Enfin on va pouvoir commencer à dégonfler la baudruche lancée par la Mena...
Médiatiques (Libération)
L'âge d'or de l'«hénaurme»
Par Daniel SCHNEIDERMANN
vendredi 26 novembre 2004
Arafat a été empoisonné. Forcément. Comment en douter ? Naïfs que vous êtes.
Qu'est-ce que vous croyez ? Qu'Arafat serait mort d'une banale cirrhose, ou
d'une grippe intestinale ? D'ailleurs, il suffisait de voir la tête du
porte-parole de l'hôpital. Vous vous souvenez ? Dès qu'il installait son
micro, celui-là, on avait compris. Comment ? La France a donné son dossier
médical à son neveu ? Bien sûr. Je l'ai vu à la télé. Il n'avait pas l'air
bien convaincu, le neveu. Ce qu'il a dit ? Je ne sais plus. Que
l'empoisonnement était possible, je crois. Ah oui, aussi qu'aucune trace de
poison n'a été retrouvée. Ça me revient. Attendez, attendez, j'ai bien
écouté. Il a dit exactement «aucune trace de poison connu». Connu. Vous avez
saisi la nuance ? Mais ne vous inquiétez pas, on ne le saura jamais. Trop de
monde dans le coup. Les Israéliens, évidemment. Ceux-là ! On peut compter
sur eux pour inventer des poisons inconnus. Mais aussi des complicités dans
l'entourage d'Arafat. Evidemment, ils y avaient intérêt, à la mort du Vieux.
Plus fort encore. Vous vous souvenez de l'image du petit Mohammed ? Vous
savez, ce gamin de Gaza, qui meurt dans les bras de son père, sous les
balles des soldats israéliens, voici quatre ans. L'image avait été diffusée
par France 2. Eh bien, tout est faux. Vous y avez cru à l'époque ? Naïfs que
vous êtes. Mais oui, faux. Le gamin n'est pas mort. Comparez les photos de
l'enfant enterré avec le visage de la télé, ça saute aux yeux, ce n'est pas
le même. Quant au père, regardez bien l'image : il n'a pas été blessé. Vous
voyez une goutte de sang ? Rien. Une gigantesque manip. Une grande mise en
scène. Je l'ai lu sur l'Internet. Des journalistes ont enquêté quatre ans
sur le sujet. D'ailleurs, j'ai un ami qui a un cousin qui a vu les rushes de
la séquence. On entend les Palestiniens crier : «Tournez», et plus tard :
«On refait la prise !» Mais ne vous inquiétez pas. On ne saura jamais. Trop
de monde dans le coup. Le roi de Jordanie, une grande chaîne française. Ces
Arabes ! On peut compter sur eux pour monter tous les coups tordus pour
influencer l'opinion mondiale.
Rumeurs symétriques. Inévitables, incontournables intoxications de guerre.
Anciennes comme la guerre. Mais dopées par l'Internet. Ainsi, la rumeur sur
la manipulation de l'image de la mort du petit Mohammed s'est-elle fortifiée
en quatre ans. Des sites Internet ont d'abord expliqué, force schémas à
l'appui, que les tirs ne pouvaient pas provenir de la position israélienne.
Mais la thèse n'ayant pas «pris», n'étant pas parvenue à détruire l'impact
de cette image, on a donc tenté de viser plus haut encore. Et quand la
rumeur, ces dernières semaines, revient à Paris par la voie d'une
cyber-agence de presse pro-israélienne, elle revient survitaminée. Il n'est
plus seulement question de contre-expertises balistiques, mais d'une
gigantesque mise en scène hollywoodienne, forcément préméditée, avec
complicités haut placées.
Ces rumeurs de plus en plus énormes, semble-t-il, depuis quelque temps,
jusqu'à flirter avec la rhétorique, l'irréalisme et le terrifiant ricanement
du négationnisme, on se dit que personne n'y croira. Erreur. Plus c'est
gros, mieux ça passe. Il se trouve donc apparemment un député français pour
gober cela et saisir le gouvernement, contraignant France 2 à une réplique
publique. Comme si l'intox de petit calibre avait aujourd'hui moins de
chances de succès que la rumeur «hénaurme». Cette décomplexion peut être un
effet de la rumeur Meyssan, mère de toutes les rumeurs d'aujourd'hui. Si des
centaines de milliers de personnes ont acheté un livre expliquant qu'aucun
Boeing ne s'est écrasé sur le Pentagone le 11 septembre 2001, si donc le
marché existe, alors pourquoi ne pas tenter de lancer sur le marché la
rumeur de la mise en scène de la mort de Mohammed ?
Chaque guerre produit les siennes. Les cercueils des militaires français
morts dans le bombardement de Bouaké étaient vides, insinuent en boucle, en
Côte-d'Ivoire, les médias du camp Gbagbo. Horrible intoxication. Mais guère
plus «hénaurme», après tout, que les énormités auxquelles, pour notre part,
nous pourrions croire. Ces Français réceptifs à la rumeur du Pentagone, de
quel droit se moqueraient-ils des Ivoiriens qui ont cru aux cercueils vides,
lors des obsèques des Invalides ?
