Tribune libre rédigée par Fabrice Coquio, président d’Interxion France

Des milliers de kilomètres de câbles sous-marins forment de véritables autoroutes de l’information en permettant de relier les continents entre eux, et ainsi d’assurer le trafic mondial de données. De telles autoroutes font donc appel à une certaine logistique : en eaux peu profondes, ces câbles sont positionnés le long de tranchées créées dans le sable à l’aide de jets d’eau haute pression ; en grande profondeur, ceux-ci sont simplement « posés » sur les fonds marins.

À l’heure des premiers câbles de télégraphie, le fonctionnement était identique et la technologie semblait avoir trouvé sa place dans cet environnement  peu commun. Une exception a pourtant fait date lors d’un essai réalisé en 1985, le premier câble sous- marin de fibre optique installé par AT&T au large des Îles Canaries ayant subi plusieurs morsures de requin. Entre 1985 et 1987, les attaques se sont intensifiées, et l’on pouvait alors récupérer des dents de requins sur certains câbles.

Contrairement au câble coaxial utilisé jusque-là, le câble utilisé lors de l’essai n'était pas équipé d'un blindage contre les interférences électriques et les requins finissaient par être électrocutés par le courant libéré. Cette situation a été à l’origine de nombreuses coupures jusqu'au développement de câbles équipés d’une protection spécifique.

coupe transversale cable sous marin

Coupe transversale d'un câble sous-marin – Source : Wikipédia

À ce titre, Google, détenteur de plusieurs câbles sous-marins, a choisi de protéger ces derniers avec une enveloppe similaire au Kevlar, une protection qui s’avère nécessaire jusqu’à 1500 mètres, profondeur maximale à laquelle les requins s’alimentent.

  

Mais comment expliquer l’intérêt du squale pour ces câbles ?

Plusieurs hypothèses ont été formulées à ce sujet. La première, soutenue par une communauté de scientifiques, indique que les requins seraient en mesure de capter les émissions électriques émises par les câbles grâce aux récepteurs électromagnétiques qui couvrent leur museau. Ces câbles créeraient donc la confusion pour l’animal qui pensait s’attaquer à une proie plus comestible.

D’autres scientifiques rejettent cette hypothèse et justifient ces attaques par la curiosité du squale. Ainsi, tout élément végétant au fond des mers, qui s’anime et émet des vibrations subirait ces attaques, une théorie appuyée par les bouées, pneus et ancres portant des traces de morsures de requins.

Bien que ces attaques de requins marquent les esprits, elles ne représentent qu’1 % des incidents enregistrés dans le cadre de l’exploitation de câbles sous-marins de fibre optique.  Entre  10  et  15 %  des  dommages  qui  leur  sont  causés  proviennent  de catastrophes naturelles (glissements de terrain ou tremblements de terre), ou résultent des phénomènes de marée. Dans 70 % des cas, ces dégâts sont engendrés par les chaluts et ancres qui accrochent les câbles sur leur passage.