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Le copyleft est victime de la charte anti-piraterie

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aha!
La charte anti-"piraterie" que le gouvernement prépare pour la rentrée
afin de limiter les échanges de musique et films sur Internet est avant
tout une bataille politique et économique des majors à l'encontre de
nouveaux modèles de diffusion comme le copyleft, à savoir le droit de
partager, copier ou modifier librement des informations (œuvres
culturelles, création de logiciels...) à condition que les auteurs en
soient cités et que les nouvelles œuvres qui en sont dérivées héritent à
leur tour d'un statut identique.

Sur la voie d’une charte contre la "piraterie" sur Internet

Le 15 Juillet, lors d’une table ronde au ministère de l’Economie entre
personnalités politiques et représentants des industries culturelles,
des accords ont été trouvés pour limiter la "piraterie" d’œuvres
culturelles sur Internet. Un point de départ pour des négociations
engagées avec l’ensemble des acteurs impliqués dans ce dossier. Deux
comptes-rendus de cette réunion sont disponibles sur le site Internet du
ministère de la Culture.

http://www.culture.gouv.fr/culture/actualites/index-piraterie.htm

Le ministre de la Culture y dénonce "l’explosion de la piraterie sur
Internet", qu'il considère comme "une menace pour la création et la
diversité culturelle" car elle "assèche peu à peu la création, la
diversité à laquelle le public est attaché. Ceux qui sont menacés, ce
sont les jeunes artistes, encore peu connus du public et de la presse,
dont la disparition passera inaperçue alors qu’ils auraient pu être les
grands artistes de demain". Evoquant "le mythe de la gratuité
qu’inspirent des idées nouvelles, proposant de faire table rase de la
propriété intellectuelle pour mettre en place des systèmes de
mutualisation séduisants par leur simplicité", Renaud Donnadieu de
Vabres invite dès lors à prendre la mesure de la complexité du problème.

Dans un deuxième temps, le compte rendu indique que les acteurs en
présence se sont mis d’accord sur un projet de charte prévoyant d’abord
l’association et la promotion des plates-formes dites légales de
distribution en ligne (i-Tunes Music Store d’Apple, Connect de Sony,
etc.), puis le lancement d’actions d’information et de sensibilisation
et enfin l’expérimentation du filtrage. Pour les autorités, cette
dernière option doit être envisagée sérieusement et expérimentée pour
être évaluée par un expert indépendant. Des moyens répressifs suivront
ces propositions.

Le 20 Juillet, un rapport commandé par la SNEP et rendu public par le
quotidien "Les Echos"

http://www.lesechos.fr/lettrespro/presentation/telecom/flash/rapport_filtrage_capgemini_france.pdf

indiquait l’existence et la fiabilité de solutions de filtrage proposées
aux fournisseurs d’accès à Internet. Des solutions permettant, pour un
coût de l’ordre de 3 euros par abonné, d’interdire purement et
simplement l’accès à certaines ressources et réseaux aux internautes.

Il semble donc clair que l’on nous prépare pour la rentrée une charte
limitant certains échanges sur Internet, dont le peer-to-peer, voire
l’interdiction pure et simple d’accéder à certains réseaux avec
l’arsenal répressif ad hoc.

Amalgames, idées fausses et intentions cachées

Il est possible que cette affaire soit polluée par des amalgames, idées
fausses et intentions cachées.

Il existe peut-être un amalgame dans les propos du ministre de la
Culture lorsqu’il évoque la "piraterie". La dénomination de "pirate
informatique" regroupe en effet plusieurs définitions. Un pirate peut
être celui qui copie frauduleusement et à usage non privé une œuvre ou
un logiciel et l’utilise, le publie ou le revend. Il peut être celui qui
pénètre frauduleusement dans des réseaux ou des banques de données ou
enfin celui qui, intentionnellement, injecte un ou des virus dans des
programmes ou données. Un amalgame classique est fait entre pirate et
"hacker". La culture hacker est une culture alternative qui a souvent
été, à tort, confondue avec des activités illégales de piratage. Un
hacker est avant tout un bidouilleur plus ou moins talentueux. Là où
certains y voient le mythe de la gratuité, le hacker considère son
activité comme une contribution mutualiste en contrepartie de la
reconnaissance au sein d’une communauté (1). Il serait dramatique que le
ministre tombe dans cet amalgame en évoquant le mythe de la gratuité. Ce
serait une culture à part entière qu’il remettrait en cause par ignorance.