Cernés par l'«hénaurme», les médias semblent impuissants. France 2 peut bien
porter plainte, et retourner filmer quatre ans plus tard les blessures du
père de Mohammed, qui correspondent à celles que l'on voit sur la séquence :
on pressent, hélas, que cela ne fera pas taire le cyber-ricanement. Guère
d'autre solution, pourtant. Il est vrai que ces mêmes médias semblent
parfois, par leurs silences ou leurs autocensures, s'ingénier à préparer les
rumeurs de demain. En Côte-d'Ivoire toujours, les affrontements avec l'armée
française auraient fait, selon le gouvernement ivoirien, une soixantaine de
morts civils. «Circulez, il n'y a rien à voir !», claironne pourtant Michèle
Alliot-Marie, dans le silence respectueux des médias français, préparant le
terrain à l'«hénaurme» de demain. On sait d'où naît la rumeur. Elle naît
toujours d'un «circulez, y a rien à voir». Il peut être incarné par un
ministre, un président, ou un porte-parole d'hôpital. Il peut être celui,
multiforme, de la démission des médias américains après le 11 septembre. Il
peut avoir mille visages.
Enfin on va pouvoir commencer à dégonfler la baudruche lancée par la
Mena...
Médiatiques (Libération) L'âge d'or de l'«hénaurme»
Par Daniel SCHNEIDERMANN vendredi 26 novembre 2004
c'est bien du schneidermann : pompeux et sans interêt.....
Bob Mbock
Raphaël a écrit :
Enfin on va pouvoir commencer à dégonfler la baudruche lancée par la Mena...
Médiatiques (Libération) L'âge d'or de l'«hénaurme»
Par Daniel SCHNEIDERMANN vendredi 26 novembre 2004
Arafat a été empoisonné. Forcément. Comment en douter ? Naïfs que vous êtes. Qu'est-ce que vous croyez ? Qu'Arafat serait mort d'une banale cirrhose, ou d'une grippe intestinale ? D'ailleurs, il suffisait de voir la tête du porte-parole de l'hôpital. Vous vous souvenez ? Dès qu'il installait son micro, celui-là, on avait compris. Comment ? La France a donné son dossier médical à son neveu ? Bien sûr. Je l'ai vu à la télé. Il n'avait pas l'air bien convaincu, le neveu. Ce qu'il a dit ? Je ne sais plus. Que l'empoisonnement était possible, je crois. Ah oui, aussi qu'aucune trace de poison n'a été retrouvée. Ça me revient. Attendez, attendez, j'ai bien écouté. Il a dit exactement «aucune trace de poison connu». Connu. Vous avez saisi la nuance ? Mais ne vous inquiétez pas, on ne le saura jamais. Trop de monde dans le coup. Les Israéliens, évidemment. Ceux-là ! On peut compter sur eux pour inventer des poisons inconnus. Mais aussi des complicités dans l'entourage d'Arafat. Evidemment, ils y avaient intérêt, à la mort du Vieux. Plus fort encore. Vous vous souvenez de l'image du petit Mohammed ? Vous savez, ce gamin de Gaza, qui meurt dans les bras de son père, sous les balles des soldats israéliens, voici quatre ans. L'image avait été diffusée par France 2. Eh bien, tout est faux. Vous y avez cru à l'époque ? Naïfs que vous êtes. Mais oui, faux. Le gamin n'est pas mort. Comparez les photos de l'enfant enterré avec le visage de la télé, ça saute aux yeux, ce n'est pas le même. Quant au père, regardez bien l'image : il n'a pas été blessé. Vous voyez une goutte de sang ? Rien. Une gigantesque manip. Une grande mise en scène. Je l'ai lu sur l'Internet. Des journalistes ont enquêté quatre ans sur le sujet. D'ailleurs, j'ai un ami qui a un cousin qui a vu les rushes de la séquence. On entend les Palestiniens crier : «Tournez», et plus tard : «On refait la prise !» Mais ne vous inquiétez pas. On ne saura jamais. Trop de monde dans le coup. Le roi de Jordanie, une grande chaîne française. Ces Arabes ! On peut compter sur eux pour monter tous les coups tordus pour influencer l'opinion mondiale. Rumeurs symétriques. Inévitables, incontournables intoxications de guerre. Anciennes comme la guerre. Mais dopées par l'Internet. Ainsi, la rumeur sur la manipulation de l'image de la mort du petit Mohammed s'est-elle fortifiée en quatre ans. Des sites Internet ont d'abord expliqué, force schémas à l'appui, que les tirs ne pouvaient pas provenir de la position israélienne. Mais la thèse n'ayant pas «pris», n'étant pas parvenue à détruire l'impact de cette image, on a donc tenté de viser plus haut encore. Et quand la rumeur, ces dernières semaines, revient à Paris par la voie d'une cyber-agence de presse pro-israélienne, elle revient survitaminée. Il n'est plus seulement question de contre-expertises balistiques, mais d'une gigantesque mise en scène hollywoodienne, forcément préméditée, avec complicités haut placées. Ces rumeurs de plus en plus énormes, semble-t-il, depuis quelque temps, jusqu'à flirter avec la rhétorique, l'irréalisme et le terrifiant ricanement du négationnisme, on se dit que personne n'y croira. Erreur. Plus c'est gros, mieux ça passe. Il se trouve donc apparemment un député français pour gober cela et saisir le gouvernement, contraignant France 2 à une réplique publique. Comme si l'intox de petit calibre avait aujourd'hui moins de chances de succès que la rumeur «hénaurme». Cette décomplexion peut être un effet de la rumeur Meyssan, mère de toutes les rumeurs d'aujourd'hui. Si des centaines de milliers de personnes ont acheté un livre expliquant qu'aucun Boeing ne s'est écrasé sur le Pentagone le 11 septembre 2001, si donc le marché existe, alors pourquoi ne pas tenter de lancer sur le marché la rumeur de la mise en scène de la mort de Mohammed ? Chaque guerre produit les siennes. Les cercueils des militaires français morts dans le bombardement de Bouaké étaient vides, insinuent en boucle, en Côte-d'Ivoire, les médias du camp Gbagbo. Horrible intoxication. Mais guère plus «hénaurme», après tout, que les énormités auxquelles, pour notre part, nous pourrions croire. Ces Français réceptifs à la rumeur du Pentagone, de quel droit se moqueraient-ils des Ivoiriens qui ont cru aux cercueils vides, lors des obsèques des Invalides ? Cernés par l'«hénaurme», les médias semblent impuissants. France 2 peut bien porter plainte, et retourner filmer quatre ans plus tard les blessures du père de Mohammed, qui correspondent à celles que l'on voit sur la séquence : on pressent, hélas, que cela ne fera pas taire le cyber-ricanement. Guère d'autre solution, pourtant. Il est vrai que ces mêmes médias semblent parfois, par leurs silences ou leurs autocensures, s'ingénier à préparer les rumeurs de demain. En Côte-d'Ivoire toujours, les affrontements avec l'armée française auraient fait, selon le gouvernement ivoirien, une soixantaine de morts civils. «Circulez, il n'y a rien à voir !», claironne pourtant Michèle Alliot-Marie, dans le silence respectueux des médias français, préparant le terrain à l'«hénaurme» de demain. On sait d'où naît la rumeur. Elle naît toujours d'un «circulez, y a rien à voir». Il peut être incarné par un ministre, un président, ou un porte-parole d'hôpital. Il peut être celui, multiforme, de la démission des médias américains après le 11 septembre. Il peut avoir mille visages.
