Le cabinet spécialisé Strand Consult s'est fait une petite spécialité de fustiger certaines idées reçues ou déformations de la réalité du secteur des télécommunications, n'hésitant pas à pointer du doigt le trop politiquement correct discours de ses confrères trop intéressés à publier des rapports allant dans le sens de leurs clients, quitte à effectuer des corrections en temps voulu, ou les médias aveuglés par les artifices marketing de certaines sociétés.

ll n'en cède pas moins à la tradition des prédictions pour l'année suivante et se félicite du succès de celles faites à la même période l'an dernier, tout en reconnaissant que le climat économique incertain avait en partie balisé le terrain.

Pour 2010, les analystes de Strand Consult voient huit éléments particuliers à prendre en compte dans l'univers des télécommunications.

1. Les opérateurs vont utiliser les effets de la crise économique pour réduire leurs coûts. La fin 2008 et une bonne partie de l'année 2009 ont été marquées par un contexte économique difficile. Certains secteurs ont été durement touchés mais les opérateurs mobiles s'en sont plutôt bien sortis.

Cela ne les a pas empêchés d'annoncer de grands plans de restructurations. Pour les analystes de Strand Consult, la crise économique a bon dos et il s'agit là plutôt d'ajustements qui auraient dû être faits il y a bien longtemps mais qui auraient fortement terni leur image.

Les opérateurs devraient continuer de chercher à réduire leurs coûts en 2010 en vue d'améliorer leurs bilans, avec une réduction des coûts opérationnels et un décalage des investissements. Ils rencontreront également des difficultés à assurer une qualité de service correcte sur leur réseau à cause d'un manque de préparation à l'explosion des trafics mais aussi à un manque de vision à long terme du côté des politiques, notamment sur l'accès aux fréquences.

Il sera beaucoup question de mutualisation des infrastructures pour mener à bien un double objectif de réduction des dépenses et de renforcement des capacités réseaux à moindre coût, tandis que la consolidation des marchés se poursuivra ( les opérateurs se rachetant entre eux ).

Strand Consult estime également que les opérateurs vont tenter de revaloriser les produits prépayés, un segment qui a peu évolué ces dernières années mais qui est pourtant riche d'opportunités.

2. La régulation des fréquences, un sujet difficile. Occupation des fréquences libérées par le dividende numérique, réutilisation des fréquences 900 MHz puis 1800 MHz pour des usages 3G, attribution de la bande 2600 MHz...Les prochains mois seront encore riches de questions techniques relatives aux fréquences et à leur régulation.

Le problème se précise alors que les réseaux de nouvelle génération comme LTE s'apprêtent à être lancés.Se pose aussi la question de l'installation des antennes-relais, sujet qui peut rapidement devenir compliqué selon les marchés.

Là aussi, un appui politique est nécessaire pour organiser les différents éléments et les temps de développement par des calendriers, permettant aux opérateurs de définir des stratégies et des financements sur le long terme.

3. 2010, une année complexe pour les équipementiers. Les problèmes de saturation de réseaux vont relancer les investissements mais dans le même temps, les opérateurs se préparent pour les réseaux futurs comme LTE.

Les équipementiers doivent être présents sur ce créneau mais 2010 ne sera pas l'année de LTE, seulement celle de son commencement. L'année prochaine sera plutôt une année de planification, en attendant que les détails réglementaires s'éclaircissent.

Il y aura aussi de la consolidation chez les équipementiers mais il faudra aussi compter avec la montée en puissance des équipementiers chinois, et ceux-ci devraient être présents sur tous les fronts en 2010, mettant la pression sur les acteurs européens. L'année s'annonce difficile.

4. Les smartphones, un sujet plus complexe qu'il n'y paraît. Entre la réalité du marché et la vision qu'en donnent les médias, il existe un gouffre, prévient Strand Consult. D'abord parce qu'une bonne partie de l'information provient des Etats-Unis alors que ce marché ne représente que 7% du marché global et ne saurait en être totalement représentatif.

Strand Consult a déjà pourfendu l'idée que les ventes de terminaux subventionnés sont une bonne affaire pour les opérateurs. Une autre idée reçue serait que la croissance des ventes de smartphones est liée à la demande du public. En réalité, expliquent les analystes, il s'agit d'une transition technologique par laquelle les acteurs substituent à des OS propriétaires fermés des OS de smartphones, cannibalisant le marché des feature phones.

Les consommateurs ne seraient ainsi pas tant intéressés par la qualité des smartphones en soi mais par les promesses d'usages qui sont faites autour par rapport à un certain prix, prix qui n'est plus limité au haut de gamme.

Sans surprise, les analystes prévoient un nouveau terminal mobile chez Apple, mais qui devra être plus qu'une simple évolution de la gamme existante, et une belle progression d' Android. Malgré le nombre de nouveaux acteurs qui se sont lancés sur le marché des smartphones grâce à Android, ce sont les acteurs traditionnels qui resteront les plus performants en 2010.

Nokia pourrait surprendre avec la nouvelle interface pour Symbian et Microsoft ne devrait pas briller beaucoup plus en 2010 qu'en 2009 avec Windows Mobile.