Il y a de fausses idées dans ce que tente de faire admettre le SNEP en
mettant en cause les échanges entre internautes. Ce n'est pas
l'émergence des outils dits de "peer-to-peer" qui est à l'origine de
l'explosion de la diffusion de contenus mais la démocratisation des
accès à haut débit et sa capacité à transférer des contenus volumineux
comme la musique ou les films pour de faibles coûts et des durées
relativement courtes. Les échanges de contenus illicites existaient
avant l'apparition de ces nouveaux modes d'échange en utilisant les
protocoles du Web comme http et ftp et étaient accessible via les
moteurs de recherche.

Si le filtrage est mis en place, ces modes d'échange seront à nouveau
utilisés. Les techniques de filtrage proposées n'étant pas basées sur le
contenu mais sur les protocoles, le filtrage deviendrait impossible,
sauf à interdire complètement l'usage du Web. C’est pour cela que,
au-delà de la complexité et de la contrainte de cette solution pour les
fournisseurs d’accès à Internet, elle n’empêchera pas les échanges
illicites d’informations. En effet, dès l’apparition de ces filtres sur
les réseaux suivra la création de nouveaux protocoles, l’utilisation de
systèmes plus communs (ftp, e-mails, serveurs Web…) ou le développement
de mécanismes de chiffrage d’informations. Les parades suivront au fur
et à mesure que le filtrage sera plus important. C’est un cercle
vicieux qui, poussé à l'extrême, pourrait tuer le réseau. En réalité,
tout système technique de filtrage apporte un risque non négligeable
quant à la pérennité du réseau. Tous les échanges seront freinés et non
les échanges illicites.

Enfin, la possible intention cachée est celle de la conservation du
modèle actuel qui privilégie les grands distributeurs de biens
culturels, les majors, par rapports aux modèles alternatifs portés,
entre autres, par la culture hacker et basés sur la notion de copyleft.
En effet, les vrais gagnants de ces mesures de restriction pourraient
être les distributeurs, qui bénéficieraient d’une campagne de publicité
sans précédent pour leur plates-formes payantes. En réalité, les
perdants seraient les artistes encore méconnus. On voudrait nous faire
croire, qu’ils sont victimes des échanges illicites. Mais ils ne
demandent qu’à être connus! Aujourd’hui, ce sont les majors qui
monopolisent ce pouvoir de "faire connaître" en jouant de moins en moins
ce rôle pour éviter de prendre des risques. Les artistes pourraient
recourir à la diffusion d’œuvres sous licence dite libre ou en copyleft
pour faire connaître leurs œuvres. Les majors voient ces pratiques d’un
mauvais œil, au même titre que les éditeurs de logiciels propriétaires
se méfient de l’open-source.

Les propos du ministre sont sans doute motivés par des craintes à
l’égard de ce type de modèle. Des craintes explicites lorsqu'il évoque
"des idées nouvelles, proposant de faire table rase de la propriété
intellectuelle pour mettre en place des systèmes de mutualisation
séduisant par leur simplicité et qui seraient de fausses bonnes idées,
qui détruiraient un modèle de financement de la création qui a fait ses
preuves".

Le copyleft, une alternative sérieuse au système des majors
Dans sa philosophie, et son fonctionnement, le copyleft est aux majors
ce que l’open-source est aux éditeurs de logiciels propriétaires. Il se
peut que l’amalgame entre "piraterie", culture hacker, philosophie du
libre et dangereux modèle de la gratuité serve les intérêts des grands
distributeurs d’œuvres culturelles. Dans son approche, le ministre de la
Culture semble confirmer son intention de faire perdurer le système
existant.