http://u-blog.net/coursApied/
Excellent article.Merci à Daniel Schneidermann et à son attaché de presse Raphaël. ;-)
Raphaël a écrit :
Enfin on va pouvoir commencer à dégonfler la baudruche lancée par la Mena...
Médiatiques (Libération)
L'âge d'or de l'«hénaurme»
Par Daniel SCHNEIDERMANN
vendredi 26 novembre 2004
Arafat a été empoisonné. Forcément. Comment en douter ? Naïfs que vous êtes.
Qu'est-ce que vous croyez ? Qu'Arafat serait mort d'une banale cirrhose, ou
d'une grippe intestinale ? D'ailleurs, il suffisait de voir la tête du
porte-parole de l'hôpital. Vous vous souvenez ? Dès qu'il installait son
micro, celui-là, on avait compris. Comment ? La France a donné son dossier
médical à son neveu ? Bien sûr. Je l'ai vu à la télé. Il n'avait pas l'air
bien convaincu, le neveu. Ce qu'il a dit ? Je ne sais plus. Que
l'empoisonnement était possible, je crois. Ah oui, aussi qu'aucune trace de
poison n'a été retrouvée. Ça me revient. Attendez, attendez, j'ai bien
écouté. Il a dit exactement «aucune trace de poison connu». Connu. Vous avez
saisi la nuance ? Mais ne vous inquiétez pas, on ne le saura jamais. Trop de
monde dans le coup. Les Israéliens, évidemment. Ceux-là ! On peut compter
sur eux pour inventer des poisons inconnus. Mais aussi des complicités dans
l'entourage d'Arafat. Evidemment, ils y avaient intérêt, à la mort du Vieux.
Plus fort encore. Vous vous souvenez de l'image du petit Mohammed ? Vous
savez, ce gamin de Gaza, qui meurt dans les bras de son père, sous les
balles des soldats israéliens, voici quatre ans. L'image avait été diffusée
par France 2. Eh bien, tout est faux. Vous y avez cru à l'époque ? Naïfs que
vous êtes. Mais oui, faux. Le gamin n'est pas mort. Comparez les photos de
l'enfant enterré avec le visage de la télé, ça saute aux yeux, ce n'est pas
le même. Quant au père, regardez bien l'image : il n'a pas été blessé. Vous
voyez une goutte de sang ? Rien. Une gigantesque manip. Une grande mise en
scène. Je l'ai lu sur l'Internet. Des journalistes ont enquêté quatre ans
sur le sujet. D'ailleurs, j'ai un ami qui a un cousin qui a vu les rushes de
la séquence. On entend les Palestiniens crier : «Tournez», et plus tard :
«On refait la prise !» Mais ne vous inquiétez pas. On ne saura jamais. Trop
de monde dans le coup. Le roi de Jordanie, une grande chaîne française. Ces
Arabes ! On peut compter sur eux pour monter tous les coups tordus pour
influencer l'opinion mondiale.
Rumeurs symétriques. Inévitables, incontournables intoxications de guerre.
Anciennes comme la guerre. Mais dopées par l'Internet. Ainsi, la rumeur sur
la manipulation de l'image de la mort du petit Mohammed s'est-elle fortifiée
en quatre ans. Des sites Internet ont d'abord expliqué, force schémas à
l'appui, que les tirs ne pouvaient pas provenir de la position israélienne.
Mais la thèse n'ayant pas «pris», n'étant pas parvenue à détruire l'impact
de cette image, on a donc tenté de viser plus haut encore. Et quand la
rumeur, ces dernières semaines, revient à Paris par la voie d'une
cyber-agence de presse pro-israélienne, elle revient survitaminée. Il n'est
plus seulement question de contre-expertises balistiques, mais d'une
gigantesque mise en scène hollywoodienne, forcément préméditée, avec
complicités haut placées.
