Vous les avez sûrement déjà croisés dans la rue, peut-être en êtes-vous un vous-même sans le savoir. Les smombies, ces piétons zombifiés par leur smartphone, sont devenus en quelques années un véritable phénomène de société. Tête baissée, yeux rivés sur leur écran, ils arpentent nos trottoirs sans prêter attention à leur environnement, au risque de provoquer des accidents ou de se mettre eux-mêmes en danger.

Naissance d'un néologisme révélateur

Le terme "smombie" est apparu pour la première fois en Allemagne en 2015, élu mot de l'année par un jury de linguistes. Cette contraction de "smartphone" et "zombie" illustre parfaitement l'état de déconnexion avec le monde réel dans lequel se trouvent ces utilisateurs compulsifs de téléphones portables. Depuis, le phénomène n'a cessé de prendre de l'ampleur, au point de devenir un véritable enjeu de sécurité publique et d'aménagement urbain.

Smombie 02

Des chiffres alarmants

L'ampleur du problème se mesure à travers des statistiques préoccupantes. Selon une étude menée en 2024, près de 60% des piétons utiliseraient leur smartphone en marchant dans les grandes villes. Plus inquiétant encore, 30% d'entre eux admettraient le faire même en traversant la rue. Ces comportements à risque ont des conséquences directes sur la sécurité :

  • Augmentation de 43% des accidents impliquant des piétons distraits depuis 2020
  • Temps de réaction allongé de 0,5 à 1,5 seconde en cas de danger imminent
  • Champ de vision réduit de 60% lorsqu'on regarde son téléphone en marchant

Face à ces chiffres alarmants, certaines municipalités ont décidé de prendre le taureau par les cornes.

Piétons smartphone 02

Des solutions urbaines innovantes

Plusieurs villes à travers le monde expérimentent des aménagements spécifiques pour s'adapter à cette nouvelle réalité. L'exemple le plus emblématique vient de Chongqing, en Chine, où une "voie pour smombies" a été créée dès 2014. Cette piste de 30 mètres de long, séparée en deux couloirs, permet aux utilisateurs de smartphones de marcher sans risquer de percuter les autres piétons.

D'autres initiatives ont vu le jour depuis :

  • Installation de feux de signalisation au sol à Augsbourg (Allemagne) et à Tel-Aviv (Israël)
  • Mise en place de panneaux d'avertissement à Stockholm (Suède)
  • Création d'une application de réalité augmentée à Séoul (Corée du Sud) pour alerter les smombies des dangers imminents

Si ces solutions peuvent paraître anecdotiques, elles témoignent d'une prise de conscience croissante des autorités face à ce nouveau défi urbain mais aussi d'un phénomène qui semble impossible à enrayer.

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Un débat sociétal

Au-delà des aspects sécuritaires, le phénomène des smombies soulève des questions plus larges sur notre rapport à la technologie et à l'espace public. Certains experts y voient le symptôme d'une société hyperconnectée, où l'addiction au numérique prend le pas sur les interactions sociales réelles.

"Les smombies sont le reflet d'une transformation profonde de nos modes de vie urbains", analyse Marie Durand, sociologue spécialiste des comportements numériques. "Ils nous obligent à repenser l'aménagement de nos villes, mais aussi notre façon d'habiter l'espace public."

D'autres voix s'élèvent pour dénoncer une forme d'infantilisation des citoyens. Faut-il vraiment adapter nos infrastructures à des comportements potentiellement dangereux, au risque de les encourager ? Le débat reste ouvert.

Chongqing rue

Vers une prise de conscience individuelle et collective

Face à l'ampleur du phénomène, la sensibilisation apparaît comme une piste incontournable. Plusieurs campagnes de prévention ont été lancées ces dernières années, mettant l'accent sur les risques liés à l'utilisation du smartphone en marchant. L'objectif : inciter les citoyens à adopter des comportements plus responsables dans l'espace public.

Parallèlement, des initiatives citoyennes émergent pour promouvoir une utilisation plus raisonnée des technologies mobiles. Des "zones sans smartphone" font leur apparition dans certains lieux publics, tandis que des applications de "digital detox" connaissent un succès grandissant.

Le phénomène des smombies nous rappelle que l'évolution de nos usages numériques n'est pas sans conséquence sur notre environnement et nos interactions sociales. À l'heure où nos villes deviennent de plus en plus connectées, il apparaît crucial de trouver un équilibre entre innovation technologique et préservation de l'attention humaine dans l'espace public. La solution passera sans doute par une prise de conscience collective et des efforts partagés entre citoyens, autorités et acteurs du numérique. Reste à savoir si prise de conscience il y aura...