Il n’est sûrement pas conscient de la contradiction dans laquelle il
place le gouvernement. En effet, comment expliquer, que d’un côté, par
la voix du Premier ministre, qui évoquait en mai 100 millions d’euros
d’économie pour l’administration grâce aux logiciels libres, celui-ci
privilégie les solutions libres pour son infrastructure informatique et,
de l’autre, coupe l’herbe sous le pied d’initiatives similaires à celles
qui ont permis l’avènement du logiciel libre appliquées au domaine de la
création artistique?

Le copyleft constitue une alternative crédible aux grands distributeurs
de biens culturels. D’autant qu’il peut s’inscrire dans une logique
économique viable. Car, contrairement aux a priori, le copyleft, tout
comme le logiciel libre, n'impliquent pas la gratuité. C’est le moyen de
se faire connaître, d’acquérir une réputation, de construire sa
notoriété par son temps de travail et son énergie. La diffusion d'une
œuvre copyleftée peut permettre à l'artiste de vivre de son travail. Le
modèle de revenu se déplace vers la "matérialisation" de l'œuvre, par
exemple par son édition en série limitée signée par l'artiste ou par la
représentation physique de l'œuvre (concert, représentation théâtrale...).


Eviter le piège du rapport de force

Comment favoriser l’essor du copyleft sans léser le copyright? Tout
simplement en légalisant des échanges dits illicites. Cela ne signifie
pour autant la gratuité totale des œuvres soumises à copyright. La
solution proposée par certaines associations de consommateurs suppose la
mise en œuvre d’un mécanisme de financement des artistes qui voient
leurs œuvres "copyrigthées" échangées sur Internet. Ce mécanisme existe
déjà. C’est celui de la Sacem. Il suffirait de l’appliquer à l’Internet.
Dans cette logique, l’Etat pourrait tout à fait envisager l’instauration
d’une taxe Internet qui alimenterait un fonds à destination des
artistes. Le mécanisme technique à mettre en œuvre reste à discuter et à
expérimenter. Le projet Sesam (www.sesam.org) en est un exemple. Les
pouvoirs publics pourraient prendre en compte cette possibilité au lieu
d'opter pour la coercition et d'instaurer un rapport de force avec les
internautes.



Mikiane – Michel Levy-Provencal

Créateur et animateur du projet h4r7.org de création collectives copyleftées


(1) "How to be a hacker", Eric S. Raymond, traduit par Stéphane
Fermigier, http://members.tripod.com/alad1/hacker-howto-fr.htm.


Pour en savoir plus sur le copyleft :

Licence Art Libre : www.artlibre.org

Pétition pour les musiques libres:
http://www.petitiononline.com/vnatrc81/petition.html

Creative Commons : www.creativecommons.org

Projet H4r7 de créations collectives copyleftées :
http://www.h4r7.org

5 réponses

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Gerald
aha! wrote:

Les propos du ministre sont sans doute motivés par des craintes à
l'égard de ce type de modèle. Des craintes explicites lorsqu'il évoque
"des idées nouvelles, proposant de faire table rase de la propriété
intellectuelle pour mettre en place des systèmes de mutualisation
séduisant par leur simplicité et qui seraient de fausses bonnes idées,
qui détruiraient un modèle de financement de la création qui a fait ses
preuves"



Merci pour cette info bien que partiellement hors-sujet. L'extrait
ci-dessus résume finalement le problème. Le plus sympa n'est-il pas que
c'est en fait le capitalisme qui , dans sa soif de bénéfices et de
vitesse, en accélérant et délocalisant les moyens de communication offre
les moyens de sa propre perte ? L'avenir n'est-il pas à avoir des FAI
hors-frontières ?

--
Gérald
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Franck
aha! a écrit:

La
solution proposée par certaines associations de consommateurs suppose la
mise en œuvre d’un mécanisme de financement des artistes qui voient
leurs œuvres "copyrigthées" échangées sur Internet. Ce mécanisme existe
déjà. C’est celui de la Sacem. Il suffirait de l’appliquer à l’Internet.
Dans cette logique, l’Etat pourrait tout à fait envisager l’instauration
d’une taxe Internet qui alimenterait un fonds à destination des
artistes.