Ces rumeurs de plus en plus énormes, semble-t-il, depuis quelque temps,
jusqu'à flirter avec la rhétorique, l'irréalisme et le terrifiant ricanement
du négationnisme, on se dit que personne n'y croira. Erreur. Plus c'est
gros, mieux ça passe. Il se trouve donc apparemment un député français pour
gober cela et saisir le gouvernement, contraignant France 2 à une réplique
publique. Comme si l'intox de petit calibre avait aujourd'hui moins de
chances de succès que la rumeur «hénaurme». Cette décomplexion peut être un
effet de la rumeur Meyssan, mère de toutes les rumeurs d'aujourd'hui. Si des
centaines de milliers de personnes ont acheté un livre expliquant qu'aucun
Boeing ne s'est écrasé sur le Pentagone le 11 septembre 2001, si donc le
marché existe, alors pourquoi ne pas tenter de lancer sur le marché la
rumeur de la mise en scène de la mort de Mohammed ?
Chaque guerre produit les siennes. Les cercueils des militaires français
morts dans le bombardement de Bouaké étaient vides, insinuent en boucle, en
Côte-d'Ivoire, les médias du camp Gbagbo. Horrible intoxication. Mais guère
plus «hénaurme», après tout, que les énormités auxquelles, pour notre part,
nous pourrions croire. Ces Français réceptifs à la rumeur du Pentagone, de
quel droit se moqueraient-ils des Ivoiriens qui ont cru aux cercueils vides,
lors des obsèques des Invalides ?
Cernés par l'«hénaurme», les médias semblent impuissants. France 2 peut bien
porter plainte, et retourner filmer quatre ans plus tard les blessures du
père de Mohammed, qui correspondent à celles que l'on voit sur la séquence :
on pressent, hélas, que cela ne fera pas taire le cyber-ricanement. Guère
d'autre solution, pourtant. Il est vrai que ces mêmes médias semblent
parfois, par leurs silences ou leurs autocensures, s'ingénier à préparer les
rumeurs de demain. En Côte-d'Ivoire toujours, les affrontements avec l'armée
française auraient fait, selon le gouvernement ivoirien, une soixantaine de
morts civils. «Circulez, il n'y a rien à voir !», claironne pourtant Michèle
Alliot-Marie, dans le silence respectueux des médias français, préparant le
terrain à l'«hénaurme» de demain. On sait d'où naît la rumeur. Elle naît
toujours d'un «circulez, y a rien à voir». Il peut être incarné par un
ministre, un président, ou un porte-parole d'hôpital. Il peut être celui,
multiforme, de la démission des médias américains après le 11 septembre. Il
peut avoir mille visages.
http://u-blog.net/coursApied/
Excellent article.Merci à Daniel Schneidermann et à son attaché de
presse Raphaël. ;-)
Enfin on va pouvoir commencer à dégonfler la baudruche lancée par la Mena...
Médiatiques (Libération) L'âge d'or de l'«hénaurme»
Par Daniel SCHNEIDERMANN vendredi 26 novembre 2004
Arafat a été empoisonné. Forcément. Comment en douter ? Naïfs que vous êtes. Qu'est-ce que vous croyez ? Qu'Arafat serait mort d'une banale cirrhose, ou d'une grippe intestinale ? D'ailleurs, il suffisait de voir la tête du porte-parole de l'hôpital. Vous vous souvenez ? Dès qu'il installait son micro, celui-là, on avait compris. Comment ? La France a donné son dossier médical à son neveu ? Bien sûr. Je l'ai vu à la télé. Il n'avait pas l'air bien convaincu, le neveu. Ce qu'il a dit ? Je ne sais plus. Que l'empoisonnement était possible, je crois. Ah oui, aussi qu'aucune trace de poison n'a été retrouvée. Ça me revient. Attendez, attendez, j'ai bien écouté. Il a dit exactement «aucune trace de poison connu». Connu. Vous avez saisi la nuance ? Mais ne vous inquiétez pas, on ne le saura jamais. Trop de monde dans le coup. Les Israéliens, évidemment. Ceux-là ! On peut compter sur eux pour inventer des poisons inconnus. Mais aussi des complicités dans l'entourage d'Arafat. Evidemment, ils y avaient intérêt, à la mort du Vieux. Plus fort encore. Vous vous souvenez de l'image du petit Mohammed ? Vous savez, ce gamin de Gaza, qui meurt dans les bras de son père, sous les balles des soldats israéliens, voici quatre ans. L'image avait été diffusée par France 2. Eh bien, tout est faux. Vous y avez cru à l'époque ? Naïfs que vous êtes. Mais oui, faux. Le gamin n'est pas mort. Comparez les photos de l'enfant enterré avec le visage de la télé, ça saute aux yeux, ce n'est pas le même. Quant au père, regardez bien l'image : il n'a pas été blessé. Vous voyez une goutte de sang ? Rien. Une gigantesque manip. Une grande mise en scène. Je l'ai lu sur l'Internet. Des journalistes ont enquêté quatre ans sur le sujet. D'ailleurs, j'ai un ami qui a un cousin qui a vu les rushes de la séquence. On entend les Palestiniens crier : «Tournez», et plus tard : «On refait la prise !» Mais ne vous inquiétez pas. On ne saura jamais. Trop de monde dans le coup. Le roi de Jordanie, une grande chaîne française. Ces Arabes ! On peut compter sur eux pour monter tous les coups tordus pour influencer l'opinion mondiale. Rumeurs symétriques. Inévitables, incontournables intoxications de guerre. Anciennes comme la guerre. Mais dopées par l'Internet. Ainsi, la rumeur sur la manipulation de l'image de la mort du petit Mohammed s'est-elle fortifiée en quatre ans. Des sites Internet ont d'abord expliqué, force