Terreurs et petites incontinences

Très populaire auprès des joueurs, la série Resident Evil n’était plus que l’ombre d’elle-même avec un sixième épisode clairement décevant pour les amateurs de la première heure. À mille lieues de l’ambiance survival horror des débuts de la saga, la série avait pris un écoeurant virage vers l’action, reléguant la série au genre sur-représenté sur third person shooter ( TPS ). Fort heureusement, Capcom a fini par réagir et mettre en chantier un nouvel épisode qui tranche radicalement avec les mécaniques rincées représentées depuis 1996. Empruntant différents éléments aux autres survival horror du marché ainsi que dans le cinéma, ce Resident Evil 7 s’est montré malin dans son annonce, redonnant une belle lueur d’espoir aux amoureux des jeux horrifiques où le sordide et l’hémoglobine sont perçus comme de l’art.

Ainsi, ce septième opus modifie un certain nombre de choses dans la saga. En premier lieu, le casting historique est balayé, au profit d’un nouveau personnage principal : Ethan Winters. Il s’agit d’un homme lambda, bien loin des recrues surentraînées des S.T.A.R.S. ou d’Umbrella Corporation. La prise en main se voit également modifiée, optant pour une vue subjective qui a déjà fait son petit effet dans d’autres jeux vidéo tels que la série Amnesia, Outlast ou encore le regretté P.T. En effet, ce choix d’angle de vue nous permet de mieux s’identifier au personnage incarné et, de surcroît, accentue la peur en raison d’un champ de vision plus réduit. À cela s’ajoute une atmosphère oppressante dans laquelle les ennemis ne sont pas légion mais qui interviennent souvent au pire moment, dans l’optique de tester notre sang froid.

Outre ses inspirations au niveau d’autres jeux vidéo du marché, Resident Evil 7 se sert également dans les films d’horreur. Du Projet Blair Witch à Massacre à la Tronçonneuse, en passant par La Coline à des Yeux, les classiques de Romero et autres slasher movies, le soft y exploite les recettes qui fonctionnent, afin de proposer un aspect série B clairement assumé mais sans en rajouter une surcouche qui pourrait être imbuvable pour les allergiques aux nanars.

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Maintenant que le pitch est posé, parlons scénario. Si ce dernier ne tient clairement pas du génie, il permet d’instaurer un but à la progression. Après avoir reçu un message de sa copine Mia après trois ans de silence radio, Ethan Winters accourt dans une contrée paumée au fin fond de la Louisiane. Ce serait dans une vieille bâtisse abandonnée que la belle se trouverait. Le lieu peut faire penser au célèbre Manoir Spencer, précisément dans la taille qu’il représente. Nous nous rendrons vite compte que l’intérieur n’est pas des plus reluisants, affichant un aspect crade omniprésent et une luminosité aléatoire, nécessitant en général de naviguer prudemment à la lampe torche dans les différentes pièces de l’angoissante demeure. Les premiers instants de jeu se révèlent clairement immersifs, occasionnant une peur grandissante qui est encore plus importante si l’on joue avec le casque PlayStation VR vissé sur la tête. Outre l’aspect visuel, c’est également la multitude de bruitages qui nous rendront résolument paranoïaque à chaque pas sur un plancher qui grince, près d’une fenêtre qui vibre à cause du vent, ou encore une porte qui s’entrebâille pour d'obscures raisons.

Après avoir retrouvé Mia et la « surprise » qui la concerne, il sera temps de rencontrer la fameuse famille Baker qui ne semble plus avoir toute sa tête. Après un fameux festin en leur compagnie, il est temps d’échapper à leurs griffes et ce ne sera pas mince affaire. Entre un Jack qui joue les Nemesis de Resident Evil 3, une Marguerite dont les mimiques font froid dans le dos et un Lucas clairement psychopathe, les sensations fortes sont garanties. Du point de vue de l’ambiance, Capcom a clairement fait des efforts, nous proposant un réel retour à une atmosphère angoissante que nous avions perdus depuis les premiers opus de la série. Les plus trouillards pourront même rencontrer des difficultés à poursuivre l’aventure sans allumer une lampe d'appoint, tant les facteurs horrifiques sont présents. Fort malheureusement, si la première moitié du jeu est délectable pour les amateurs de sensations fortes, la seconde partie retombe davantage dans les travers de ce qui est souvent critiqué dans la série : une angoisse moins importante au profit d’un regain d’action, des décors bien moins inspirés et détaillés, ainsi qu’un aspect bien plus linéaire. Ainsi, nous ressentons clairement l’empressement de l’équipe de développement à terminer le jeu et ce, en omettant de continuer à étoffer son intrigue. C’est un constat vraiment décevant, au vu de la qualité du début de l’aventure.

