C'est une première mondiale qui se joue aux États-Unis. L'Idaho National Laboratory (INL) a réussi à produire le tout premier lot de combustible à base de sel de chlorure enrichi, destiné à alimenter le premier réacteur à spectre rapide au monde fonctionnant avec cette technologie de pointe.
Il s'agit du plus grand effort de production de combustible du laboratoire depuis plus de trente ans, une véritable renaissance pour le secteur.
Comment cette avancée technologique a-t-elle été rendue possible ?
Le projet, baptisé Molten Chloride Reactor Experiment (MCRE), a franchi une avancée décisive en 2024. Les scientifiques ont mis au point une méthode ultra-efficace permettant de convertir 95% du métal d'uranium en chlorure d'uranium en seulement quelques heures. Auparavant, ce processus complexe prenait plus d'une semaine pour un rendement souvent inférieur à 80%.
Cette optimisation spectaculaire rend désormais la production viable à grande échelle. L'équipe peut maintenant produire un lot complet de 18 kilogrammes en une seule journée, ce qui permettra de fabriquer les 75 lots nécessaires pour que le réacteur puisse atteindre sa criticité et démarrer ses opérations expérimentales.
Quelles sont les promesses de ce nouveau type de réacteur ?
Contrairement aux centrales traditionnelles qui utilisent des barres de combustible solide et de l'eau pour le refroidissement, les réacteurs à sels fondus emploient un carburant liquide. Le principe est simple mais puissant : il permet d'atteindre des températures de fonctionnement beaucoup plus élevées, ce qui améliore drastiquement l'efficacité énergétique et renforce la sécurité intrinsèque du système.
Le MCRE est le fruit d'une collaboration public-privé stratégique, réunissant des acteurs majeurs comme Southern Company, TerraPower, CORE POWER et le Département de l'Énergie américain. Ensemble, ils posent la première pierre d'une nouvelle génération de production d'énergie, plus sûre et plus performante.
Au-delà de l'électricité, quelles applications sont envisagées ?
L'un des potentiels les plus scrutés est sans conteste celui du secteur maritime. Les réacteurs à sels fondus pourraient équiper des navires commerciaux avec une propulsion nucléaire compacte, durable et ne nécessitant que très peu de maintenance.
Cette technologie offrirait la capacité d'effectuer de longs voyages sans aucun ravitaillement, tout en garantissant des opérations à zéro émission de gaz à effet de serre. Don Wood, conseiller technique du projet, évoque la naissance d'un "nouveau secteur nucléaire, mobile, évolutif et transformateur à l'échelle mondiale", capable de redessiner la logistique et l'économie du transport maritime.
Foire Aux Questions (FAQ)
Quand ce réacteur sera-t-il opérationnel ?
Le projet MCRE vise un début des opérations d'ici 2030. Il sera hébergé au sein de la nouvelle installation de pointe LOTUS (Laboratory for Operation and Testing in the United States), actuellement en construction à l'Idaho National Laboratory.
Qui finance ce projet ambitieux ?
Il s'agit d'une collaboration public-privé impliquant des entreprises spécialisées dans l'énergie comme Southern Company, TerraPower, CORE POWER, ainsi que le soutien stratégique et financier du Département de l'Énergie des États-Unis (DOE).
Pourquoi parle-t-on d'un réacteur "à spectre rapide" ?
Un réacteur à neutrons rapides, ou à spectre rapide, utilise des neutrons qui ne sont pas ralentis par un modérateur comme l'eau. Cette particularité permet une bien meilleure utilisation du combustible et offre la capacité de "brûler" des déchets nucléaires de longue vie, les transformant en éléments moins radioactifs sur le long terme.