schémas à l'appui, que les tirs ne pouvaient pas provenir de la position israélienne. Mais la thèse n'ayant pas «pris», n'étant pas parvenue à détruire l'impact de cette image, on a donc tenté de viser plus haut encore. Et quand la rumeur, ces dernières semaines, revient à Paris par la voie d'une cyber-agence de presse pro-israélienne, elle revient survitaminée. Il n'est plus seulement question de contre-expertises balistiques, mais d'une gigantesque mise en scène hollywoodienne, forcément préméditée, avec complicités haut placées. Ces rumeurs de plus en plus énormes, semble-t-il, depuis quelque temps, jusqu'à flirter avec la rhétorique, l'irréalisme et le terrifiant ricanement du négationnisme, on se dit que personne n'y croira. Erreur. Plus c'est gros, mieux ça passe. Il se trouve donc apparemment un député français pour gober cela et saisir le gouvernement, contraignant France 2 à une réplique publique. Comme si l'intox de petit calibre avait aujourd'hui moins de chances de succès que la rumeur «hénaurme». Cette décomplexion peut être un effet de la rumeur Meyssan, mère de toutes les rumeurs d'aujourd'hui. Si des centaines de milliers de personnes ont acheté un livre expliquant qu'aucun Boeing ne s'est écrasé sur le Pentagone le 11 septembre 2001, si donc le marché existe, alors pourquoi ne pas tenter de lancer sur le marché la rumeur de la mise en scène de la mort de Mohammed ? Chaque guerre produit les siennes. Les cercueils des militaires français morts dans le bombardement de Bouaké étaient vides, insinuent en boucle, en Côte-d'Ivoire, les médias du camp Gbagbo. Horrible intoxication. Mais guère plus «hénaurme», après tout, que les énormités auxquelles, pour notre part, nous pourrions croire. Ces Français réceptifs à la rumeur du Pentagone, de quel droit se moqueraient-ils des Ivoiriens qui ont cru aux cercueils vides, lors des obsèques des Invalides ? Cernés par l'«hénaurme», les médias semblent impuissants. France 2 peut bien porter plainte, et retourner filmer quatre ans plus tard les blessures du père de Mohammed, qui correspondent à celles que l'on voit sur la séquence : on pressent, hélas, que cela ne fera pas taire le cyber-ricanement. Guère d'autre solution, pourtant. Il est vrai que ces mêmes médias semblent parfois, par leurs silences ou leurs autocensures, s'ingénier à préparer les rumeurs de demain. En Côte-d'Ivoire toujours, les affrontements avec l'armée française auraient fait, selon le gouvernement ivoirien, une soixantaine de morts civils. «Circulez, il n'y a rien à voir !», claironne pourtant Michèle Alliot-Marie, dans le silence respectueux des médias français, préparant le terrain à l'«hénaurme» de demain. On sait d'où naît la rumeur. Elle naît toujours d'un «circulez, y a rien à voir». Il peut être incarné par un ministre, un président, ou un porte-parole d'hôpital. Il peut être celui, multiforme, de la démission des médias américains après le 11 septembre. Il peut avoir mille visages.
http://u-blog.net/coursApied/
Excellent article.Merci à Daniel Schneidermann et à son attaché de presse Raphaël. ;-)
guymichel
excellent!? VOUS AVEZ DU LIRE Très VITE "Bob Mbock" a écrit dans le message de news:
Raphaël a écrit :
Enfin on va pouvoir commencer à dégonfler la baudruche lancée par la Mena...
Médiatiques (Libération) L'âge d'or de l'«hénaurme»
Par Daniel SCHNEIDERMANN vendredi 26 novembre 2004
Arafat a été empoisonné. Forcément. Comment en douter ? Naïfs que vous êtes. Qu'est-ce que vous croyez ? Qu'Arafat serait mort d'une banale cirrhose, ou d'une grippe intestinale ? D'ailleurs, il suffisait de voir la tête du porte-parole de l'hôpital. Vous vous souvenez ? Dès qu'il installait son micro, celui-là, on avait compris. Comment ? La France a donné son dossier médical à son neveu ? Bien sûr. Je l'ai vu à la télé. Il n'avait pas l'air bien convaincu, le neveu. Ce qu'il a dit ? Je ne sais plus. Que l'empoisonnement était possible, je crois. Ah oui, aussi qu'aucune trace de poison n'a été retrouvée. Ça me revient. Attendez, attendez, j'ai bien écouté. Il a dit exactement «aucune trace de poison connu». Connu. Vous avez saisi la nuance ? Mais ne vous inquiétez pas, on ne le saura jamais. Trop de monde dans le coup. Les Israéliens, évidemment. Ceux-là ! On peut compter sur eux pour inventer des poisons inconnus. Mais aussi des complicités dans l'entourage d'Arafat. Evidemment, ils y avaient intérêt, à la mort du Vieux. Plus fort encore. Vous vous souvenez de l'image du petit Mohammed ? Vous savez, ce gamin de Gaza, qui meurt dans les bras de son père, sous les balles des soldats israéliens, voici quatre ans. L'image avait été diffusée par France 2. Eh bien, tout est faux. Vous y avez cru à l'époque ? Naïfs que vous êtes. Mais oui, faux. Le gamin n'est pas mort. Comparez les photos de l'enfant enterré avec le visage de la télé, ça saute aux yeux, ce n'est pas le même. Quant au père, regardez bien l'image : il n'a pas été blessé. Vous voyez une goutte de sang ? Rien. Une gigantesque manip. Une grande mise en scène. Je l'ai lu sur l'Internet. Des journalistes ont enquêté quatre ans sur le sujet. D'ailleurs, j'ai un