Cette taxe n'existe-t-elle pas déja? En tous cas, je sais que les sites
qui diffusent de la musique en ligne paient quelque chose à la SACEM, et
que les fonds ainsi générés vont directement dans ce que la SACEM
appelle "les irrépartissables". C'est à dire, grosso-modo, des fonds
dont les administrateurs font ce qu'ils veulent. Et s'ils en donnent une
partie aux auteurs, c'est à ceux qui "statistiquement" sont le plus
diffusés dans l'année en cours.
Bref, tout ça pour dire que ce genre de système va à mon avis à
l'encontre de la philosophie du copyleft dans la mesure ou il s'établi
sur une sorte de hiérarchie. Je pense qu'il serait beaucoup plus
cohérent de mettre en place un système qui permettrait au
"consommacteur" de faire directement un don à l'auteur. Même si cela
peut paraitre totalement idéaliste par les temps qui courrent, il se
trouve que dans un contexte approprié, cela fonctionne : pour le
vérifier, allez-donc sur un marché quelconque avec un répertoire "de
qualité" et vous serez étonnés de ce que vous recevrez de manière
spontanée (attention, ne trichez-pas en allant quémander directement!).

Franck.
Avatar
Cyberdivad
Le samedi 24 Juillet 2004 11:45, Franck
(), a écrit dans le message
:



La
solution proposée par certaines associations de consommateurs suppose
la mise en ½uvre d?un mécanisme de financement des artistes qui
voient leurs ½uvres "copyrigthées" échangées sur Internet. Ce
mécanisme existe déjà. C?est celui de la Sacem. Il suffirait de
l?appliquer à l?Internet. Dans cette logique, l?Etat pourrait tout à
fait envisager l?instauration d?une taxe Internet qui alimenterait un
fonds à destination des artistes.



Cette taxe n'existe-t-elle pas déja? En tous cas, je sais que les
sites qui diffusent de la musique en ligne paient quelque chose à la
SACEM, et que les fonds ainsi générés vont directement dans ce que la
SACEM appelle "les irrépartissables". C'est à dire, grosso-modo, des
fonds dont les administrateurs font ce qu'ils veulent. Et s'ils en
donnent une partie aux auteurs, c'est à ceux qui "statistiquement"
sont le plus diffusés dans l'année en cours.



C'est bien celle ou les artistes inscrits à la SACEM désirant mettre en
téléchargement gratuit certains morceaux doivent verser de l'ordre de
0.10euros/téléchargement ? Je me rappelle pourquoi je ne me suis pas
inscrit à la SACEM..

--
Cyberdivad
Avatar
ed
Gerald wrote:


Merci pour cette info bien que partiellement hors-sujet. L'extrait
ci-dessus résume finalement le problème. Le plus sympa n'est-il pas que
c'est en fait le capitalisme qui , dans sa soif de bénéfices et de
vitesse, en accélérant et délocalisant les moyens de communication offre
les moyens de sa propre perte ? L'avenir n'est-il pas à avoir des FAI
hors-frontières ?



C'est impossible. Mes un PC hors frontieres partagé avec plusieur
amis avec chacun un compte c'est possible; et aucun des FAI ne
saura ce qui ci passe. Un gros bizness pour le Pakistan :-)
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DanSteph
"Franck" a écrit :

Très bon article, dans ce combat si les major gagnent ca voudra dire
que le monde prend un mauvais tournant. (entre autre choses)

Cela dit un autre truc qui peut tuer l'oeuvre: même si les contributions
sont de qualité et à moins d'hurler comme un putois au désastre
personnel financier les contributions en donation sont en général très
proche du zéro absolu. (ne parlont pas de *quelques cas* particulier)

D'un coté les majors sont très criticable mais les gens par leur égoismes
et leur je m'enfoutisme contribuent fortement à leurs avènement.

En bref comme on fait son lit on se couche, on aura la societé qu'on mérite.
(combient de part de marché pour M6 la télé poubelle par excellence ?)

--
Dan