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Cauchemar en cuisine

Avec le changement de son angle de vue pour passer à la première personne, la prise en main de Resident Evil 7 a globalement changé depuis le précédent volet. S’il n’est clairement pas question du dynamisme d’un FPS et un FOV ( Field of View ) élevé, le titre joue justement sur une certaine lenteur des déplacements pour appuyer le fait qu’Ethan n’est pas un soldat surentraîné. Bien au contraire, la visée avec une arme à feu devient rapidement complexe car la panique de notre héros d'un jour occasionne des imprécisions. Ainsi, il ne sera pas rare de manquer notre cible, ce qui risque d’être coton face à - par exemple - une Mia folle furieuse équipée d’une tronçonneuse. Cela ajoute une couche de stress en faveur de l’ambiance générale, déjà bien sous tension. Nous regretterons toutefois que Capcom n’ait pas amélioré la localisation des dégâts à l'exception des zones principales ( tête, corps, jambes ), afin de proposer davantage de possibilités. Il sera toutefois possible d’exploser jambes et têtes de quelques monstruosités que nous trouverons dans les sombres recoins de la maison, ses annexes et au-delà.

Vous l’aurez compris, en sus de devoir faire face à la menace quasi-omniprésente des membres de la famille Baker, il conviendra rapidement de nous frotter à d’étranges monstres difformes dont nous apprendrons la provenance qu’après quelques heures de jeu. Si les armes conventionnelles sont nécessaires pour les ennemis « lambda », Jack, Marguerite et Lucas nécessiteront d’autres mécaniques qui requièrent parfois d'utiliser les éléments du décor qui peuvent découler sur différents scripts lors de certaines rencontres. Il est par exemple possible de filer au nez et à la barbe de Jack, ou se faire repérer et embrasser sa pelle pour un résultat que nous vous laisserons découvrir. Cela offre un sentiment d’emprise sur le déroulement du jeu, ce qui se révèle plutôt appréciable. Toutefois, il est dommage que la poursuite de nos adversaires s’arrête brutalement après avoir passé une salle ou deux, rappelant des mécaniques d'un autre âge. Malgré une certaine abondance en matière de munitions, l’aspect survie demeure bien présent car les ennemis réapparaissent parfois dans des lieux déjà visités, nécessitant de choisir entre fuir et sacrifier quelques chargeurs.

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Bien évidemment, Capcom revient également aux sources de la série en proposant des énigmes au sein de la demeure des Baker. Certains objets seront à trouver pour accéder à des endroits précis, notamment des clés pour ouvrir certaines portes – ce qui rappellera quelques souvenirs au premier opus de la franchise. Dans tous les cas, ces casse-têtes ne sont jamais très tordus, découlant sur aucun réel blocage dans la progression. Les salles de sauvegarde font également leur retour et il ne sera plus question d’une machine à écrire et des rubans encreurs, mais d’un magnétophone et des cassettes ( dans les modes de difficulté facile et normal, il n’y a pas de restrictions de sauvegardes ). Les coffres permettent quant à eux de se délester d'objets de notre inventaire limité, comme à la belle époque pour les fans de la première heure.

Le jeu regorge également de secrets à découvrir, notamment des statuettes à détruire, des jetons à déloger pour débloquer armes et équipements ( stabilisateur, stéroïdes, etc ). Les objets habituels tels que les herbes, produits chimiques - à combiner pour la création d’items - et autres munitions sont parfois très bien cachés dans les décors du jeu. Ainsi, les développeurs cherchent à ce que nous procédions à de nombreux allers-retours pour découvrir toutes les petites subtilités du level design du jeu, tout du moins dans sa première partie qui se révèle très riche à ce niveau-la.