ami qui a un cousin qui a vu les rushes de la séquence. On entend les Palestiniens crier : «Tournez», et plus tard : «On refait la prise !» Mais ne vous inquiétez pas. On ne saura jamais. Trop de monde dans le coup. Le roi de Jordanie, une grande chaîne française. Ces Arabes ! On peut compter sur eux pour monter tous les coups tordus pour influencer l'opinion mondiale. Rumeurs symétriques. Inévitables, incontournables intoxications de guerre. Anciennes comme la guerre. Mais dopées par l'Internet. Ainsi, la rumeur sur la manipulation de l'image de la mort du petit Mohammed s'est-elle fortifiée en quatre ans. Des sites Internet ont d'abord expliqué, force schémas à l'appui, que les tirs ne pouvaient pas provenir de la position israélienne. Mais la thèse n'ayant pas «pris», n'étant pas parvenue à détruire l'impact de cette image, on a donc tenté de viser plus haut encore. Et quand la rumeur, ces dernières semaines, revient à Paris par la voie d'une cyber-agence de presse pro-israélienne, elle revient survitaminée. Il n'est plus seulement question de contre-expertises balistiques, mais d'une gigantesque mise en scène hollywoodienne, forcément préméditée, avec complicités haut placées. Ces rumeurs de plus en plus énormes, semble-t-il, depuis quelque temps, jusqu'à flirter avec la rhétorique, l'irréalisme et le terrifiant ricanement du négationnisme, on se dit que personne n'y croira. Erreur. Plus c'est gros, mieux ça passe. Il se trouve donc apparemment un député français pour gober cela et saisir le gouvernement, contraignant France 2 à une réplique publique. Comme si l'intox de petit calibre avait aujourd'hui moins de chances de succès que la rumeur «hénaurme». Cette décomplexion peut être un effet de la rumeur Meyssan, mère de toutes les rumeurs d'aujourd'hui. Si des centaines de milliers de personnes ont acheté un livre expliquant qu'aucun Boeing ne s'est écrasé sur le Pentagone le 11 septembre 2001, si donc le marché existe, alors pourquoi ne pas tenter de lancer sur le marché la rumeur de la mise en scène de la mort de Mohammed ? Chaque guerre produit les siennes. Les cercueils des militaires français morts dans le bombardement de Bouaké étaient vides, insinuent en boucle, en Côte-d'Ivoire, les médias du camp Gbagbo. Horrible intoxication. Mais guère plus «hénaurme», après tout, que les énormités auxquelles, pour notre part, nous pourrions croire. Ces Français réceptifs à la rumeur du Pentagone, de quel droit se moqueraient-ils des Ivoiriens qui ont cru aux cercueils vides, lors des obsèques des Invalides ? Cernés par l'«hénaurme», les médias semblent impuissants. France 2 peut bien porter plainte, et retourner filmer quatre ans plus tard les blessures du père de Mohammed, qui correspondent à celles que l'on voit sur la séquence : on pressent, hélas, que cela ne fera pas taire le cyber-ricanement. Guère d'autre solution, pourtant. Il est vrai que ces mêmes médias semblent parfois, par leurs silences ou leurs autocensures, s'ingénier à préparer les rumeurs de demain. En Côte-d'Ivoire toujours, les affrontements avec l'armée française auraient fait, selon le gouvernement ivoirien, une soixantaine de morts civils. «Circulez, il n'y a rien à voir !», claironne pourtant Michèle Alliot-Marie, dans le silence respectueux des médias français, préparant le terrain à l'«hénaurme» de demain. On sait d'où naît la rumeur. Elle naît toujours d'un «circulez, y a rien à voir». Il peut être incarné par un ministre, un président, ou un porte-parole d'hôpital. Il peut être celui, multiforme, de la démission des médias américains après le 11 septembre. Il peut avoir mille visages.
http://u-blog.net/coursApied/
Excellent article.Merci à Daniel Schneidermann et à son attaché de presse Raphaël. ;-)
excellent!?
VOUS AVEZ DU LIRE Très VITE
"Bob Mbock" <CpasCelleLa@no.spam.ptbar> a écrit dans le message de news:
30om54F33l9hiU1@uni-berlin.de...
Raphaël a écrit :
Enfin on va pouvoir commencer à dégonfler la baudruche lancée par la
Mena...
Médiatiques (Libération)
L'âge d'or de l'«hénaurme»
Par Daniel SCHNEIDERMANN
vendredi 26 novembre 2004
Arafat a été empoisonné. Forcément. Comment en douter ? Naïfs que vous
êtes.
Qu'est-ce que vous croyez ? Qu'Arafat serait mort d'une banale cirrhose,
ou
d'une grippe intestinale ? D'ailleurs, il suffisait de voir la tête du
porte-parole de l'hôpital. Vous vous souvenez ? Dès qu'il installait son
micro, celui-là, on avait compris. Comment ? La France a donné son
dossier
médical à son neveu ? Bien sûr. Je l'ai vu à la télé. Il n'avait pas
l'air
bien convaincu, le neveu. Ce qu'il a dit ? Je ne sais plus. Que
l'empoisonnement était possible, je crois. Ah oui, aussi qu'aucune trace
de
poison n'a été retrouvée. Ça me revient. Attendez, attendez, j'ai bien
écouté. Il a dit exactement «aucune trace de poison connu». Connu. Vous
avez
saisi la nuance ? Mais ne vous inquiétez pas, on ne le saura jamais. Trop
de
monde dans le coup. Les Israéliens, évidemment. Ceux-là ! On peut compter
sur eux pour inventer des poisons inconnus. Mais aussi des complicités
dans
l'entourage d'Arafat. Evidemment, ils y avaient intérêt, à la mort du
Vieux.
