C'est officiel. La nouvelle course vers la Lune n'est plus une simple question de drapeaux et d'empreintes de bottes. Le prestige scientifique a cédé la place à une ruée vers l'or bien concrète, avec des contrats à neuf chiffres.
Le coup d'envoi vient d'être donné par un accord commercial stupéfiant : une entreprise finlandaise (Bluefors) a accepté de payer 300 millions de dollars pour acheter une ressource extraite directement de la surface lunaire. Cette ressource ? L'Hélium-3.
Qu'est-ce que l'Hélium-3 et pourquoi vaut-il si cher ?
L'Hélium-3 est un isotope stable de l'hélium. Sur Terre, il est rarissime. Mais sur la Lune, c'est une autre histoire. Bombardée pendant des milliards d'années par le vent solaire, sa surface en regorge.
Cet isotope est convoité pour deux raisons stratégiques : il est considéré comme le carburant "propre" idéal pour de futurs réacteurs à fusion nucléaire, et il est vital pour le refroidissement des ordinateurs quantiques.
Qui sont les acteurs de cette ruée vers l'or ?
L'accord a été signé entre Bluefors, une société finlandaise de cryogénie, et Interlune, une startup américaine qui compte bien devenir le premier mineur lunaire. Pour 300 millions de dollars, Interlune s'engage à livrer 10 000 litres d'Hélium-3. Ils ne sont pas seuls.
Jeff Bezos, avec Blue Origin, veut aussi cartographier les ressources lunaires. Cet écosystème privé s'ajoute à la course géopolitique entre la NASA (retour en 2028) et la Chine (2030), qui visent toutes deux des bases permanentes.
Est-ce vraiment réalisable ?
C'est tout le pari, et il est risqué. L'Hélium-3 n'est pas "abondant" au sens où l'on trouverait des lingots. Il est présent en faibles concentrations. Pour en récolter assez, les excavateurs d'Interlune devront "mâcher" des millions de tonnes de régolithe (la poussière lunaire). Ce minage lunaire représente un coût astronomique.
De plus, la technologie pour l'utiliser (la fusion nucléaire) n'est même pas encore viable sur Terre. Interlune parie que la technologie sera prête quand ses réserves le seront. La startup prévoit d'envoyer une première caméra sur l'atterrisseur Griffin-1 l'année prochaine pour estimer les concentrations réelles.
Au-delà du minage, quel est l'enjeu ?
L'enjeu est géopolitique. Une base lunaire ne peut pas dépendre uniquement de panneaux solaires (la nuit lunaire dure 14 jours terrestres). L'énergie nucléaire est vitale pour la survie. Le premier pays (USA ou Chine) qui installera une source d'énergie fiable sur la Lune pourra, de facto, imposer une "zone d'exclusion" pour raisons de sécurité, et ainsi dicter les règles du jeu pour toutes les futures opérations lunaires.
Foire Aux Questions (FAQ)
L'exploitation de la Lune est-elle légale ?
C'est compliqué. Le Traité de l'Espace de 1967 interdit toute "appropriation nationale" de la Lune ou d'autres corps célestes. Cependant, il est flou sur l'exploitation commerciale des ressources par des entreprises privées. C'est un Far West juridique qui commence.
L'Hélium-3 est-il la seule ressource visée ?
Non. L'autre ressource cruciale est la glace d'eau, dont on pense qu'elle est piégée dans les cratères aux pôles. Cette glace est vitale car elle peut être transformée en eau potable, en oxygène pour respirer, et surtout en carburant pour fusée (hydrogène et oxygène).
Quand ce minage commencera-t-il ?
Interlune espère envoyer un premier "récolteur" sur la Lune l'année prochaine pour tester ses estimations. La commercialisation à grande échelle dépendra des missions Artemis de la NASA et du Starship de SpaceX, qui sont nécessaires pour transporter l'équipement lourd.