d'euros.
Pourquoi recourir au Livret A maintenant ?
La relance du nucléaire est un projet industriel et financier hors norme. Face à un coût avoisinant les 100 milliards d'euros, l'État cherche des sources de financement stables et à long terme, capables de supporter un chantier qui s'étalera sur plus d'une décennie. Le Fonds d'épargne, avec sa vision d'investisseur de long terme, apparaît comme le candidat idéal.
Cette décision s'inscrit dans un contexte où la souveraineté énergétique est redevenue une priorité absolue. "Le nucléaire fait partie évidemment de notre souveraineté énergétique", a rappelé Olivier Sichel. Utiliser l'épargne nationale pour financer un projet stratégique national est donc une démarche cohérente, qui évite de recourir à des marchés financiers plus volatils ou à des investisseurs étrangers.
Y a-t-il un risque pour mon épargne ?
La réponse est non. Il est crucial de comprendre qu'il ne s'agit pas d'un appel aux dons ou d'un investissement direct des épargnants dans EDF. Votre argent reste garanti par l'État et le taux de rémunération du Livret A ne dépendra en aucun cas des performances du programme nucléaire.
Pour la Caisse des Dépôts, le financement des EPR2 est considéré comme un placement d'avenir, au même titre qu'un hôpital ou une ligne de TGV : un investissement à très long terme, avec une rentabilité modérée mais jugée fiable et stable. Pour l'épargnant, rien ne change. Pour le citoyen, en revanche, ses économies participeront indirectement à la construction des infrastructures énergétiques du pays pour les décennies à venir.
Foire Aux Questions (FAQ)
Quand cette décision sera-t-elle effective ?
L'accord entre la Caisse des Dépôts, Bercy et EDF est acté. Cependant, le montage financier global doit maintenant être présenté à la Commission européenne à Bruxelles pour validation. L'Europe surveille de près les aides d'État, surtout dans le secteur de l'énergie, mais le contexte actuel de relance du nucléaire sur le continent rend un feu vert probable.
Quelle part du Livret A sera utilisée ?
Le montant exact n'a pas été communiqué. Il ne s'agira pas de la totalité des 400 milliards d'euros du Fonds d'épargne, dont la moitié reste fléchée vers le logement social. Le financement du nucléaire viendra puiser dans la seconde moitié, celle habituellement investie dans des titres financiers et des projets d'infrastructure. Le chiffre dépendra des besoins d'EDF et de la maquette financière finale.
Est-ce la première fois que le Livret A finance autre chose que le logement social ?
Non, même si le logement social reste sa mission historique et principale. Le Fonds d'épargne a déjà été utilisé pour financer d'autres projets d'intérêt général, comme la rénovation énergétique, des infrastructures de transport ou des hôpitaux. L'orienter vers la souveraineté énergétique est une évolution logique de sa mission d'investisseur de long terme au service du pays.