Plus fort encore. Vous vous souvenez de l'image du petit Mohammed ? Vous
savez, ce gamin de Gaza, qui meurt dans les bras de son père, sous les
balles des soldats israéliens, voici quatre ans. L'image avait été
diffusée
par France 2. Eh bien, tout est faux. Vous y avez cru à l'époque ? Naïfs
que
vous êtes. Mais oui, faux. Le gamin n'est pas mort. Comparez les photos
de
l'enfant enterré avec le visage de la télé, ça saute aux yeux, ce n'est
pas
le même. Quant au père, regardez bien l'image : il n'a pas été blessé.
Vous
voyez une goutte de sang ? Rien. Une gigantesque manip. Une grande mise
en
scène. Je l'ai lu sur l'Internet. Des journalistes ont enquêté quatre ans
sur le sujet. D'ailleurs, j'ai un ami qui a un cousin qui a vu les rushes
de
la séquence. On entend les Palestiniens crier : «Tournez», et plus tard :
«On refait la prise !» Mais ne vous inquiétez pas. On ne saura jamais.
Trop
de monde dans le coup. Le roi de Jordanie, une grande chaîne française.
Ces
Arabes ! On peut compter sur eux pour monter tous les coups tordus pour
influencer l'opinion mondiale.
Rumeurs symétriques. Inévitables, incontournables intoxications de
guerre.
Anciennes comme la guerre. Mais dopées par l'Internet. Ainsi, la rumeur
sur
la manipulation de l'image de la mort du petit Mohammed s'est-elle
fortifiée
en quatre ans. Des sites Internet ont d'abord expliqué, force schémas à
l'appui, que les tirs ne pouvaient pas provenir de la position
israélienne.
Mais la thèse n'ayant pas «pris», n'étant pas parvenue à détruire
l'impact
de cette image, on a donc tenté de viser plus haut encore. Et quand la
rumeur, ces dernières semaines, revient à Paris par la voie d'une
cyber-agence de presse pro-israélienne, elle revient survitaminée. Il
n'est
plus seulement question de contre-expertises balistiques, mais d'une
gigantesque mise en scène hollywoodienne, forcément préméditée, avec
complicités haut placées.
Ces rumeurs de plus en plus énormes, semble-t-il, depuis quelque temps,
jusqu'à flirter avec la rhétorique, l'irréalisme et le terrifiant
ricanement
du négationnisme, on se dit que personne n'y croira. Erreur. Plus c'est
gros, mieux ça passe. Il se trouve donc apparemment un député français
pour
gober cela et saisir le gouvernement, contraignant France 2 à une
réplique
publique. Comme si l'intox de petit calibre avait aujourd'hui moins de
chances de succès que la rumeur «hénaurme». Cette décomplexion peut être
un
effet de la rumeur Meyssan, mère de toutes les rumeurs d'aujourd'hui. Si
des
centaines de milliers de personnes ont acheté un livre expliquant
qu'aucun
Boeing ne s'est écrasé sur le Pentagone le 11 septembre 2001, si donc le
marché existe, alors pourquoi ne pas tenter de lancer sur le marché la
rumeur de la mise en scène de la mort de Mohammed ?
Chaque guerre produit les siennes. Les cercueils des militaires français
morts dans le bombardement de Bouaké étaient vides, insinuent en boucle,
en
Côte-d'Ivoire, les médias du camp Gbagbo. Horrible intoxication. Mais
guère
plus «hénaurme», après tout, que les énormités auxquelles, pour notre
part,
nous pourrions croire. Ces Français réceptifs à la rumeur du Pentagone,
de
quel droit se moqueraient-ils des Ivoiriens qui ont cru aux cercueils
vides,
lors des obsèques des Invalides ?
Cernés par l'«hénaurme», les médias semblent impuissants. France 2 peut
bien
porter plainte, et retourner filmer quatre ans plus tard les blessures du
père de Mohammed, qui correspondent à celles que l'on voit sur la
séquence :
on pressent, hélas, que cela ne fera pas taire le cyber-ricanement. Guère
d'autre solution, pourtant. Il est vrai que ces mêmes médias semblent
parfois, par leurs silences ou leurs autocensures, s'ingénier à préparer
les
rumeurs de demain. En Côte-d'Ivoire toujours, les affrontements avec
l'armée
française auraient fait, selon le gouvernement ivoirien, une soixantaine
de
morts civils. «Circulez, il n'y a rien à voir !», claironne pourtant
Michèle
Alliot-Marie, dans le silence respectueux des médias français, préparant
le
terrain à l'«hénaurme» de demain. On sait d'où naît la rumeur. Elle naît
toujours d'un «circulez, y a rien à voir». Il peut être incarné par un
ministre, un président, ou un porte-parole d'hôpital. Il peut être celui,
multiforme, de la démission des médias américains après le 11 septembre.
Il
peut avoir mille visages.
http://u-blog.net/coursApied/
Excellent article.Merci à Daniel Schneidermann et à son attaché de presse
Raphaël. ;-)
excellent!? VOUS AVEZ DU LIRE Très VITE "Bob Mbock" a écrit dans le message de news:
Raphaël a écrit :
Enfin on va pouvoir commencer à dégonfler la baudruche lancée par la Mena...
