La caméra JunoCam, conçue pour capturer des images spectaculaires de Jupiter et de ses lunes, a défié toutes les attentes. Initialement prévue pour fonctionner durant seulement huit orbites autour de la géante gazeuse, elle a tenu bon pendant 34 orbites, bien au-delà des prévisions.
Mais l'environnement jovien est impitoyable. Les champs de radiation y sont les plus intenses du système solaire, et l'unité optique de JunoCam, située hors du "coffre-fort" de titane protégeant l'électronique de la sonde, a commencé à montrer des signes de faiblesse dès la 47e orbite. À la 56e orbite, les images étaient presque toutes corrompues, parsemées de bruit et de lignes horizontales. Le coupable désigné : un régulateur de tension endommagé. Avec la sonde à des centaines de millions de kilomètres de la Terre, une réparation physique était impensable. L'équipe a alors misé sur une méthode audacieuse : l'« annealing », ou recuit.

Sonde Juno

Comment la NASA a-t-elle ressuscité cette caméra à distance ?

L'« annealing » est un processus qui consiste à chauffer un matériau avant de le laisser refroidir lentement. L'idée est que cette chaleur peut réduire les défauts microscopiques, notamment dans le silicium. "Nous savions que le recuit pouvait parfois modifier un matériau comme le silicium au niveau microscopique, mais nous ne savions pas si cela réparerait les dommages", a expliqué Jacob Schaffner, ingénieur en imagerie JunoCam.
L'équipe a commandé au seul chauffage de JunoCam d'élever la température de la caméra à 25 degrés Celsius, bien plus chaud que d'habitude. Les résultats furent spectaculaires : JunoCam a recommencé à produire des images nettes pendant plusieurs orbites. Cependant, la sonde s'enfonçait toujours plus profondément dans les champs de radiation. Vers la 55e orbite, les problèmes sont réapparus. Face à l'imminence d'un survol rapproché de Io, la lune volcanique de Jupiter, l'équipe a tenté le tout pour le tout : pousser le chauffage de JunoCam à son maximum. Contre toute attente, les images ont commencé à s'améliorer drastiquement quelques jours avant le survol du 30 décembre 2023. JunoCam a alors capturé des vues détaillées de la région polaire nord d'Io, révélant des montagnes couvertes de givre de dioxyde de soufre et des volcans inexplorés, une véritable prouesse technique.

Juno

Quelles leçons cette réparation spatiale nous apporte-t-elle pour l'avenir ?

L'expérience de JunoCam ne se limite pas à un simple sauvetage ; elle offre des enseignements cruciaux pour la conception et la maintenance des futurs engins spatiaux. La sonde, alimentée par l'énergie solaire, a déjà effectué 74 orbites autour de Jupiter.
Bien que le bruit d'image soit revenu lors de la 74e orbite, les dérivés de cette technique d'« annealing » ont déjà été appliqués à plusieurs autres instruments et sous-systèmes d'ingénierie de Juno. Scott Bolton, l'investigateur principal de la mission Juno, souligne l'importance de ces découvertes : "Juno nous apprend à créer et à maintenir des engins spatiaux tolérants aux radiations, fournissant des informations qui bénéficieront aux satellites en orbite autour de la Terre." Ces leçons pourraient s'appliquer aussi bien aux satellites de défense et commerciaux qu'à d'autres missions de la NASA, ouvrant la voie à des systèmes spatiaux plus robustes et plus durables, capables de fonctionner dans des environnements extrêmes. 

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Foire Aux Questions (FAQ)

Quelle est la mission principale de la sonde Juno ?


La sonde Juno de la NASA est en orbite autour de Jupiter. Sa mission principale est d'étudier l'origine, l'évolution et la structure interne de la géante gazeuse, ainsi que ses champs magnétiques et son atmosphère.

Qu'est-ce que la technique d'« annealing » utilisée pour réparer JunoCam ?


L'« annealing » (recuit) est un processus expérimental qui consiste à chauffer un matériau (ici, la caméra JunoCam) pendant une période donnée, puis à le laisser refroidir lentement. L'objectif est de réduire les défauts microscopiques causés par les radiations et de restaurer les performances de l'instrument.

Quelles sont les implications de cette réussite pour les futures missions spatiales ?


La réparation réussie de JunoCam fournit des informations précieuses sur la manière de concevoir et de maintenir des engins spatiaux résistants aux radiations. Ces leçons pourront être appliquées à d'autres satellites et missions, permettant de prolonger leur durée de vie et d'améliorer leur fiabilité dans des environnements spatiaux hostiles.