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C’est du propre

Vous l’aurez compris, Resident Evil 7 a bien réussi à redorer le blason de la série au niveau du retour du survival horror tel que nous l'entendions, quand bien même la seconde et dernière partie de l’aventure nous a clairement fait déchanter. Il est en effet question d'une perte des petites subtilités qui faisaient le sel du jeu, au profit de l’action relativement débridée et terriblement excessive ( bonjour les boss énormes ). Quoi qu’il en soit, Capcom a su proposer une patte artistique indéniable, retranscrite avec le moteur graphique maison, le RE Engine. Ce dernier propose de beaux effets de lumière et quelques modélisations qualitatives. En contrepartie, les textures ne sont pas toujours du plus bel effet, notamment dans certains environnements au rendu vraiment médiocre. Mention spéciale à la seconde partie du jeu, moins inspirée en matière de level design, proposant des environnements génériques.

Sur la partie sonore, Capcom s’est clairement fait plaisir avec une batterie de bruitages plus terrifiants les uns que les autres. L’univers crade de la maison des Baker est finalement retranscrite avec des sons inquiétants à base de susbstances visqueuses, cris de monstres inconnus et autres cliquetis, grincements et claquements. En bref, le silence absolu est quasiment absent, tant et si bien que quand il survient, l’inquiétude est encore plus palpable. Il s’agit donc d’un excellent travail de la part de l’équipe de développement, faisant clairement référence à ce qui s’est fait du côté de Konami avec la série Silent Hill. En revanche, les doublages ne sont pas des plus réussis avec un manque d’entrain général à l’exception de certains protagonistes tels que Lucas. Que ce soit en version française ou originale, le résultat n’est pas des plus qualitatifs, dommage.

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Le jeu étant compatible avec le casque de réalité virtuelle PlayStation VR sur PS4, quand est-il de ses impressions in-game ? Il est clair que l’immersion est ainsi encore plus importante et Capcom a clairement tourné sa mise en scène, cut-scenes et autres scripts pour nous faire sursauter avec le casque vissé sur notre tête. Même les plus téméraires peuvent être surpris par la peur provoquée, maîtrisée par des déplacements lents et un FOV particulièrement étriqué. Ainsi, la crainte d’être pris au dépourvu est constante et il convient d’avoir les nerfs bien accrochés pour tenir sur la durée. En dépit d'une perte de qualité graphique dans cette configuration, RE 7 propose une excellente expérience en VR.

Resident Evil 7 : Biohazard

Le retour du survival horror de Capcom.

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Un mot enfin au niveau de la durée de vie du jeu, laquelle s’estime en moyenne à dix heures pour une première partie. Cela reste donc dans les standards de la franchise, sachant qu’un second run – amenant à une potentielle seconde fin – peut être finalisé en moins de quatre heures, sans trop forcer. Comme le veut la tradition dans la franchise, des bonus sont accordés en fin de partie afin d’en profiter dans la suivante, selon les exploits accomplis. Pour les plus téméraire, il sera possible de jouer en mode Survie, avec une difficulté bien plus importante et des objets placés différemment. Malgré tout, le soft ne profite pas d’une excellente rejouabilité, d’autant plus qu’il ne faudra pas compter sur un mode Mercenaires. Last but not least, il est important de revenir sur l’impression que Capcom a finalisé le jeu à la va-vite et la sortie des premiers DLC donne l’impression d’avoir tranché une partie de l’aventure afin de justifier la commercialisation de contenus additionnels. Dommage.

Resident Evil 7 - 11. Resident Evil 7 - 12.

+ Les plus

  • Vrai retour du survival horror
  • L'ambiance
  • La patte artistique
  • Les bruitages
  • L'expérience en VR

- Les moins

  • Seconde partie du jeu décevante
  • Impression de scénario pas fini
  • Doublages perfectibles
  • Graphismes pas toujours très propres