Médiatiques (Libération) L'âge d'or de l'«hénaurme»
Par Daniel SCHNEIDERMANN vendredi 26 novembre 2004
Arafat a été empoisonné. Forcément. Comment en douter ? Naïfs que vous êtes. Qu'est-ce que vous croyez ? Qu'Arafat serait mort d'une banale cirrhose, ou d'une grippe intestinale ? D'ailleurs, il suffisait de voir la tête du porte-parole de l'hôpital. Vous vous souvenez ? Dès qu'il installait son micro, celui-là, on avait compris. Comment ? La France a donné son dossier médical à son neveu ? Bien sûr. Je l'ai vu à la télé. Il n'avait pas l'air bien convaincu, le neveu. Ce qu'il a dit ? Je ne sais plus. Que l'empoisonnement était possible, je crois. Ah oui, aussi qu'aucune trace de poison n'a été retrouvée. Ça me revient. Attendez, attendez, j'ai bien écouté. Il a dit exactement «aucune trace de poison connu». Connu. Vous avez saisi la nuance ? Mais ne vous inquiétez pas, on ne le saura jamais. Trop de monde dans le coup. Les Israéliens, évidemment. Ceux-là ! On peut compter sur eux pour inventer des poisons inconnus. Mais aussi des complicités dans l'entourage d'Arafat. Evidemment, ils y avaient intérêt, à la mort du Vieux. Plus fort encore. Vous vous souvenez de l'image du petit Mohammed ? Vous savez, ce gamin de Gaza, qui meurt dans les bras de son père, sous les balles des soldats israéliens, voici quatre ans. L'image avait été diffusée par France 2. Eh bien, tout est faux. Vous y avez cru à l'époque ? Naïfs que vous êtes. Mais oui, faux. Le gamin n'est pas mort. Comparez les photos de l'enfant enterré avec le visage de la télé, ça saute aux yeux, ce n'est pas le même. Quant au père, regardez bien l'image : il n'a pas été blessé. Vous voyez une goutte de sang ? Rien. Une gigantesque manip. Une grande mise en scène. Je l'ai lu sur l'Internet. Des journalistes ont enquêté quatre ans sur le sujet. D'ailleurs, j'ai un ami qui a un cousin qui a vu les rushes de la séquence. On entend les Palestiniens crier : «Tournez», et plus tard : «On refait la prise !» Mais ne vous inquiétez pas. On ne saura jamais. Trop de monde dans le coup. Le roi de Jordanie, une grande chaîne française. Ces Arabes ! On peut compter sur eux pour monter tous les coups tordus pour influencer l'opinion mondiale. Rumeurs symétriques. Inévitables, incontournables intoxications de guerre. Anciennes comme la guerre. Mais dopées par l'Internet. Ainsi, la rumeur sur la manipulation de l'image de la mort du petit Mohammed s'est-elle fortifiée en quatre ans. Des sites Internet ont d'abord expliqué, force schémas à l'appui, que les tirs ne pouvaient pas provenir de la position israélienne. Mais la thèse n'ayant pas «pris», n'étant pas parvenue à détruire l'impact de cette image, on a donc tenté de viser plus haut encore. Et quand la rumeur, ces dernières semaines, revient à Paris par la voie d'une cyber-agence de presse pro-israélienne, elle revient survitaminée. Il n'est plus seulement question de contre-expertises balistiques, mais d'une gigantesque mise en scène hollywoodienne, forcément préméditée, avec complicités haut placées. Ces rumeurs de plus en plus énormes, semble-t-il, depuis quelque temps, jusqu'à flirter avec la rhétorique, l'irréalisme et le terrifiant ricanement du négationnisme, on se dit que personne n'y croira. Erreur. Plus c'est gros, mieux ça passe. Il se trouve donc apparemment un député français pour gober cela et saisir le gouvernement, contraignant France 2 à une réplique publique. Comme si l'intox de petit calibre avait aujourd'hui moins de chances de succès que la rumeur «hénaurme». Cette décomplexion peut être un effet de la rumeur Meyssan, mère de toutes les rumeurs d'aujourd'hui. Si des centaines de milliers de personnes ont acheté un livre expliquant qu'aucun Boeing ne s'est écrasé sur le Pentagone le 11 septembre 2001, si donc le marché existe, alors pourquoi ne pas tenter de lancer sur le marché la rumeur de la mise en scène de la mort de Mohammed ? Chaque guerre produit les siennes. Les cercueils des militaires français morts dans le bombardement de Bouaké étaient vides, insinuent en boucle, en Côte-d'Ivoire, les médias du camp Gbagbo. Horrible intoxication. Mais guère plus «hénaurme», après tout, que les énormités auxquelles, pour notre part, nous pourrions croire. Ces Français réceptifs à la rumeur du Pentagone, de quel droit se moqueraient-ils des Ivoiriens qui ont cru aux cercueils vides, lors des obsèques des Invalides ? Cernés par l'«hénaurme», les médias semblent impuissants. France 2 peut bien porter plainte, et retourner filmer quatre ans plus tard les blessures du père de Mohammed, qui correspondent à celles que l'on voit sur la séquence : on pressent, hélas, que cela ne fera pas taire le cyber-ricanement. Guère d'autre solution, pourtant. Il est vrai que ces mêmes médias semblent parfois, par leurs silences ou leurs autocensures, s'ingénier à préparer les rumeurs de demain. En Côte-d'Ivoire toujours, les affrontements avec l'armée française auraient fait, selon le gouvernement ivoirien, une soixantaine de morts civils. «Circulez, il n'y a rien à voir !», claironne pourtant Michèle Alliot-Marie, dans le silence respectueux des médias français, préparant le terrain à l'«hénaurme» de demain. On sait d'où naît la rumeur. Elle naît toujours d'un «circulez, y a rien à voir». Il peut être incarné par un ministre, un président, ou un porte-parole d'hôpital. Il peut être celui, multiforme, de la démission des médias américains après le 11 septembre. Il peut avoir mille visages.
http://u-blog.net/coursApied/
Excellent article.Merci à Daniel Schneidermann et à son attaché de presse Raphaël. ;-)