Cisco Systems a bâti sa réputation et son succès sur une offre couplée matériel-logiciel. Ce modèle économique pourrait être sur le point de voler en éclat, et ce serait pour la firme une révolution.


L'un sans l'autre
Le PDG de Cisco Systems, John Chambers, l'a laissé entendre la semaine dernière, à demi-mot : sa société pourrait scinder ses offres logicielles et matérielles, dans le but de mieux satisfaire ses clients, et d'améliorer sa propre rentabilité. John Chambers dresse un constat sans appel : de plus en plus, ses clients intègrent des produits Cisco dans un environnement d'entreprise où la gestion du trafic réseau est confiée à des logiciels tiers, et le fait d'inclure dans les routeurs et commutateurs réseau signés Cisco des programmes qui font redondance donne trop souvent aux clients l'impression de payer deux fois pour la même chose. De plus, les produits Cisco ont gagné en fiabilité, au fil des ans, et les clients les conservent plus longtemps, rendant d'éventuelles mises à jour logicielles plus lucratives pour l'éditeur dans l'hypothèse où elles ne seraient plus intégrées dans le package livré aux entreprises.


Evolution en douceur
Ce changement de stratégie ne se fera pas du jour au lendemain. Chambers estime qu'il faudra au moins cinq ans à sa firme pour parvenir à un compromis satisfaisant pour toutes les parties. Il faudra au préalable faire évoluer la gamme des produits Cisco, et introduire dans les mentalités cette nouvelle donne. Les matériels pourraient être facturés plus chers dans certaines conditions, notamment au travers de contrats de maintenance plus complets, tandis que la plus-value des logiciels installés en sus donnerait aux clients une meilleure visibilité en terme de gestion de leur budget informatique, du fait des durées d'amortissement différentes des matériels et logiciels.

Les budgets des entreprises ne sont cependant pas extensibles à l'infini, et la concurrence risque de s'engouffrer dans la brêche entr'ouverte, aussi Cisco est-il conscient qu'il devra probablement faire un petit effort tarifaire sur ses routeurs et commutateurs réseaux, mais la firme américaine reconnaît déjà qu'elle gagnera à terme plus d'argent en vendant des licences logicielles qu'en équipant les entreprises en matériels sans cesse plus fiables, et donc moins souvent remplacés.

Un délicat exercice d'équilibre...