La Russie affirme avoir mené un test concluant de son missile de croisière à propulsion nucléaire, le Burevestnik, qui veut effacer la limitation de la portée des missiles intercontinentaux.

Présentée comme une arme à la portée illimitée capable de déjouer toutes les défenses, cette annonce s'inscrit dans un contexte de forte communication stratégique de Moscou face à l'Occident, malgré un développement semé d'embûches et de doutes techniques persistants.

L'annonce a été faite au plus haut niveau de l'État russe. Le chef d'état-major, Valeri Guerassimov, a rapporté au président Vladimir Poutine qu'un test du missile Burevestnik avait été mené à bien, l'engin ayant parcouru 14 000 kilomètres en près de 15 heures.

Présenté comme un "succès final", ce test marquerait une étape décisive avant la préparation de son déploiement au sein des forces armées russes.

Une arme unique au fonctionnement inédit

Connu sous le nom de code OTAN SSC-X-9 Skyfall, le Burevestnik se distingue par sa technologie de propulsion nucléaire. Contrairement aux missiles de croisière conventionnels, qui dépendent de réservoirs de carburant limités, il utilise un petit réacteur nucléaire pour chauffer l'air en continu, lui conférant une endurance théoriquement sans fin et une portée intercontinentale.

missile Burevestnik propulsion nucleaire

Selon les informations russes, cet engin d'environ douze mètres de long est conçu pour voler à très basse altitude, entre 50 et 100 mètres du sol. Cette capacité, combinée à une trajectoire imprévisible, le rendrait extrêmement difficile à détecter et à intercepter par les systèmes de défense antimissile actuels.

Un développement chaotique et controversé

Derrière l'annonce triomphale se cache une histoire de développement bien plus complexe. Depuis 2016, sur une douzaine de tests précédents connus, seuls quelques-uns auraient été partiellement réussis, selon des observateurs occidentaux. Le programme a surtout été marqué par unaccident tragique en août 2019 sur une base militaire de la mer Blanche.

missile Burevestnik propulsion nucleaire evitement

Une explosion lors d'un essai avait coûté la vie à cinq ingénieurs nucléaires de l'agence Rosatom et à deux militaires, provoquant un pic de radioactivité dans la région.

Cet événement a mis en lumière les dangers inhérents à la manipulation d'un réacteur nucléaire en vol et a alimenté le scepticisme des experts quant à la viabilité et la fiabilité d'une telle arme.

Un retour aux concepts de la Guerre Froide ?

La technologie du Burevestnik n'est pas entièrement nouvelle et rappelle un programme américain abandonné : le Project Pluto. Dans les années 1960, les États-Unis avaient développé un concept similaire de missile à propulsion nucléaire avant de le juger trop dangereux et écologiquement risqué, notamment en raison des émissions radioactives continues durant le vol.

L'insistance de la Russie à poursuivre cette voie est perçue comme un message stratégique fort adressé à l'Occident, en plein conflit ukrainien. Il s'agit de démontrer que Moscou reste un concurrent militaire majeur, capable de développer des systèmes d'armes que personne d'autre ne possède.

Pour autant, Vladimir Poutine a lui-même reconnu que des efforts considérables restaient nécessaires avant une mise en service opérationnelle, laissant planer le doute sur le calendrier réel de déploiement de cette arme "invulnérable".