Tribune libre par Pascal Malotti, Directeur Conseil & Marketing, Valtech France

La nouvelle révolution automobile
Alors que pour les longs trajets, les américains préfèrent utiliser les bus ou les avions, en Europe, la voiture reste le moyen de transport le plus souvent utilisé. Les constructeurs européens réfléchissent donc à la façon de transformer le véhicule en capitalisant sur les différentes possibilités offertes par les nouveaux usages et services connectés. Intégrant de plus en plus des technologies émergentes, depuis l’Intelligence Artificielle ou les capteurs, en passant par la domotique et la reconnaissance vocale, les véhicules intelligents sont déjà en cours de construction.  Selon les experts, le véhicule du futur se situera à mi-chemin entre un véhicule connecté et une plateforme de services. Celle-ci capitalisera largement sur l’économie de partage, un phénomène sociétal en pleine progression. Le conducteur n’étant plus obligé de poser les mains sur le volant en permanence, la voiture deviendra un salon ambulant, une sorte d’extension mobile de notre domicile ou de notre bureau.


Faire du trajet un moment d’infotainment
Au travers de cette plateforme intelligente, le conducteur pourra, par exemple, se connecter aux réseaux sociaux ou recevoir des informations météo géolocalisées. Une appli mobile pilotera ces usages, grâce à un paramétrage qui permettra de proposer une offre à la carte, dans une logique servicielle. Cet espace de voyage connecté, articulé autour d’une logique d’infotainment, transformera nos longs trajets en des expériences de divertissement agréables et reposantes. Finie la Peugeot de papa. Le véhicule du futur sera un véritable système d’exploitation ambulant. Jugez-en plutôt : Il y a dix ou quinze ans, un avion intégrait 8 millions de lignes de codes alors que dans un véhicule connecté, on en compte aujourd’hui plus de 100 millions. Dès lors, à l’image des Apple et des Samsung qui ont évolué de l’informatique vers les téléphones portables, les constructeurs automobiles de demain seront-ils les mêmes qu’aujourd’hui ou seront-ils disruptés par les GAFAM et autres fabricants de logiciels ? 

General Motors voiture autonome sans volant

Un marché juteux
En 2021, 7% des revenus automobiles proviendront des services autour des véhicules connectés. Une partie de ces revenus pourrait même venir de la publicité géolocalisée et personnalisée, intervenant pendant les déplacements. Ce marché juteux attire vers le secteur de l’automobile de nouveaux acteurs, qu’il s’agisse des leaders technologiques comme les GAFAM ou les Samsung, experts de la mobilité connectée ou bien des start-ups diverses et variées, spécialisées dans la domotique, la reconnaissance vocale ou les capteurs. S’il est certain que cette révolution aura un impact profond sur la manière dont les automobiles seront conçues et fabriquées, elle devra s’appuyer sur un écosystème d’acteurs innovants, sans oublier d’y impliquer les intervenants traditionnels, également concernés par cette évolution comme Bosch, Valeo ou Michelin. Dans ce paysage automobile en pleine recomposition, l’étendue des acteurs impliqués et les multiples écosystèmes d’innovation à l’œuvre expliquent pourquoi le sujet est aussi complexe.


De nouveaux modèles économiques
De nouveaux modèles de revenus, enchevêtrés les uns aux autres, découleront de la vente des véhicules, des logiciels et des applis servicielles. Les constructeurs automobiles sont conscients de l’enjeu. Ils vivent ce changement, non seulement comme une transformation de leur activité économique, mais aussi comme une évolution radicale de leur cœur de métier. L’urgence pour eux consiste à poser les vraies questions. Dans ce nouveau métier qui se dessine, où le service va être fondamental, quels sont leurs atouts et leurs savoir-faire ? Ce monde automobile à l’ancienne, avec l’image du concessionnaire et celle de l’atelier où s’activent des techniciens en blouse bleue, maculés de cambouis, saura-t-il évoluer pour gérer des plateformes logicielles et des services ? Saura-t-il séduire les Millenials, moins sensibles à la notion de possession qu’à la notion d’expérience et plus enclins à faire confiance aux GAFAM ?

Le véhicule connecté va devenir une véritable poule aux œufs d’or pour le plus grand bien de la filière automobile et de notre économie toute entière. Mais seule la capacité des constructeurs à travailler dans des écosystèmes d’innovation, le plus en amont et le plus tôt possible, permettra à ces professionnels de se positionner en innovateurs et de retirer des revenus substantiels, dans la nouvelle ruée vers l’or qui les attend.