Le débat a comme origine une proposition de loi du Sénateur Jean Louis Masson. Cette dernière vise  à faciliter l'identification des éditeurs de sites de communication en ligne et en particulier des blogueurs professionnels et non professionnels. Une affaire d'importance donc.

En réaction face à cette privation des libertés, OverBlog, première plateforme de blogs en France, exprime son point de vue sur la question à travers Nicolas Poirier, responsable Juridique de JFG Networks (OverBlog) :

 

 Nous comprenons parfaitement ce désir de procéder à quelques ajustements juridiques dans le but de mieux protéger les éventuelles victimes de propos inexacts, mensongers ou diffamations colportés sur la toile. Cependant, en tant que premier hébergeur de blogs (visités par plus de 10 millions de Français par mois) en France, nous souhaiterions faire partager notre propre expérience pour démontrer que la voie envisagée n'est peut-être pas la meilleure solution pour parvenir à cet objectif louable .

Monsieur le Sénateur Jean Louis Masson relève très justement qu'il est difficile de faire la différence entre un blogueur professionnel, et un blogueur non professionnel, que la loi pour la confiance en l'économie numérique (LCEN) autorise à rester anonyme aux yeux du public, mais pas auprès de son hébergeur à qui il doit communiquer son identité. Cependant, nous pouvons assurer qu’obliger nos concitoyens à révéler aux internautes leur identité au même titre qu'un professionnel n'est pas une solution envisageable.

En premier lieu, avant même d'obliger un internaute à publier ses coordonnées comme un professionnel, il nous semble important de souligner qu'il est aujourd'hui impossible, à partir des informations communiquées par un internaute, d'avoir la certitude absolue que l'identité qu'il a communiqué est réelle.
En effet, à défaut de contraindre les internautes souhaitant éditer un site en ligne de nous communiquer une copie de leur pièce d'identité (sans parler du fait qu'il serait impossible de savoir si la pièce d'identité communiquée est bien la sienne !), les informations d'identification ne peuvent avoir une valeur probante, raison pour laquelle les hébergeurs conservent durant un an les adresses IP (logs de connexions) relevées lors de l'édition de blogs, afin de pouvoir communiquer cette donnée probante aux autorités lorsque réquisitionnées.

En second lieu, s'agissant de l’inquiétude exprimée sur la difficulté à faire publier un droit de réponse, nous pouvons assurer qu'il est beaucoup plus aisé de faire publier un droit de réponse sur un blog que sur un quelconque site de presse classique. Aujourd'hui, la jurisprudence considère que le droit de réponse peut-être valablement exercé par simple commentaire, l'éditeur du blog engageant alors sa responsabilité s'il supprimait ou éditait ce droit de réponse. Par ailleurs, et justement quand l'éditeur du blog n'exécute pas convenablement cette obligation, il est aisé de contacter l'hébergeur pour lui demander de procéder à la publication de ce droit de réponse : s'agissant de notre plateforme, les demandes sont traitées parfois en moins de quelques heures ...

Pour conclure, si l'esprit de ce projet de loi est de protéger mieux nos concitoyens de la diffamation sur internet, il risque par un malheureux effet boomerang, de s'avérer dangereux pour les internautes qui ne diffament pas sur leur blog, mais qui à l'inverse, partagent des bouts de vie, des informations, des recettes de cuisines, des idées de loisirs ... et qui risquent, en révélant leur identité sur internet, d'êtres harcelés par des internautes malintentionnés, et eux, totalement anonymes.
A titre d'exemple très parlant, nombre de sénateurs, députés, sinon ministres, font usage de blogs à titre non professionnel aujourd'hui pour communiquer avec leurs électeurs : nous ne sommes réellement pas persuadés qu'ils seraient enchantés de devoir communiquer leurs coordonnées personnelles sur leurs blogs pour pouvoir continuer cet échange avec les internautes...

Overblog s'engage au quotidien sur ces questions et propose aujourd’hui au Sénateur d'en discuter prochainement pour trouver ensemble les meilleures solutions adaptées à la liberté d'expression des uns, et à la tranquillité des autres.

 

Affaire à suivre, le débat ne faisant que commencer.