Le principe est simple, mais il a de quoi changer la donne : au lieu de s'attaquer directement au virus, ces nouveaux composés activent une voie de défense naturelle au sein de nos cellules hôtes, appelée la réponse intégrée au stress (ISR). Normalement, cette voie se déclenche pour stopper la production de protéines virales dès qu'une infection est détectée. Ce que font les molécules découvertes, c'est "la faire tourner à plein régime", explique Felix Wong, l'auteur principal de l'étude. Pour trouver ces pépites, l'équipe a mis au point une technique de criblage optogénétique inédite, testant près de 400 000 composés chimiques. Le résultat ? Plusieurs candidats prometteurs, dont l'IBX-200, qui a réduit la charge virale et les symptômes de l'herpès chez la souris. L'aspect fascinant : ces composés n'agissent que sur les cellules déjà infectées, sans affecter les cellules saines. Une précision chirurgicale qui minimise les effets secondaires.

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Comment l'optogénétique a-t-elle permis cette découverte ?

L'optogénétique, c'est une technique de bio-ingénierie qui utilise la lumière pour sonder et contrôler des fonctions biologiques. Dans cette étude, les chercheurs ont modifié une protéine clé de la réponse au stress (PKR) pour pouvoir l'activer avec de la lumière bleue, simulant ainsi une infection virale sans réellement stresser la cellule. C'est cette "lumière" qui a permis de cribler une immense bibliothèque de près de 400 000 molécules. En mesurant le taux de survie des cellules exposées à la lumière et aux composés, l'équipe a pu identifier celles qui amplifiaient la capacité des cellules à bloquer la réplication virale. "Si la voie était activée en réponse à une infection virale, nos composés la mettent à fond", précise Felix Wong. Cette méthode offre un niveau de précision et de contrôle inégalé par les techniques de criblage traditionnelles, permettant de débusquer des molécules avec des mécanismes d'action inédits. La recherche, menée par le MIT, l'UCSB et Integrated Biosciences, a été publiée dans la prestigieuse revue Cell.

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Un traitement "tout-en-un" pour les maladies virales ?

Le développement antiviral classique est un marathon : un médicament pour un virus spécifique. Mais les chercheurs de cette étude ont eu une intuition géniale : et si on pouvait moduler la réponse au stress de la cellule hôte pour combattre tous les virus ? "Dans ce cas, nous avons émis l'hypothèse que la modulation de la réponse au stress de la cellule hôte pourrait nous donner une nouvelle classe d'antiviraux à large spectre - des composés qui agissent directement sur les cellules hôtes pour modifier quelque chose de fondamental sur la façon dont tous les virus se répliquent", explique Felix Wong. C'est une véritable révolution conceptuelle. Au lieu de courir après chaque nouvelle mutation virale ou chaque nouvelle pandémie, nous pourrions disposer de molécules capables de rendre notre organisme universellement plus résistant aux infections. James Collins, l'un des auteurs principaux, ne cache pas son enthousiasme : "Nous sommes très enthousiastes à propos de ce travail, qui nous permet d'exploiter la réponse au stress des cellules hôtes pour identifier et développer des antiviraux à large spectre."

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Quelles sont les implications pour la santé et les futures pandémies ?

Les implications de cette découverte sont colossales. Imaginez un monde mieux préparé à la prochaine pandémie, avec des molécules que les gens pourraient prendre pour être "généralement meilleurs à combattre les infections", comme le souhaite Maxwell Wilson, co-auteur et co-fondateur d'Integrated Biosciences. Cela pourrait transformer la gestion des épidémies, en offrant une première ligne de défense rapide, sans attendre un vaccin spécifique. Mais l'ISR (réponse intégrée au stress) a des implications bien plus larges. Elle est impliquée dans le vieillissement, les maladies neurodégénératives et même certains cancers. L'équipe explore déjà comment ces composés pourraient aider à vieillir en meilleure santé, en corrigeant les dysrégulations de l'ISR liées à l'âge. C'est une nouvelle voie pour la découverte de médicaments, où l'optogénétique, la chimie et l'IA se combinent pour débusquer des traitements transformateurs. Le rêve, est désormais de les amener jusqu'aux essais cliniques avant de les déployer plus largement.

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Foire Aux Questions (FAQ)

Qu'est-ce que la réponse intégrée au stress (ISR) ?

L'ISR est un mécanisme de défense naturel des cellules humaines. Il se déclenche en réponse à un stress (comme une infection virale ou la famine) et vise à arrêter la production de protéines, ce qui empêche les virus de se répliquer et aide les cellules à survivre ou à éliminer les cellules endommagées.

Ces nouveaux composés peuvent-ils traiter toutes les maladies virales ?

Les composés identifiés sont des antiviraux à large spectre, ce qui signifie qu'ils agissent contre plusieurs virus (Zika, herpès, VRS testés avec succès). L'objectif est de développer des molécules qui modulent la réponse de la cellule hôte pour combattre tout type de virus, offrant ainsi une approche plus universelle que les antiviraux spécifiques.

Quand ces traitements pourraient-ils être disponibles ?

La découverte est encore au stade de la recherche. L'équipe prévoit de tester ces composés contre un plus large éventail de virus et d'identifier d'autres molécules. L'objectif final est de les développer pour des essais cliniques, ce qui prendra du temps avant une éventuelle disponibilité pour le grand public.